Opinion Universités

L’avenir passe par la coopération

Le rôle des administrations universitaires est de créer les meilleures conditions de réalisation de la recherche

Les universités sont souvent perçues comme étant en forte compétition entre elles au détriment de leur efficacité à rentabiliser les sommes importantes qui leur sont accordées par les gouvernements et donc par la société.

Il est vrai que le modèle de financement basé en grande partie sur le nombre d’étudiants inscrits est un incitatif à la course à la clientèle. Il faut cependant réaliser que la véritable concurrence universitaire doit se faire, et se fait généralement, entre chercheurs lors de leurs demandes de subventions auprès des fonds de recherche gouvernementaux et des contrats de recherche provenant du secteur privé. Les critères de décisions sont alors la pertinence et la qualité des projets soumis et l’excellence et la compétence des chercheurs proposant de les réaliser. Cela est souhaitable et doit continuer d’être la base de l’attribution des financements individuels ou par équipes de la recherche.

Le rôle des administrations universitaires est tout au contraire de favoriser la collaboration entre établissements plutôt que d’entrer en compétition, afin de créer les meilleures conditions de réalisation de la recherche, maximisant ainsi les retombées des financements publics et privés. Les universités pourront alors réaliser leurs missions essentielles, que sont la formation de personnes hautement qualifiées et la recherche de nouvelles connaissances et contribuer à un meilleur développement socioéconomique du pays et un bien-être accru de ses populations.

Le partenariat entre universités est essentiel à l’optimisation des ressources consacrées qui leur sont consenties, particulièrement en période économique précaire.

Ainsi les gouvernements, mais aussi les directions universitaires, doivent encourager et soutenir les regroupements de chercheurs, permettant une approche multidisciplinaire riche, s’appuyant sur les meilleures compétences, quelle que soit leur appartenance institutionnelle. L’époque des chasses gardées et de la concentration de l’excellence dans quelques universités prestigieuses est révolue. L’avenir de la recherche réside dans la valorisation de réseaux de chercheurs excellents et complémentaires ayant des objectifs de recherche bien sûr pertinents pour les besoins à court terme de la société, mais également en préparation de ce que seront nos défis de l’avenir.

Plusieurs mesures ont été mises en place par les gouvernements provinciaux et fédéral afin de favoriser la collaboration entre chercheurs et le partenariat avec l’entreprise privée et les autres milieux utilisateurs des nouvelles connaissances produites. Le Québec a été à l’avant-garde à cet égard en favorisant, par des financements significatifs, la création de larges consortiums de recherche dans des secteurs clés de son économie. Cela a créé des retombées majeures et des partenariats durables. Le gouvernement fédéral encourage également efficacement les partenariats par différents programmes obligeant le cofinancement des projets de recherche.

Bien que ces mesures aient fait leurs preuves ici et ailleurs dans le monde, il y a une approche, peu exploitée jusqu’à présent au Canada, qui pourrait améliorer les retombées des partenariats de recherche universitaires et industriels. Il s’agit du développement de campus mixtes regroupant en un même lieu plusieurs universités, centres de recherche gouvernementaux et cellules de recherche et développement d’industries ciblant un même domaine thématique. Cette approche, qui se distingue de celle des campus satellites souvent décriés, change drastiquement les paradigmes classiques des universités. Quoique les chercheurs demeurent attachés administrativement à leur institution, ils sont en réalité dans un environnement leur permettant des échanges quotidiens avec leurs collègues, universitaires ou industriels, d’une même discipline ou de disciplines complémentaires, tous dédiés aux mêmes enjeux.

Les avantages de cette proximité physique des partenaires de recherche sont multiples. La première est la possibilité de la mise en place de grandes plateformes d’équipements scientifiques très performants plus facilement accessibles. Le Canada a investi des sommes considérables au cours des dernières années par ses programmes de la Fondation canadienne pour l’innovation (FCI) et continuera à le faire au cours des prochaines années, la mutualisation plus facile de ces grandes infrastructures serait un gain important pour l’optimisation de la recherche canadienne et son transfert à l’industrie. L’accès facilité pour les chercheurs industriels à des équipements scientifiques parmi les meilleurs au monde et difficilement accessibles est un avantage certain pour la recherche appliquée et ses retombées pour le développement économique du pays. La mise en place récente du programme The Canada First Research Excellence Fund serait également optimisée par de tels consortiums.

La seconde retombée positive serait la formation améliorée des étudiants, particulièrement de la maîtrise et du doctorat. La possibilité accrue de codirections interuniversitaires, d’interfaces avec le milieu industriel plus faciles et leur accès à des parcs technologiques très performants, n’en sont que quelques exemples. L’appui des gouvernements à de telles approches innovantes est à privilégier au cours des prochaines années.

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