Budget du Québec

La prudence a des limites

La saison du dépôt des budgets est arrivée. Les choix budgétaires des gouvernements ont un impact direct sur le niveau et les modalités d’imposition des citoyens et sur la quantité et la qualité des services qu’ils peuvent s’attendre à recevoir en contrepartie.

Que doit-on espérer du prochain budget du Québec ? L’atteinte d’un équilibre entre la prudence et un investissement efficace et adéquat dans les services !

Prudence

Depuis trois ans, la rigueur budgétaire et la prudence ont dominé les décisions budgétaires. Avec une population vieillissante (qui entraîne une rareté de la main-d’œuvre et exerce une pression croissante sur les coûts des soins de santé), un niveau d’endettement qui demeure relativement élevé et l’incertitude qui accompagne le vent de protectionnisme qui souffle aux États-Unis et en Europe, il ne serait pas opportun de se lancer dans d’importantes dépenses qui pourraient nous replonger dans un cycle de déficits.

Pour le prochain budget, le gouvernement devra faire preuve de prudence en protégeant les versements au Fonds des générations (FDG) pour réduire le poids de la dette publique ; en visant l’équilibre budgétaire après les versements au FDG ; si des surplus sont constatés pour les années antérieures, en les versant dans la réserve de stabilisation pour atténuer l’impact sur les services lors d’un éventuel ralentissement économique ; et en renonçant à la multiplication des annonces préélectorales.

La prudence a toutefois des limites. Être prudent ne signifie pas qu’il faut systématiquement dégager des surplus additionnels.

L’argent doit se rendre aux citoyens

Le dernier rapport mensuel des opérations financières publié par le ministère des Finances indique que le gouvernement semble en voie de réaliser un autre important surplus budgétaire pour l’année 2016-2017. Ainsi, pour une deuxième année consécutive, un surplus additionnel et imprévu résultant principalement de dépenses inférieures à ce qui était prévu dans le budget serait dégagé.

Pour l’année en cours, après neuf mois, la croissance des dépenses de programmes est inférieure à 1,7 % alors que le ministre des Finances prévoyait une croissance de 4 %. Éducation, santé et services sociaux, justice… la situation est quasi généralisée.

Cela représente d’importantes sommes qui ne se sont pas rendues aux citoyens, même si l’argent était disponible.

Depuis trois ans, le Conseil du trésor a clairement mis un frein aux dépenses et modifié les façons de dépenser des ministères. Ce changement a eu comme conséquence de réduire les dépenses au-delà des prévisions budgétaires. Pourtant, les besoins sont réels et l’argent est là. Le moment est maintenant venu de rectifier le tir et de trouver les moyens pour que l’argent se rende à destination en temps opportun.

Le redressement des finances publiques en cours depuis plusieurs années a permis de retrouver une marge de manœuvre financière. Dans son prochain budget, le gouvernement devra l’utiliser pour investir en éducation et en santé en garantissant une croissance annuelle du budget de 3,5 % pour l’éducation et de 4,2 % pour les soins de santé pour une période de cinq ans. Selon les analyses de l’Institut du Québec, cela permettrait de maintenir le niveau et la qualité des services sans pour autant renouer avec les déficits.

Pour que ces bonnes intentions ne restent pas lettre morte comme ce fut le cas au cours des dernières années, le gouvernement devra expliquer clairement quels moyens il prendra pour s’assurer que l’argent se rende aux écoles, aux élèves, aux hôpitaux et aux patients. Réduire les règles et les approbations ? Décentraliser les façons de dépenser les budgets ? Peu importe la solution, le fardeau de la preuve repose du côté du gouvernement.

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