Accès au mont Royal

Le « chemin de plaisance » prend forme

La Ville de Montréal a adopté hier un plan de mesures transitoires afin de réduire la circulation de transit et, donc, la place de l’automobile sur le mont Royal, ainsi que pour assurer la sécurité de tous les usagers qui empruntent l’axe Camillien-Houde–Remembrance. Les réaménagements seront en place dès la mi-juin.

Bollards, dos d’âne et compagnie

Au centre de la chaussée seront installés 460 bollards sur 1,8 km, jusqu’au sommet de la montagne. Cette série de poteaux cylindriques rendra impossibles les passages de véhicules d’une voie à l’autre ainsi que les demi-tours. Dans le col, la Ville implantera un sens unique en alternance avec des feux de circulation. Les accotements seront élargis pour les cyclistes et les marcheurs. Par conséquent, les voies de circulation automobile seront réduites au strict minimum (3,2 m de large plutôt que 3,8 m). À la sortie de la voie Camillien-Houde, l’avenue du Mont-Royal ne comptera qu’une seule voie afin d’apaiser la circulation dans le secteur. Des dos d’âne seront installés, ainsi qu’un nouvel afficheur de vitesse.

Finie l’autoroute Camillien-Houde

Ce plan constitue une première étape vers la transformation de la voie Camillien-Houde en « chemin de plaisance apaisant et sécuritaire », a répété hier la mairesse Valérie Plante. L’administration signe la fin du statu quo. « Le raccourci et l’autoroute, on veut mettre ça de côté », a-t-elle indiqué, reconnaissant que les mesures exigeraient une adaptation. Aucune échéance n’est prévue pour les mesures permanentes, car ces travaux vont nécessiter une plus grande analyse à cause de « la géométrie », qui varie beaucoup tout le long du parcours. Cela exige également un travail avec les différents partenaires concernés par le dossier, dont les dirigeants des cimetières et Les amis de la montagne, a indiqué Mme Plante. « On va se donner le temps », a-t-elle ajouté.

Manœuvres dangereuses

Lors de son passage hier sur la voie Camillien-Houde, La Presse a pu constater que des automobilistes se lançaient dans des manœuvres qui pourraient être fatales. À la hauteur du belvédère, un terre-plein d’une vingtaine de mètres empêche les automobilistes venant de l’est de tourner vers le stationnement, ou, du moins, est censé les en empêcher. En fait, il n’est pas rare, selon la densité du trafic et l’heure, de voir des automobilistes emprunter à contresens la voie de gauche sur une dizaine de mètres avant de tourner vers le stationnement du belvédère. Or, de nombreux cyclistes arrivent de l’ouest à toute vitesse à la sortie du virage précédant le point de vue.

La sécurité d’abord

Pour Valérie Plante, il n’y aura aucun compromis sur la sécurité. « On s’est engagés à agir rapidement. C’est ce que nous faisons », a-t-elle déclaré lors de la portion publique de la réunion hebdomadaire du comité exécutif. La mairesse a souligné qu’il ne fallait pas « lésiner » sur les moyens pour sécuriser l’accès au mont Royal et « faire de Camillien-Houde un vrai chemin de parc ». Étant données les mesures proposées, la Ville a décidé de maintenir la limite de vitesse à 40 km/heure. L’effet des mesures sera suivi de près, ce qui permettra « de s’ajuster et constamment s’améliorer » en fonction des résultats qu’on aura, a indiqué Éric Alan Caldwell, responsable politique de l’urbanisme et de la mobilité au comité exécutif.

La vision d’avenir

L’administration Plante se plie aux recommandations de l’Office de consultation publique de Montréal (OCPM), qui a proposé de revenir à la vision de Frederick Law Olmstead, à l’origine de la conception du parc du Mont-Royal. Cette vision « se caractérisait par deux traits majeurs : une œuvre d’art globale et démocratique qui permet aux citadins de se ressourcer au contact de la nature », souligne-t-on dans les documents de la Ville. Quatre enjeux seront pris en compte : « réévaluer la place de l’automobile » et faciliter les transports collectifs ; assurer l’accès universel ; remanier « le partage de la route au profit des piétons et des cyclistes » ; « mettre en valeur les qualités patrimoniales du parc ».

Le projet pilote

Six mois après son arrivée au pouvoir en 2017, l’administration Plante a adopté un projet pilote interdisant toute circulation de transit automobile sur le mont Royal, réagissant ainsi à la mort du jeune cycliste Clément Ouimet. La décision politique avait toutefois suscité de nombreuses critiques et polarisé le débat parce qu’elle n’était appuyée sur aucune concertation préalable. L’OCPM a alors reçu le mandat d’évaluer le projet pilote et d’établir une vision d’avenir. L’exercice a démontré que le choix de l’administration n’avait pas amélioré la cohabitation entre automobilistes, cyclistes et marcheurs. Surtout, il a montré qu’il s’agissait d’une expérience précipitée et dont les objectifs étaient flous.

« On a perdu un an »

Le chef de l’opposition officielle à l’hôtel de ville, Lionel Perez, estime que « les élus de Projet Montréal vont de l’avant avec ce plan malgré eux », la preuve étant la démission de Luc Ferrandez, qui était responsable du mont Royal. M. Perez reconnaît que « ces mesures concrètes vont réduire la vitesse et augmenter le sentiment de sécurité auprès des cyclistes et des piétons ». « On trouve toutefois dommage qu’il ait fallu attendre un an avant de mettre en place ces mesures. On a perdu un an à cause de l’acharnement de Projet Montréal », a-t-il commenté, avant d’ajouter que plusieurs des mesures étaient au cœur de la proposition de son propre parti, Ensemble Montréal.

— Avec la collaboration de Manon Louvet, La Presse

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