Réforme suspendue en immigration

« J’ai voulu aller rapidement », s’excuse Simon Jolin-Barrette

Québec — Après une semaine de crise, le gouvernement Legault a fait acte de contrition, mardi, admettant que « l’exécution » de sa réforme de l’immigration n’avait « pas été bien faite ».

« Je m’excuse pour le travail qui n’a pas été fait de façon aussi parfaite qu’on l’aurait souhaité. […] L’objectif était le bon, mais l’exécution n’a pas été bien faite », a déclaré François Legault.

La semaine dernière, le premier ministre et son ministre de l’Immigration, Simon Jolin-Barrette, ont défendu bec et ongles les modifications au Programme de l’expérience québécoise (PEQ), qui inclut désormais des listes de domaines d’études et d’emplois liés à la pénurie de main-d’œuvre pour déterminer l’admissibilité.

« À l’avenir, quand [on fait] des changements importants, [on va] s’assurer que nos listes sont bien faites. »

— François Legault

Un peu plus tôt, M. Jolin-Barrette, la mine basse, avait affirmé qu’il « [s’excusait] auprès des Québécois » et qu’il prenait « l’entière responsabilité des erreurs qui ont été commises dans la réforme du Programme de l’expérience québécoise ».

Une semaine de crise

Cette réforme en matière d’immigration, qui a plongé le gouvernement Legault dans une crise la semaine dernière, a été mise en application trop rapidement, a admis mardi le ministre de l’Immigration.

« J’ai voulu aller rapidement relativement à la réforme du PEQ. J’aurais dû prendre davantage mon temps », a dit M. Jolin-Barrette.

Le PEQ est un programme qui sert de voie rapide pour les étudiants et les travailleurs étrangers temporaires présents au Québec afin qu’ils obtiennent leur Certificat de sélection du Québec (CSQ), nécessaire à la résidence permanente. Dans sa réforme, Québec a établi une liste de formations et d’emplois pour accéder au programme, mais cette liste était remplie de métiers tombés en désuétude.

Dans un premier temps, bombardé de critiques, le gouvernement Legault a accordé la semaine dernière un droit acquis aux étudiants et travailleurs étrangers qui étaient présents au Québec avant la mise en place de sa réforme. Vendredi, il a finalement suspendu la réforme.

« J’aurais dû davantage consulter les différents partenaires du milieu économique et du milieu éducatif. C’est ce que je vais faire au cours des prochaines semaines. »

— Simon Jolin-Barrette

« J’aurais dû mieux faire les choses. […] Je vais m’améliorer. Ce que je peux vous dire, c’est qu’une telle erreur ne se reproduira pas », a-t-il également affirmé, mardi.

L’opposition veut un nouveau ministre

En matinée, mardi, le chef de l’opposition officielle, le libéral Pierre Arcand, a demandé au premier ministre Legault de retirer au jeune ministre ses responsabilités en immigration.

« Ce qui m’apparaît aussi très clair, c’est qu’à plusieurs reprises, le premier ministre a passé l’éponge, parce qu’il y a eu beaucoup de gaffes faites par M. Jolin-Barrette. Il ne doit plus passer l’éponge », a affirmé M. Arcand.

« Avec tout le cafouillage qu’on a vu, avec l’insensibilité qu’on a vue par rapport à la question de l’immigration, nous, à Québec solidaire, ça fait un petit bout qu’on dit : bien, enlevez-lui, s’il vous plaît, ce portefeuille-là », a pour sa part affirmé la cheffe solidaire, Manon Massé.

« Tous les partis rêveraient d’avoir un jeune talentueux comme le ministre de l’Immigration. Il a toute ma confiance. »

— François Legault

« Il y a une chose qui est sûre, c’est qu’on veut aller de l’avant avec la réforme du système d’immigration au Québec. C’est trop important pour être résigné comme le Parti libéral. C’est trop important de poser des gestes pour améliorer les choses pour faire en sorte que, lorsqu’on sélectionne des personnes immigrantes, elles répondent aux besoins du marché du travail », a également affirmé M. Jolin-Barrette.

« Ça a passé plusieurs étapes, des comités ministériels. Personne n’a rien vu. Alors c’est une erreur de tout le gouvernement au complet, y compris du premier ministre qui a défendu jusqu’à la fin, bec et ongles, ce règlement », a pour sa part affirmé Pascal Bérubé, du Parti québécois.

— Avec Martin Croteau, La Presse

Alexandre Cusson courtisé par l’establishment libéral pendant des mois

Le président démissionnaire de l'UMQ souhaiterait succéder à Philippe Couillard 

QUÉBEC — Une offensive de charme menée depuis des mois par des membres de l’establishment libéral a porté ses fruits : Alexandre Cusson a annoncé mardi qu’il quitte la présidence de l’Union des municipalités du Québec (UMQ). Il devrait affronter Dominique Anglade dans la course à la succession de Philippe Couillard.

