OPINION

TRANSPORT
Le REM sera plus coûteux que l’on pense

Le chroniqueur Michel Girard a récemment relancé les discussions sur les coûts annuels du Réseau express métropolitain (REM). Il conclut que le projet sera très coûteux, soit une facture annuelle de la Caisse de dépôt (CDPQ) de 438 millions en 2027.

La CDPQ a immédiatement répliqué que le REM comportera des coûts semblables aux autres réseaux de trains de banlieue et d’autobus pour chaque kilomètre parcouru par un passager. Elle insinue donc que le REM ne causera pas de forte hausse des dépenses en transports collectifs. Voici quelques évaluations qui démontrent que leur approche est trompeuse, presque mensongère.

En fait, la facture annuelle du REM est facile à définir, puisqu’il s’agit simplement de multiplier les « déplacements-km » par les 72 ¢ prévus dans le contrat.

Il existe cependant trois enjeux. 

Premièrement, ces 72 ¢ seront indexés à l’inflation et deviendront environ 84 ¢ en 2031. Deuxièmement, est-ce que la distance moyenne parcourue est valide ? Quatorze kilomètres, selon la CDPQ. Troisièmement, est-ce que les prévisions d’achalandage sont valides ? Nous croyons que ces prévisions sont sous-évaluées (intentionnellement ?) à 162 000 déplacements par jour en 2025, avec une croissance annuelle de 0,6 %. Pour 2031, nous avons utilisé une prévision plus réaliste de 180 000 déplacements par jour.

En conséquence, la facture annuelle du REM sera de 600 millions. Pour définir un coût net, il faut cependant tenir compte des coûts des services remplacés par le REM, mais aussi des services de rabattement vers le REM que les sociétés de transport sont tenues de fournir à leurs frais.

Selon le BAPE, 90 % des futurs usagers du REM prennent déjà les transports collectifs. Ces usagers proviennent surtout de trois lignes existantes : 

 – La ligne de train de Deux-Montagnes est remplacée par le REM. Ses coûts sont de 41 millions par an (2016) ;

 – Plusieurs usagers du REM proviendront de la ligne de train de Vaudreuil. Il n’y a pas d’économie puisque cette ligne sera maintenue. En fait, en enlevant de nombreux usagers à cette ligne, le REM augmentera son déficit annuel d’exploitation ;

 – Le REM remplace les autobus sur la voie réservée du pont Champlain. Dans sa réplique récente, la CDPQ affirme que le coût « moyen » des autobus est aussi élevé que ceux du REM, par déplacement-km. Cette comparaison est trompeuse, puisque les services d’autobus remplacés sont très différents de la « moyenne ».

Le REM remplace des services express, avec des autobus bondés, qui n’ont aucun arrêt à faire sur 12 km. À titre d’exemple, l’autobus Express Chevrier coûte environ 3 $ par déplacement, soit 25 ¢ par déplacement-km, beaucoup moins que la moyenne des autobus urbains. Sur cette base, tous les autobus remplacés coûtent environ 45 millions par année.

De plus, la CDPQ laisse aux sociétés de transport les portions les plus coûteuses des réseaux d’autobus, soit la desserte locale, à basse vitesse, avec de nombreux arrêts et peu de passagers. Par déplacement-km, les coûts des autobus qui desservent le REM vont donc être supérieurs à la moyenne.

On peut donc arriver à la conclusion globale suivante : à cause du REM, il y aura un surcoût net d’au moins 500 millions en 2031, pour un nombre semblable d’usagers.

Devant cette réalité, l’Autorité régionale de transport métropolitain aura-t-elle le mandat d’augmenter les tarifs de tous les usagers de la région de Montréal pour payer le REM ?

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