Entrevue
« FLABBERGASTING » CHRISTELLE
La Presse
« Flabbergasting » : caractère de ce qui étonne, et adjectif qui semble assez bien décrire l’état dans lequel se trouve l’auteure du blogue Christelle Is Flabbergasting devant les surprises que lui a réservées sa vie au cours des dernières années. Son parcours unique l’aura menée de la France au Québec, en passant par Barcelone, et du métier de directrice artistique à celui de blogueuse-cuisinière !
« Flabbergasting », aussi, comme dans savoir s’étonner et s’émerveiller à la découverte de nouvelles saveurs. « Je suis trop curieuse pour laisser passer la chance de découvrir un aliment. Même une aisselle de babouin peut être intéressante ! », lance-t-elle.
Heureusement pour nous, c’est une recette plus accessible à laquelle elle choisit de nous initier le jour de notre rencontre : un granola testé et re (re)testé par la perfectionniste qu’elle avoue être. Entre deux tasses d’avoine, quelques cuillerées de sirop d’érable et une tasse d’Earl Grey, Christelle se raconte.
« Je choisis surtout mes recettes en fonction de mes expériences de vie et de ce que j’ai envie de manger. Je ne suis pas chef, mais cuisinière, raconte la pétillante jeune femme, qui parle avec humour et beaucoup de gestes. Mes recettes sont simples, le ton, personnel. Je ne me prends pas pour une autre et c’est ce que les gens aiment, je pense. »
Ceux qui suivent son blogue depuis ses débuts connaissent son parcours, car comme elle le précise, « what you see is what you get », dans la vie comme sur son blogue. Petit survol pour les autres : Christelle is flabbergasting est né en 2008, son auteure, quelque 23 ans plus tôt en France, dans une famille bien touillée. Son père est Arménien, né au Liban, sa mère, Syrienne d’origine grecque. Ces origines se traduisent dans son assiette en un aux influences multiples qui a toutes les chances d’attiser les papilles d’une jeune fille gourmande !
C’est hors du nid familial, toutefois, lors d’un voyage étudiant à Cracovie, où elle se rend pour trois mois, que la jeune Parisienne a son premier déclic culinaire en cuisinant avec ses amis. Ce plaisir convivial se confirmera par la suite à Barcelone, où elle s’installe un an plus tard. « Après avoir rassasié toutes mes envies de bocadillos (sandwichs à la tomate et au jambon cru), j’en suis venue à la conclusion que si je voulais bien manger, j’étais mieux de m’y mettre. » Ce qu’elle n’a pas fait à moitié…
Petit à petit, la cuisine se faufile dans sa vie, passant de nécessité à plaisir, et de plaisir à obsession. Quand elle s’installe à Montréal, où un emploi de directrice artistique l’attend, la globe-trotteuse démarre son blogue, d’abord pour garder contact avec ses amis et y relater des moments de son quotidien, ensuite par pure passion.
« Ça s’est passé de façon naturelle. Les recettes ont pris de plus en plus de place sur le blogue et le blogue, de plus en plus de place dans ma vie. Puis, je n’ai plus eu qu’une envie, c’est de cuisiner et de faire des photos ! » N’arrivant plus à tout concilier, elle prend une décision longuement mûrie et quitte son emploi un vendredi de 2010. Le lundi suivant, elle se voit offrir une pige régulière à . Parlez d’un sens du !
Christelle met maintenant son œil artistique au profit de ses nombreux projets. C’est toutefois avec le même sens du détail qu’elle perfectionne l’image pour la rendre appétissante. Le style est léché, frais, lumineux. « J’ai beaucoup travaillé dans le alimentaire. Avant, j’étais celle qui demandait à quelqu’un de pousser le croissant un peu plus à gauche, ou un brin plus à droite sur des culinaires. Maintenant, c’est moi qui pousse le croissant ! »
Aussi à l’aise devant les fourneaux qu’à manipuler son appareil photo ou les mots, Christelle crée des univers invitants, conviviaux et sans prétention, s’attardant aux anecdotes entourant chaque plat et aux raisons qui ont motivé sa création. Ce ton personnel plaît. Son blogue reçoit entre 60 000 et 75 000 visites par mois, et ses lecteurs des sections Gourmand et Pause lui sont fidèles. « Le nombre de lecteurs n’a jamais eu d’importance pour moi. C’est la qualité des interactions qui m’importe. Échanger, c’est ça qui m’allume ! »
À ces occasions d’échanges s’ajoute maintenant un livre qui rassemble des recettes déjà publiées sur son blogue ou dans , et une moitié de recettes originales testées par un bassin de personnes sélectionnées à la suite d’un appel à tous lancé plus tôt dans l’année. Ce livre, elle l’imagine comme un compagnon de cuisine, pas un beau recueil d’images qu’on place sur la table basse du salon, mais de ceux qu’on utilise et qu’on salit.
« J’ai beaucoup cuisiné avec le livre de Ricardo. J’espère que le mien donnera envie aux gens de s’en inspirer, pour cuisiner sans pression. Amusez-vous, invitez vos amis et mangez bien ! » L’invitation est lancée.
de Christelle Tanielian,Les Éditions La Presse,192 p.,34,95 $.