Recours pour invalider les lois du Québec

Les avocats se prononcent ce soir sur la démarche du Barreau

Démarche politique inacceptable ou protection légitime des intérêts du public ? Les membres du Barreau du Québec se prononceront aujourd’hui sur le recours des barreaux du Québec et de Montréal pour faire déclarer inconstitutionnel le processus d’adoption des lois à l’Assemblée nationale.

Pour la deuxième fois de l’histoire de leur ordre professionnel, les avocats de la province se réuniront en assemblée générale extraordinaire en soirée à Montréal afin de se prononcer sur trois propositions qui visent à forcer le Barreau à se désister de son recours intenté en avril et à les consulter avant d’entreprendre toute autre démarche de nature politique.

La réunion a été demandée par des dizaines de membres, dont François Côté, un jeune avocat qui s’est fait connaître il y a quelques années en portant plainte à l’Office québécois de la langue française contre une publicité de l’humoriste Sugar Sammy.

« On s’apprête à aborder un très grand moment de notre démocratie professionnelle et on a hâte à cette assemblée qui va permettre à l’ensemble des membres de se prononcer sur cet enjeu de très grande importance », a déclaré Me Côté lors d’un entretien téléphonique hier.

Les barreaux allèguent dans leur procédure que les lois du Québec ne sont pas adoptées simultanément en français et en anglais à l’Assemblée nationale, comme le veut l’article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867. Ils demandent à la Cour supérieure de déclarer ces lois invalides et d’ordonner à Québec de les adopter de nouveau, mais cette fois en respectant la Constitution.

En pratique, précise le bâtonnier du Québec Paul-Matthieu Grondin, cela impliquerait pour l’Assemblée nationale d’embaucher des jurilinguistes qui traduiraient les lois en anglais tandis qu’elles sont débattues en français, plutôt qu’après, comme c’est le cas à l’heure actuelle.

Tollé politique et juridique

L’annonce de ce recours dans La Presse le mois dernier a provoqué un tollé dans les milieux politiques et juridiques. On accuse l’ordre professionnel d’outrepasser son mandat de protéger le public en intentant un recours de nature purement politique et basé sur une disposition aux relents coloniaux qui forcerait les élus de l’Assemblée nationale à délibérer en anglais.

Le bâtonnier du Québec Paul-Matthieu Grondin affirme qu’il n’en est rien. « Je suis conscient des sensibilités qu’il peut y avoir, mais je suis convaincu qu’au final, on se dirige vers un meilleur respect de l’intention en français du législateur », a-t-il déclaré hier en entrevue.

Me Grondin souligne qu’il existe souvent des incohérences entre les versions anglaise et française d’un article de loi et que ces incohérences appauvrissent le droit pour l’ensemble de la population. Il n’est nullement question de forcer les élus à délibérer en anglais plutôt qu’en français, dit-il, citant l’exemple du Parlement fédéral. Enfin, « c’est en plein dans le mandat de protection du public du Barreau de s’intéresser à des questions comme celle-là, de la cohérence des lois et de la primauté du droit ».

Il souligne que le dossier chemine depuis 25 ans et qu’il était temps d’agir en raison de l’inaction de Québec. Il se défend de ne pas avoir consulté les membres, puisque l’idée a elle aussi cheminé de manière transparente au sein des instances de l’ordre professionnel, dont le C.A., les barreaux de section et dans les rapports annuels.

Actualités

Les garderies privées non subventionnées réclament l’aide de l’État

Québec — La Coalition des garderies privées non subventionnées du Québec réclame des fonds publics pour payer le salaire de leurs éducatrices qualifiées. Ce serait une façon d’améliorer la qualité des services, selon elle.

Une étude de l’Observatoire des tout-petits dévoilée cette semaine conclut que les garderies privées non subventionnées offrent des services de moindre qualité que les centres de la petite enfance (CPE) et d’autres services de garde subventionnés. La Coalition réplique que les données remontent à 2014 et qu’« il y a eu une grosse amélioration » depuis.

Selon sa présidente, Marie-Claude Collin, les garderies ont besoin de l’aide de l’État pour faire plus.

Éducatrices qualifiées recherchées

« Tout le monde prône haut et fort que la qualité des services passe par les éducatrices. L’énorme problème qu’on a, c’est qu’on est en pénurie d’éducatrices qualifiées », plaide-t-elle.

Comme tout autre service de garde, une garderie privée non subventionnée doit avoir deux éducatrices sur trois qui sont qualifiées, c’est-à-dire qui sont titulaires d’un diplôme d’études collégiales en techniques d’éducation à l’enfance ou toute autre équivalence reconnue par Québec. « Beaucoup de garderies ne sont pas capables d’atteindre le deux sur trois, pas par manque de volonté, mais parce qu’il n’y en a pas sur le marché », affirme Mme Collin. Les CPE sont plus attrayants pour les éducatrices qualifiées parce que leurs salaires et leurs avantages sociaux sont « un peu plus élevés ».

