emploi

Le Québec affiche son plus bas taux de chômage des 40 dernières années. Notre analyste Rudy Le Cours et notre chroniqueur Jean-Philippe Décarie font le point sur la situation.

Analyse

Dynamisme sans pareil sur le marché du travail

Depuis six mois, le marché du travail québécois connaît un dynamisme sans pareil. Il s’y est ajouté près de 90 000 des quelque 97 100 emplois créés depuis un an, concentrés dans le secteur des services, dont les deux tiers à temps plein.

Les données de janvier de l’Enquête sur la population active (EPA) de Statistique Canada font état de peu de changements à ce chapitre en janvier.

Toutefois, le taux de chômage québécois est redescendu à son creux historique de 6,2 % atteint en novembre, à cause d’une légère diminution de la population active qui n’est pas significative, statistiquement parlant. Il y a un an, le taux de chômage s’élevait à 7,6 %.

La performance du Québec étonne à plus d’un titre. Seuls la Colombie-Britannique et le Manitoba ont désormais un taux de chômage plus faible.

La moyenne canadienne se situe à 6,8 % tandis que le taux ontarien s’établit à 6,4 %, malgré une forte augmentation du nombre d’emplois en janvier. Il y a un an, leur taux de chômage respectif était de 7,2 % et 6,7 %.

Ce n’est pas là le plus spectaculaire. Le taux d’emploi, c’est-à-dire la proportion de la population occupée chez les 15 ans et plus, a augmenté d’un point de pourcentage depuis un an, à hauteur de 60,8 %. L’écart avec l’Ontario n’est plus que de deux dixièmes tandis que celui avec le Canada dans son ensemble est de six dixièmes.

On peut mesurer le resserrement du marché du travail québécois d’une autre façon : le nombre d’emplois créés depuis un an est deux fois plus élevé que l’augmentation de la population de 15 ans et plus.

À l’opposé, tant en Ontario qu’au Canada dans son ensemble, la population a crû plus vite que le nombre d’emplois.

On comprend un peu mieux ce qui se passe quand on examine la cohorte des 55 ans et plus. Au Québec, son nombre a augmenté de 70 900 depuis un an et son taux d’emploi de 0,7 %. En Ontario, le taux d’emploi dans cette cohorte a diminué de 0,4 %.

Il reste encore un bassin de main-d’œuvre inexploité chez les Québécois de 55 ans et plus. Malgré les progrès depuis un an, le taux d’emploi se situe à 31,8 % contre 35,9 % en Ontario et 35,5 % à l’échelle canadienne.

Ce sont avant tout à Montréal et, dans une moindre mesure, à Québec où se concentrent les embauches depuis un an. 

Dans l’agglomération métropolitaine, le taux de chômage se situe à 6,6 %, en baisse de deux points depuis un an. Le taux d’emploi s’établit à 62,5 %, en hausse annuelle de 1,8 point.

Montréal supplante désormais le Grand Toronto où le taux de chômage s’établit à 7,0 % et le taux d’emploi 61,4 %. La métropole canadienne a perdu 9400 emplois depuis un an.

Et que dire de Québec où le taux de chômage se situe à 4,3 % seulement pour un troisième mois d’affilée ? Au Canada, seul Brandford fait mieux, et de justesse, mais le taux d’emploi y est moins élevé.

Par industrie, les nouveaux emplois du Québec se sont concentrés en agriculture, dans la finance, les assurances et dans les services aux entreprises. Ces gains ont été en grande partie annulés par des diminutions d’effectifs en information, culture et loisirs et dans la fabrication encore une fois.

Le Québec compte 11 200 emplois en usines de moins qu’il y a un an. L’effectif de cette industrie ne représente plus que 12,1 % des emplois québécois. C’est néanmoins encore un peu plus que le taux de 10,7 % en Ontario, malgré l’addition de 14 000 emplois dans cette industrie en janvier. À l’échelle canadienne, l’hémorragie en usines a fait disparaître plus de 37 000 postes depuis un an.

Tant au Québec qu’au Canada dans son ensemble, le rythme de création d’emplois depuis l’été paraît insoutenable. Depuis six mois, l’économie canadienne s’est enrichie de près de 240 000 postes, soit une moyenne de 40 000 emplois par mois.

Pourtant, le nombre d’heures travaillées a diminué durant la période. Si la croissance reste au rendez-vous, il faut plutôt s’attendre à ce que les employeurs augmentent le nombre d’heures travaillées par employé, sauf dans les cas où leur effectif est fortement composé de personnes de 55 ans et plus.

C’est seulement dans ces conditions que s’exerceront des pressions inflationnistes sur les salaires, susceptibles d’amener la Banque du Canada à conclure que l’économie canadienne tourne enfin à plein régime.

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