Le maire de Drummondville a remis sa démission lors d’une réunion extraordinaire du conseil d’administration. Il était devenu membre du Parti libéral du Québec (PLQ) la semaine dernière.

M. Cusson n’a pas donné suite à la demande d’entrevue de La Presse.

« J’ai vécu deux années passionnantes comme président de l’UMQ qui ont culminé avec la signature d’un pacte fiscal dont les municipalités du Québec peuvent être fières », a-t-il déclaré dans un communiqué.

Il y a quelques jours encore, en marge d’un sommet de l’UMQ à Québec, M. Cusson se disait heureux de sa situation « pour le moment ». Mais il ne cachait pas avoir été sollicité pour la direction du PLQ.

« Un parti en lambeaux »

Des membres en vue de l’establishment libéral, dont l’ancien chef Daniel Johnson, ont en effet multiplié les représentations pour le convaincre d’entrer dans la course. Il a aussi rencontré d’anciens ministres libéraux qui lui ont brossé un tableau sans ménagement de l’importance du défi pour reconstruire « un parti en lambeaux », a-t-on confié à La Presse.

S’il confirme sa candidature, M. Cusson pourra compter sur l’appui de l’ancien maire de Montréal Denis Coderre, avec qui il a noué une relation serrée lorsqu’il était vice-président de l’UMQ.

L’ex-candidat libéral dans Taschereau Florent Tanlet sera aussi de son équipe. Il s’agit d’une prise notable puisqu’il a quitté la campagne de Dominique Anglade au cours des dernières semaines.

L’ancien directeur général du PLQ, Sylvain Langis, avait sollicité M. Cusson comme candidat avant les élections de 2018, mais celui-ci a fermé la porte en expliquant être accaparé par la présidence de l’UMQ et la mairie de Drummondville.

Depuis, ils ont maintenu des contacts réguliers, a confirmé M. Langis mardi.

« Je pense qu’il serait un candidat de valeur dans la course », a-t-il souligné.

Pour l’heure, Dominique Anglade est la seule candidate officielle à la direction du PLQ. Son organisation est active depuis plusieurs mois et elle a déjà recueilli l’appui de neuf députés. Une longueur d’avance que certains jugeaient insurmontable pour un éventuel rival.

Prudente, soulignant que la candidature de M. Cusson n’est pas encore confirmée, Dominique Anglade n’a pas paru déstabilisée par ce rebondissement inattendu.

« J’ai toujours dit que je serais heureuse s’il y avait une course. Je l’ai dit dès le début », a-t-elle souligné.

Adversaire de taille

Si M. Cusson confirme sa candidature, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne se trouvera face à un adversaire de taille, indique-t-on dans les rangs libéraux. Bien que son parcours politique ait surtout été au municipal, il a déjà été membre de l’aile jeunesse du PLQ dans les années 80, fait-on remarquer. Cet attachement de longue date est susceptible de faire contraste avec Mme Anglade, qui a entamé sa carrière politique à la Coalition avenir Québec.

On relève aussi que sa candidature pourrait recueillir des appuis en région, un atout important pour un parti qui n’a fait élire qu’un député à l’est du Grand Montréal aux dernières élections générales.

En revanche, son nom a circulé abondamment comme candidat pour les libéraux de Justin Trudeau avant les récentes élections fédérales. Ce flirt pourrait lui nuire aux yeux des nationalistes qui sont encore au sein du PLQ.

une Course souhaitée

Au cours des dernières semaines, plusieurs libéraux influents ont dit souhaiter une course pour déterminer le successeur de Philippe Couillard. Jean-Marc Fournier est du nombre, non parce qu’il s’oppose à la candidature de Mme Anglade, mais parce qu’il croit que le parti bénéficierait d’un débat d’idées.

« J’appuie M. Cusson, j’appuie aussi Dominique Anglade, a dit M. Fournier mardi. Pour moi, l’important est qu’il y ait une course. »

Aux yeux de l’ancien ministre Pierre Moreau, « Alexandre Cusson serait une candidature de grande valeur pour le PLQ ». Mais il avoue être perplexe devant la rapidité avec laquelle le maire de Drummondville est passé de la réflexion à la décision. Un empressement étonnant, selon lui.

Pour l’ex-ministre Gaétan Barrette, qui dit réfléchir à la possibilité de se porter candidat, la candidature d’Alexandre Cusson serait « une excellente nouvelle pour le Parti libéral ».

« Quand j’étais à la Santé, j’ai fait plusieurs annonces pour le Centre-du-Québec, je l’ai rencontré à plusieurs reprises, c’est un gars très fort, a souligné M. Barrette. Avec ce maire, Drummondville est devenue le paradis de la PME, rappelle-t-il. Et surtout, Cusson va chercher des appuis en région, en dehors de Montréal où le PLQ est confiné actuellement. »

« C’est une personne qui a une belle capacité à rassembler le monde, et je suis très contente qu’il ait pris sa carte de membre », a pour sa part dit la députée Marwah Rizqy, qui est toujours en réflexion elle aussi.