« On demande au gouvernement de subventionner les éducatrices qui sont qualifiées dans tous les services de garde. On veut de la qualité ? On va avoir de la qualité ! », lance-t-elle.

« Donnant-donnant »

Il y aurait du « donnant-donnant », au dire de Mme Collin. En contrepartie de fonds publics, les garderies privées non subventionnées pourraient accepter de plafonner le tarif imposé aux parents. Rappelons que ces derniers bénéficient d’un crédit d’impôt pour les frais de garde, ce qui est considéré comme une subvention indirecte aux garderies privées. Mme Collin nie qu’une aide de l’État aurait pour effet d’augmenter les profits des propriétaires. La garde d’enfants, « ce n’est pas payant », selon elle. C’est pourtant une industrie en expansion : on compte 65 000 places dans les garderies privées non subventionnées, contre à peine 1620 en 2003.

La Coalition a présenté sa position au ministre de la Famille, Luc Fortin, mais aussi à la caquiste Geneviève Guilbault, qui s’est montrée « ouverte » à l’idée.

Sanivac

Bannie pour collusion, elle change de nom et obtient un contrat public

Un mois avant de plaider coupable pour sa participation à un cartel des égouts dans la région de Montréal, et ainsi se voir interdire de soumissionner des contrats publics, l’entreprise Kelly Sani-Vac est passée entre les mains de la troisième génération de la famille propriétaire, a modifié son nom, mais a conservé ses équipements, son adresse et la marque de commerce Sanivac. 

Informée de la situation, la Ville de Montréal vient néanmoins de lui accorder un contrat de 338 000 $ pour une période de trois ans.

Officiellement, l’entente-cadre a été accordée la semaine dernière par le comité exécutif à l’entreprise 9363-9888 Québec inc. et non à Kelly Sani-Vac. Il n’y a aucune raison légale pour ne pas accorder le contrat à l’entreprise qui est une nouvelle entité juridique, indique-t-on à la Ville.

Selon le chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville, Lionel Perez, il s’agit d’une « aberration ». 

« Il faut absolument que le gouvernement du Québec vienne colmater cette brèche dans la loi. Il est primordial, d’un point de vue contractuel, que la population ait confiance », dit-il. 

Se refaire une virginité

Kelly Sani-Vac a reconnu, en novembre dernier, avoir fait de la collusion avec ses concurrents pour truquer des appels d’offres jusqu’en 2011. Du coup, elle a été inscrite au Registre des entreprises non admissibles (RENA) le 15 janvier dernier et n’a donc plus le droit de brasser des affaires avec le gouvernement, des organismes publics et des municipalités jusqu’en 2023. Mais à la mi-février, Kelly Sani-Vac a volontairement été radiée, faisant place à 9363-9888 Québec inc.

« L’entreprise a été transférée à la troisième génération dans les règles de l’art, en toute transparence, comme n’importe quelle entreprise familiale », a indiqué à La Presse Carole-Ann Kelly, actionnaire et secrétaire-trésorière de l’entreprise.

Selon Mme Kelly, cette transformation n’a rien à voir avec l’enquête menée par le Bureau de la concurrence du Canada dès 2011 et les accusations déposées par la suite concernant le cartel des égouts.

« C’est quelque chose qui avait été réfléchi depuis longtemps et amorcé bien avant le jugement », souligne Mme Kelly, qui refuse de commenter le stratagème dans lequel Kelly Sani-Vac a mis les pieds, puisque « ce n’est pas [sa] compagnie ».

Elle a toutefois donné l’assurance que 9363-9888 Québec inc. « fait les choses différemment ». « Notre entreprise est 100 % clean et on est totalement en droit de soumissionner sur tous les contrats qui vont passer », a-t-elle ajouté.

Chose certaine, 9363-9888 Québec inc. fournira des toilettes portatives aux 19 arrondissements montréalais afin de combler les besoins sanitaires lors des événements culturels ou sportifs, par exemple, ainsi que sur les divers chantiers de la Ville. L’entente-cadre est valide jusqu’en mai 2021.

Procès Accurso

Un témoin raconte avoir été mêlé à la collusion après l’explosion de la voiture de son supérieur

C’est à la suite de l’explosion de la voiture de son supérieur en pleine nuit, en 2000, que Mario Desrochers s’est retrouvé au cœur du système de collusion dans l’attribution des contrats publics à la Ville de Laval. « [Gilles Théberge] m’a appelé la nuit : “Mario, fais attention, ma voiture a explosé” », a-t-il raconté hier au procès pour fraude et corruption de l’entrepreneur en construction Tony Accurso.

« Si on essaie d’insinuer que mon client a à voir de quoi dans ça ! », s’est alors indigné l’avocat de l’accusé, Me Marc Labelle. Questionné par le juge, le procureur de la Couronne a assuré ne pas du tout avoir l’intention de prouver que Tony Accurso était lié à l’explosion de la voiture de Gilles Théberge, qui a conclu son témoignage hier.

