adam mahmoud

Le yogi
qui jouait avec le feu

Le bonheur est fait de petites choses. Toutes les deux semaines, nous vous présentons le portrait de gens inspirants qui ont su créer leur bonheur au quotidien.

« Tout ce que tu veux vraiment devenir dans la vie, tu peux le devenir. À 14 ans, j’ai voulu devenir un gangster. Et j’ai pu. »

Vingt ans plus tard, Adam Mahmoud est enseignant de yoga et danseur du feu. Il vit à Montréal depuis 2016, un choix lié à Rachel, sa femme, qui voulait suivre un cours de naturopathie au Québec.

Il est né à Pennard, un petit village du pays de Galles, au Royaume-Uni, bercé par la nature. Sa mère est galloise, son père, égyptien. À 7 ans, son père quitte la maison. Par la suite, Adam ne le verra plus que de temps à autre : une fois par année, une fois tous les deux ans.

« J’ai vécu une immense souffrance, dont je ne pouvais mesurer la portée. Adolescent, j’ai explosé. J’avais besoin de ressentir quelque chose de fort. J’ai commencé à faire du skateboard, à boire de l’alcool, à me façonner l’esprit à coups de gangsta rap. J’ai voulu essayer ce qui était extrême. Je n’avais pas l’impression que c’était mauvais, même si j’ai vu des amis mourir – un d’overdose, un autre dans un accident de moto.

« Ma colère était si grande – mon père était parti, ma mère travaillait tout le temps – qu’à ce moment, je ne cherchais rien d’autre. Me gaver d’adrénaline, voilà ce que je voulais. Ces expériences folles me faisaient sentir vivant. »

La claque est arrivée pendant un voyage au Cambodge, à l’âge de 21 ans.

« Jusqu’à ce moment, je n’avais jamais été en dehors de l’Europe. J’ai découvert une façon de voyager complètement nouvelle pour moi : sans musique, sans alcool, sans drogue. Dans l’inconfort. »

Ce voyage n’avait pas pour but de lui permettre de s’évader, mais de l’éveiller.

« Découvrir comment les gens vivent dans ce pays et voir les enfants de la rue, ça m’a bouleversé. Je me suis dit que j’étais en train de gâcher ma vie. J’ai réalisé que la même énergie que je consacrais à ma vie sans limites, je pouvais l’investir dans quelque chose qui avait du sens. Ce voyage a changé ma perspective de vie à jamais. »

La métamorphose, toutefois, n’a pas été immédiate ni spontanée.

Le deuxième voyage en Asie, en 2006, a été encore plus poignant.

« J’étais dans le nord de la Thaïlande quand j’ai reçu le courriel d’une amie, qui m’informait de la mort de mon père. Arrêt cardiaque. Sur le coup, je me suis dit que, pour moi, ça ne faisait aucune différence. Mon père n’existait plus dans ma vie, depuis longtemps.

« Mais les émotions, si on les refoule, se manifestent éventuellement.

« Quelques jours plus tard, j’étais victime d’une intoxication alimentaire. Durant mon isolement à l’hôpital, j’ai vu une scène qui m’a permis, enfin, de m’apaiser. Sur un lit près de moi, un homme vivait ses derniers moments. Un arrêt cardiaque, comme mon père. Autour du lit, toute sa famille l’assistait. D’instinct, j’ai pensé que mon père aussi, il avait eu une famille : une nouvelle femme et deux jumeaux. J’ai eu envie d’aller les voir, de les rencontrer. La vie m’a paru si fragile et précieuse. J’étais rendu à un point de non-retour. J’avais compris que pour aimer, pour être aimé, pour être heureux, je devais arrêter d’être polarisé sur ma personne, et commencer à donner.

« Aujourd’hui, par mon enseignement holistique du yoga et de la méditation, à mon tour j’aide les gens à trouver, dans leur vie, ce qui les rend heureux. »

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