Si elle est seule en piste, Dominique Anglade sera couronnée dès février. S’il y a une course, on connaîtra le gagnant en mai.

Négociations avec les médecins spécialistes

Québec s’impatiente et brandit la menace d’une loi spéciale

QUÉBEC — Québec montre des signes d’impatience dans ses négociations avec la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ). Il brandit la menace d’une loi spéciale pour réduire leur rémunération s’il n’y a pas de « perspective d’entente » vendredi.

La FMSQ a fait passer sa proposition de 250 à 400 millions de dollars par année. Or, cette offre ne prévoit aucune baisse des tarifs payés aux médecins pour leurs actes médicaux – une pomme de discorde avec Québec. La proposition de la FMSQ comprend plutôt, par exemple, des sommes non utilisées pour payer les chefs d’unité ou des économies liées à une révision des pratiques pour éviter les dédoublements.

Le gouvernement Legault souhaite obtenir plus que les 400 millions, mais il ne chiffre pas ses attentes. Le premier ministre François Legault parlait de 1 milliard en campagne électorale, mais il n’avance plus ce chiffre aujourd’hui. L’enveloppe totale de rémunération des médecins spécialistes avoisine les 5 milliards par année.

Objectif :  une « perspective d’entente »

Lors d’une mêlée de presse mardi, Christian Dubé, président du Conseil du trésor, a tracé ce qu’il appelle « une ligne dans le sable ».

« Je pense qu’on a fait de belles avancées, il y a eu de bonnes discussions, mais là je suis rendu à un endroit où il faut voir si on est capable d’avoir des perspectives d’entente. Je ne vous dis pas qu’on doit avoir une entente pour vendredi. Mais on doit avoir une perspective d’entente. Est-ce qu’on est assez avancé à la fin de la semaine pour dire qu’on est capable de régler ça ? », a-t-il affirmé. On n’est « pas encore » sur le point d’un accord, selon lui.

À défaut de « perspective d’entente », il entend « regarder les autres alternatives ». « Et vous les connaissez, les autres alternatives », a-t-il ajouté, refusant de prononcer lui-même les mots « loi spéciale ».

François Legault a déjà indiqué qu’il voulait tirer un trait sur les négociations d’ici à la fin de l’année, quitte à déposer une loi spéciale. Mardi, il a demandé que « les travaux s’intensifient ».

Christian Dubé a saisi le message : « Ça fait un an que je travaille en sous-marin là-dessus. Puis comme on se rapproche de la date, c’est sûr que la pression est un peu plus forte. » La présidente de la FMSQ, Diane Francoeur, a condamné la menace de loi spéciale et a déploré l’empressement de Québec.

Nouvelle tentative pour convoquer Desjardins

Le gouvernement Legault veut convoquer Desjardins à l’Assemblée nationale le 21 novembre pour se pencher sur la fuite de renseignements qui a touché 4,2 millions de personnes. Il présentera une motion à l’Assemblée nationale mercredi en vue d’entendre non seulement Desjardins, mais également l’Autorité des marchés financiers (AMF), Equifax, la Sûreté du Québec, l’Association des banquiers canadiens et le Réseau intégré sur la cybersécurité. Une copie de la motion a été envoyée aux partis de l’opposition mardi. Des pourparlers pour tenir une commission parlementaire sur la protection des données personnelles ont échoué au cours des derniers mois. Les partis de l’opposition voulaient que davantage de groupes soient entendus. Il faudra leur appui pour que la motion soit débattue puis votée en Chambre. Le chef intérimaire du Parti québécois, Pascal Bérubé, semble favorable à la motion, puisqu’il a indiqué sur Twitter que son parti « a demandé cela en juillet dernier » et a regretté qu’il y ait eu autant de « temps perdu ».

— Tommy Chouinard, La Presse

Annonce de la caq dans Jean-Talon

Pascal Bérubé en appelle au DGEQ

Le chef par intérim du Parti québécois, Pascal Bérubé, s’interroge sur le côté partisan de l’annonce gouvernementale faite dimanche à Québec, dans le stationnement d’un hôpital de la circonscription de Jean-Talon. Comme une élection partielle a cours dans la circonscription, il compte demander au Directeur général des élections du Québec (DGEQ) de se pencher sur le dossier. « La candidate [de la Coalition avenir Québec] dans Jean-Talon était présente. Il y a confusion des genres depuis octobre dernier [2018] entre la CAQ et le gouvernement », a affirmé M. Bérubé, mardi matin, lors du retour des députés au parlement. Dimanche, la ministre de la Santé Danielle McCann était au CHUL accompagnée de quatre élus de la région, dont la vice-première ministre et ministre responsable de la région, Geneviève Guilbault, pour annoncer la réduction des frais de stationnement dans les hôpitaux. Joëlle Boutin, candidate caquiste pour la partielle du 2 décembre dans Jean-Talon, était aussi de la partie. — Le Soleil

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