Promu du jour au lendemain directeur régional de l’entreprise d’asphaltage Sintra, Mario Desrochers s’est rapidement initié aux rouages du système de collusion et au paiement obligatoire à l’administration du maire Vaillancourt d’une ristourne de 2 % sur la valeur de tous les contrats truqués.

Peu de temps après sa nomination, Mario Desrochers s’est rendu la première fois dans les locaux de Marc Gendron pour lui remettre le « 2 % » destiné à la Ville. « J’étais pas familier avec ça, l’argent dans une enveloppe brune », raconte le témoin. Jusqu’à son départ en 2005, Mario Desrochers a payé la ristourne pour tous les contrats obtenus par Sintra. « C’était tout le temps de l’argent comptant, les chèques, il n’acceptait pas ça, et il n’y avait pas de reçu aussi », explique-t-il.

un partage bien rodé

Le partage des contrats était déjà bien rodé à son arrivée à la direction de Sintra. Les entrepreneurs se suivaient à la « queue leu leu » devant le bureau du directeur du génie à la Ville de Laval, Claude Deguise, pour obtenir la liste des entrepreneurs potentiels pour chaque projet promis. Puis, il suffisait de discuter avec les autres entreprises pour s’assurer d’obtenir des soumissions de complaisance. « Je te laisse aller sur le tien, tu me laisses aller sur le mien », résume-t-il.

Néanmoins, « l’incident » de son prédécesseur Gilles Théberge, devenu son homologue chez un compétiteur, a laissé des traces dans leurs relations. « Sintra m’a demandé de ne pas trop faire la magouille avec M. Théberge, de couper les liens, de faire affaire avec lui le moins possible », raconte Mario Desrochers. Son contre-interrogatoire se poursuit ce matin au palais de justice de Laval.

Hier matin, l’avocat de Tony Accurso a tenté de soulever des contradictions entre le témoignage de Gilles Théberge et son témoignage au premier procès de l’accusé, l’automne dernier. MMarc Labelle l’a notamment cuisiné sur la durée – quatre ou dix minutes – d’une rencontre dans le bureau de Tony Accurso pour discuter d’un contrat truqué de 4 millions de dollars en 2005.

« Tentez-vous de convaincre le jury que ça a été plus long ? », a lancé Me Marc Labelle. « Vous trouvez que je mens, moi, je dis que je dis la vérité », a affirmé le témoin, frondeur, plus tard dans le contre-interrogatoire.

Coupable d’avoir intimidé un journaliste de La Presse

Le Montréalais Volkan Demirel a plaidé coupable, hier, à une accusation d’intimidation à l’endroit du journaliste de La Presse Louis-Samuel Perron. Par vidéoconférence, il a reconnu avoir retrouvé le journaliste, le 22 janvier dernier, dans le local des médias du palais de justice de Montréal et de l’avoir menacé. « Tu m’as mis dans la merde, lui a-t-il dit, ma vie est en danger, donc ta vie est en danger. » Volkan Demirel a également plaidé coupable à une accusation de voies de fait à l’endroit d’Ednan El Mlegta, dans une affaire qui remonte au 19 juillet 2015. La juge Marie-Josée Di Lallo lui a imposé une peine de 12 mois et 1 jour pour les deux affaires. Vu qu’il a été en détention préventive à deux reprises, il recouvrera la liberté demain. La peine est assortie d’une probation de trois ans. — Jean Siag, La Presse

300
millions

C'est la somme promise par le gouvernement fédéral au cours des trois prochaines années pour aider les Rohingya persécutés en Birmanie. Des ministres ont promis cette somme et un leadership diplomatique, hier, en assurant que le Canada mènera des efforts sur la scène internationale pour mettre fin à la campagne de violence ethnique menée contre ce groupe. Le gouvernement a toutefois indiqué que le Canada n’avait aucune intention de commencer à accueillir certains des quelque 700 000 Rohingya qui ont fui la Birmanie et qui vivent maintenant dans des conditions sordides au Bangladesh voisin. — La Presse canadienne

La fiscaliste Marwah Rizqy se présente pour le PLQ

Inquiète du discours « alarmiste et populiste » de la Coalition avenir Québec (CAQ), la fiscaliste Marwah Rizqy a choisi de se présenter sous les couleurs du Parti libéral du Québec (PLQ) aux prochaines élections, en octobre. Mme Rizqy, qui avait d’abord tenté de se faire élire sous la bannière des libéraux fédéraux en 2015, dit avoir senti le besoin de s’impliquer dans cette élection provinciale « décisive ». « Pendant que certains vont proposer la petite noirceur aux Québécois, moi, je vais vous proposer de grands projets d’ambition », a-t-elle lancé en conférence de presse, hier. Mme Rizqy veut remporter la circonscription provinciale de Saint-Laurent, qui était jusqu’ici représentée par Jean-Marc Fournier. Il s’agit d’un château fort libéral. — La Presse canadienne

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