Hockey  Le Canadien

Les yeux sur Ryan Poehling

ST. CLOUD, Minnesota — Mercredi, il y a eu un premier collègue de Montréal, de même que des membres de l’organe de presse du Canadien. Hier matin, La Presse l’a rencontré. Plus tard dans la journée, un autre journaliste montréalais était attendu, de même qu’une équipe de RDS.

Quelques jours plus tôt, ESPN et une station de télévision locale les avaient interviewés, ses deux frères et lui.

Si Ryan Poehling, le premier choix du Canadien au dernier repêchage, souhaitait avoir une idée de ce qui l’attend s’il atteint la LNH, c’est fait !

« J’ai été pas mal occupé cette semaine, reconnaît l’Américain de 18 ans, rencontré au Herb Brooks National Hockey Center, avant son match d’hier contre Minnesota-Duluth. J’ai eu un avant-goût de la présence médiatique au camp de développement l’été dernier, mais je sais que c’est encore plus fou que ça. Je suis prêt pour ça. »

Le Minnesota reculé

St. Cloud vit essentiellement pour son université. Partout dans cette ville de quelque 68 000 habitants, le logo des Huskies, largement inspiré de celui du Canadien de Montréal, est affiché. Dans les fenêtres des commerces, sur les oriflammes le long de la 5e Avenue. À une intersection majeure, en plus de la pancarte affichant le nom de la rue, une deuxième pancarte accrochée au feu de circulation indique que l’université est vers la gauche.

L’équipe de hockey est l’attraction numéro 1 de la ville, plus que les équipes de football et de basketball. Hier, une bonne partie des 5159 sièges de l’aréna étaient occupés. Mais pas tous. « C’est le début de la chasse au chevreuil », rappelle un employé de l’équipe.

C’est dans cet univers que Poehling se développe, tout en poursuivant ses études en commerce. Il partage une grande maison avec ses frères Nick et Jack, des jumeaux âgés de 21 ans qui font aussi partie de l’équipe de hockey, de même qu’avec trois autres colocs.

On ne sait pas si c’est la cohabitation à six, ou le simple fait qu’il a vieilli d’un an, mais jusqu’ici, la recette lui sourit. Il compte déjà 10 points en 6 matchs, après avoir été limité à seulement 13 points en 35 sorties l’an dernier.

Il faut toutefois comprendre que Poehling fêtera ses 19 ans le 3 janvier. Il était donc un des plus jeunes joueurs en NCAA l’an dernier. « Cette année, je me sens nettement plus à mon aise, sur la patinoire et à l’extérieur. Je suis arrivé ici à 17 ans, c’était nettement plus difficile. Débarquer dans un environnement avec des gars qui ont jusqu’à six ou sept ans de plus que toi, ça peut être drainant mentalement. »

Un « vrai » centre

Poehling vit encore ce déficit d’âge, même à sa deuxième année. Hier, par exemple, les quatre centres qu’il affrontait avaient 19, 22, 23 et 25 ans.

Ça ne l’a pas empêché d’assumer ses responsabilités habituelles : piloter un des deux premiers trios, tout en jouant au sein des premières unités d’avantage numérique et de désavantage numérique. Dans cette dernière facette, son coup de patin lui a permis de s’offrir une échappée en première période, en vain. Il s’est repris en marquant en deuxième période, tout juste après avoir touché le poteau, en plus d’obtenir une passe au dernier vingt.

« C’est un petit moteur, mais je dois faire attention à son utilisation, surtout quand on joue deux matchs en 24 heures », souligne son entraîneur-chef, Bob Motzko.

« N’oublions pas qu’il est encore en croissance. Quand il remplira son corps, il pourra prendre encore plus de minutes. »

— Bob Motzko, entraîneur-chef des Huskies

Sa progression en fait évidemment rêver plusieurs dans une ville qui espère encore et toujours un centre grand format, doué offensivement. Alex Galchenyuk détenait des atouts pour jouer ce rôle, mais il a finalement connu quelques complications. Ici, les gens sondés ont vanté unanimement son jeu dans les deux sens de la patinoire, digne d’un « vrai » centre.

Même si, sur papier, les choses se déroulent rondement pour Poehling, le jeune homme refuse de s’emporter.

« À Montréal, les partisans peuvent porter des jugements rapidement. Je dois réaliser que ça va bien en ce moment, mais si je traverse une léthargie dans deux mois, le discours à mon sujet va complètement changer. Je dois donc simplement continuer à faire ce que je fais de bien. »

Pas du long terme

Depuis Max Pacioretty en 2007, la grande majorité des espoirs du Canadien ayant passé par les universités américaines y ont écoulé leurs quatre années d’admissibilité. D’ailleurs, trois des joueurs repêchés en 2014 (Nikolas Koberstein, Hayden Hawkey et Jake Evans) jouent encore en NCAA cette saison. Les deux premiers pourraient même disputer une autre saison et faire le saut chez les professionnels en 2019.

Son entraîneur-chef est catégorique. « Je ne m’attends pas à ce qu’il passe ses quatre ans ici », lance Motzko.

« Il doit être prêt physiquement et il doit dominer offensivement à notre niveau. Il va finir par remplir ces deux critères, il pourrait le faire dès cette année, mais on ne le sait pas encore. »

— Bob Motzko

« Par contre, les partisans du Canadien ne seront peut-être pas heureux de savoir qu’il est très bon à l’école ! On sait que 75 % des joueurs qui partent après leur troisième année finissent par décrocher leur diplôme. Les proportions sont plus basses pour ceux qui partent avant cela. Mais la décision appartiendra à Ryan et à sa famille. »

« Le diplôme est important pour moi, mais la LNH a toujours été mon rêve, rétorque Poehling. Pas seulement de jouer, mais d’y faire carrière. Si l’équipe me demande de devenir pro, ce ne sera pas dur de dire oui, car l’école sera encore là après ma carrière. »

En attendant, Poehling pourrait avoir la chance de se faire voir sur une plus grande scène cet hiver, puisqu’il est dans la ligne de mire de l’équipe américaine pour le Championnat du monde junior. C’est justement Bob Motzko qui dirigera la formation. À suivre en décembre.

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