Monsieur l'inspecteur

Négocier après l’inspection

Le rapport d’inspection préachat, un outil qui sert à négocier à la baisse le prix d’une propriété ? Parfois oui, souvent non. Voici un éclairage sur une délicate question : devrait-on renégocier l’offre d’achat à la lueur de ce qu’a découvert l’inspecteur ?

C’était un triplex de Rosemont, de ceux qui se vendent très rapidement et à fort prix ces temps-ci. Une fois sur le toit, je constate que la toiture est « finie » : elle a plus de 30 ans et ses rides sont bien apparentes. Le client demande s’il y a matière à réviser à la baisse le prix offert au vendeur.

D’emblée, je lui précise que je suis inspecteur. J’ignore le prix de vente et c’est plutôt le rôle de son courtier de le conseiller à cet effet. Devant son regard implorant de lui donner un avis, je lui réponds par une question : est-ce qu’à la lueur de ce que nous avons découvert en inspection, votre impression de la valeur marchande de l’immeuble a changé ?

Négocier après l’inspection préachat, c’est toujours délicat. S’il y a d’autres acheteurs intéressés par la même propriété, le vendeur pourrait vous tourner le dos. Par contre, le jeu peut en valoir la chandelle, notamment quand l’inspection révèle des problèmes qui coûteront plusieurs milliers de dollars à réparer.

« On renégocie quand on a découvert quelque chose de significatif. Cela se produit dans 10 à 15 % des cas. » 

– Martin Michaud, courtier immobilier, Groupe Sutton-Immobilia

Il y eut une époque à Montréal où le marché des petits plex était si chaud que les acheteurs présentaient une offre plus élevée que le prix affiché, sans même visiter l’immeuble. Ils utilisaient ensuite le rapport d’inspection pour faire baisser le prix. Dans le marché d’aujourd’hui, cette tactique risque d’être mal perçue. Le vendeur avisé refusera de renégocier et ouvrira la porte au prochain acheteur intéressé.

Les bons courtiers encouragent leurs clients à présenter une offre qui reflète déjà l’état du bâtiment, tel qu’on peut le constater pendant les premières visites, avant même la venue de l’inspecteur. On renégociera seulement si l’inspecteur découvre de mauvaises surprises.

« Avant de présenter une offre d’achat, je fais une tournée du bâtiment avec mes clients, dit Martin Michaud. On aura déjà vu que certaines fenêtres sont à changer, que le calfeutrage est à refaire et que des portions de murs de brique devront être rejointoyées. »

On renégocie si l’inspecteur découvre…

– une toiture très endommagée

– des fissures importantes de fondation

– des infiltrations d’eau

– de la vermiculite ou tout autre contaminant

– des désordres structurels

Parfois, le vendeur n’était pas au courant d’un problème et il décide d’y remédier rapidement. L’acheteur peut, pour sa part, demander au vendeur d’effectuer certaines réparations et se réserver les autres, afin qu’elles soient réalisées à son goût. Ces ententes de bonne foi sont toujours préférables à une renégociation du prix convenu.

LA POINTE DE L’ICEBERG

Lorsque, par exemple, je découvre un excès d’humidité au sous-sol, j’encourage mon client à demander que soit cherchée la source de cette humidité avant que la transaction soit conclue. Souvent, les problèmes de moisissure ou de structure qu’arrive à percevoir l’inspecteur ne sont que la pointe de l’iceberg. C’est avant de devenir propriétaire qu’il faut faire ouvrir les murs et découvrir l’ampleur des dommages.

Si vous cherchez une propriété sans tracas, au lendemain de l’inspection, il est encore temps de se retirer de la transaction. Sachez toutefois que le vendeur pourrait se montrer très flexible. « Quand le rapport d’inspection est très défavorable, la plupart des vendeurs souhaitent s’entendre avec l’acheteur, affirme Martin Michaud. Si l’acheteur se désiste, le propriétaire devra divulguer tous les problèmes aux prochains acheteurs intéressés. »

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