Le Canadien  Statistiques avancées

Qu’en pense le CH ?

Certains directeurs généraux de la Ligue nationale comme Peter Chiarelli (Boston), Stan Bowman (Chicago), Jim Nill (Dallas), Doug Armstrong (St. Louis) ou Dean Lombardi (Los Angeles) n’ont pas caché leur intérêt pour les statistiques avancées. Aux quatre coins de la LNH, d’Edmonton à Buffalo en passant par le New Jersey et Toronto, des spécialistes ont été embauchés à titre de consultants.

On entend que depuis cinq ans, le budget consenti aux statistiques au sein de chaque équipe aurait été multiplié par cinq ou six.

Qu’en est-il du Canadien ?

L’image souvent véhiculée veut que le Tricolore soit de la vieille école et peu enclin à sauter dans le train statistique. Or, ce n’est pas le cas. Aujourd’hui, aucune équipe n’ignore cette facette du hockey en raison de la mine d’informations qu’elle recèle.

À son arrivée à la tête du Canadien, Marc Bergevin a requis les services de Richard Coleman dont l'entreprise (Coleman Analytics) est l’une des pionnières dans le domaine. La petite firme, qui a démarré ses activités après le lock-out de 2005, offre ses services à quelques équipes de la LNH, et c’est par l’intermédiaire des Blackhawks de Chicago que le nouveau DG a appris à le connaître. Les Blues de St. Louis seraient aussi parmi ses clients.

Bergevin a toutefois décidé de ne pas renouveler le contrat de Coleman cette saison.

Un ancien DG de la LNH qui a déjà consulté le type d’informations que propose l’analyste a confié à La Presse qu’il avait trouvé banales quelques-unes des données et que certaines de ses conclusions étaient carrément erronées.

À ses débuts, Coleman se spécialisait dans les performances individuelles lors de situations dites sous pression. La compilation de données lui permettait d’identifier les joueurs les plus efficaces lorsque le match était serré, lesquels étaient les plus aptes à protéger une avance en fin de match, etc.

L’ancien DG reconnaît que l’homme avait amené des idées fraîches il y a quelques années, mais d’autres analystes réussissent mieux à demeurer à l’avant-garde.

DES PROFILS DIFFÉRENTS

Les individus qui peuplent de plus en plus les services d’analyse diffèrent des hommes de hockey. Certaines équipes ont embauché de simples blogueurs qui écrivaient sur les statistiques avancées. D’autres, des développeurs qui se spécialisent dans l’encodage et qui peuvent générer leurs propres données. D’autres encore possèdent tout simplement un bagage incroyable en mathématiques.

Les Capitals de Washington, eux, ont embauché un blogueur issu des milieux de la finance et du génie !

Les profils sont donc hétéroclites.

Bergevin, lui, a décidé cette saison de confier le développement et l’analyse de données statistiques à des membres du personnel qui étaient déjà en place. L’équipe préfère ne pas les identifier.

Il n’y a rien d’incongru dans la décision de confier ce mandat à l’interne, assure l’ex-dirigeant de la LNH à qui nous avons parlé.

UN MORCEAU DU CASSE-TÊTE

Bergevin a déjà comparé les statistiques avancées à des drones qui survolent un territoire de guerre. Elles effectuent un premier travail de reconnaissance, mais après leur survol, l’équipe a quand même besoin de troupes sur le terrain.

« On se sert de ces informations-là, mais ça n’empêche pas que je valorise beaucoup le regard de l’entraîneur. Un joueur qui triche pour ne pas bloquer de lancers, ça ne sera pas comptabilisé dans les statistiques, mais nous on le voit. »

Les statistiques avancées éclairent la haute direction, mais servent aussi à alimenter les entraîneurs.

À Montréal, toutefois, Michel Therrien dit en prendre et en laisser.

« Ça fait deux ans que je regarde ces statistiques-là avant les matchs, confie Therrien. Lesquelles ? Ça, c’est de la régie interne et je ne veux pas commencer à commenter.

« Pour moi, le feeling aussi est important : qui est dans son match, qui l’est moins… Ça, ça m’appartient et ça ne changera pas. »

— Michel Therrien

« Mais c’est juste un petit morceau du casse-tête. Je connais mes joueurs et je sais comment exploiter leur jeu pour avoir du succès. Ça fait partie de mes responsabilités. »

THERRIEN ET LE DUMP AND CHASE

Une étude présentée en 2013 par le chercheur Eric Tulsky à la conférence Sloan du MIT a permis de démontrer que les entrées en zone offensive en possession de la rondelle généraient deux fois plus de tentatives de lancers que celles résultant de rondelles envoyées en fond de territoire.

« C’est sûr ! », s’exclame Therrien, à qui plusieurs reprochent d’abuser du classique dump and chase.

« On veut entrer en contrôle de la rondelle et on fait des patrons de jeux pour essayer d’entrer en contrôle. Mais parfois tu ne peux pas, c’est impossible. Tu dois alors donner le crédit à l’autre équipe qui joue bien en zone neutre et qui ne te donne pas la ligne bleue.

« Ce n’est pas que je croie au dump and chase, assure Therrien. Mais si tu es dans une position où tu ne peux pas faire de jeu, il faut que tu acceptes ce que l’équipe te donne et jouer les pourcentages.

« Cela dit, on force nos joueurs et on essaie de faire des plans pour qu’ils restent en contrôle de la rondelle le plus possible. »

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