Éducation

L’enseignant plus efficace que le virtuel

Apprendre dans un univers virtuel ou avec un enseignant qui donne un cours magistral ? Si, pour des jeunes, le choix peut paraître évident, il semble que les enseignants peuvent souffler un peu : c’est encore avec un enseignement traditionnel que les élèves retiennent le mieux la matière, révèle une recherche de l’Université de Montréal.

Professeur à la faculté des sciences de l’éducation de l’Université de Montréal, Marc-André Éthier s’intéresse aux manuels d’histoire utilisés en enseignement, mais constatait comme d’autres que les supports numériques gagnaient du terrain en classe. Il a entrepris de tester l’efficacité sur le terrain du « mode découverte » du jeu Assassin’s Creed Origins, qu’Ubisoft lancera sous peu et qui permet d’acquérir des notions d’histoire. « Est-ce qu’il y a un avantage à se servir de ce bidule ou il n’y en a pas ? Il y a parfois beaucoup de poudre aux yeux dans ce domaine », dit le chercheur.

Comme 279 autres élèves l’ont fait dans les derniers mois, quelques élèves de troisième secondaire du Collège Brébeuf se sont prêtés au test du chercheur, mardi. Dans une classe, l’enseignant d’histoire Jean-Pascal Tremblay leur a transmis des informations sur la bibliothèque d’Alexandrie en utilisant une méthode d’enseignement traditionnelle, accompagnée d’un document PowerPoint classique. Un cours magistral comme les élèves les connaissent.

Pendant ce temps, écouteurs vissés sur les oreilles, leurs collègues faisaient évoluer un personnage dans un univers virtuel qui recrée la fameuse bibliothèque de l’Antiquité. C’est là que les informations sur l’Égypte ancienne leur ont été transmises. « C’était plus amusant qu’un cours traditionnel, il y avait beaucoup plus de liberté, on pouvait choisir quoi voir en premier », a dit Samuel Zuquim, 13 ans.

Avant de suivre le cours ou de déambuler dans l’univers virtuel, les élèves ont eu à faire un test. Dans les deux cas, le résultat moyen était de 22 %. C’est après avoir été exposés à la matière que la donne change. Le groupe expérimental, qui a appris avec les consoles de jeu, obtient en moyenne 44 % aux tests, tandis que le groupe qui a appris avec l’enseignant obtient 53 %. « Le professeur est encore meilleur. Comme ancien enseignant du secondaire, je suis content », dit Marc-André Éthier, qui admet ne jamais avoir été friand de jeux vidéo.

Le chercheur dit avoir été étonné des résultats, puisqu’il ne s’attendait pas à voir les jeunes retenir quoi que ce soit de cette incursion dans le virtuel. « Ça a donné quelque chose. On peut se dire que quelqu’un qui est chez soi peut apprendre, et un prof qui s’en sert peut certainement faire mieux. C’est une suite de l’enquête que je veux mener », explique Marc-André Éthier, qui dit ne pas avoir été payé par Ubisoft pour réaliser cette recherche. Un enseignant pourrait par exemple guider les élèves pour leur montrer ce qui est particulièrement d’intérêt dans un univers virtuel.

Ce « mode découverte » sera lancé la semaine prochaine par le producteur de jeux vidéo, et ceux qui ont déjà acheté le jeu Assassin’s Creed Origins y auront accès gratuitement. Pour les autres, il faudra débourser une vingtaine de dollars. Ubisoft compte-t-il investir le monde de l’éducation ? « Ça pourrait être qualifié de projet-pilote, dit Yannis Mallat, PDG d’Ubisoft Montréal. C’est vraiment embryonnaire et on a hâte de voir les résultats. On constate qu’il y a énormément d’intérêt de la part des étudiants et du corps professoral. »

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