L'Impact

Oyongo montre la voie

Si les chaussures reflètent vraiment la personnalité de leur propriétaire, il est très facile de différencier les tempéraments d’Ambroise Oyongo, défenseur de l’Impact, et de Jacques Haman, attaquant du FC Montréal (USL).

Le premier porte parfois des souliers dont une partie de la semelle est éclairée par des ampoules DEL, alors que le second est plus traditionnel avec ses chaussures noires. Cette perception se confirme en entrevue, puisque Oyongo est du genre à développer ses réponses, tandis qu’Haman va droit au but en élaguant le superflu.

Mais puisque les contraires s’attirent et se complètent, les deux Camerounais sont inséparables depuis qu’ils se sont côtoyés pendant trois saisons au Coton Sport FC de Garoua. Leurs routes se sont certes séparées au gré de transferts ou d’essais en Europe, au Moyen-Orient ou en Amérique du Nord, mais l’amitié a résisté.

Quand Haman, 21 ans, a entendu parler d’une possibilité de venir à Montréal, il a rapidement sondé son aîné. « Il m’a dit que c’est un bon club et que je devais venir, raconte-t-il. Mon manager m’a ensuite dit que je devais faire un essai. C’est ce que j’ai fait, et puis j’ai réussi. Je suis content d’être ici. Tu sais, avec Ambroise, on est des amis depuis longtemps. »

Au moment de poser ses crampons à Montréal, cet été, Haman a donc logiquement pris le chemin du quartier Hochelaga-Maisonneuve, à quelques rues du stade Saputo, afin de cohabiter avec son ami. Le saut dans l’inconnu aurait pu être difficile pour Haman, mais le soutien d’Oyongo a facilité la transition. Le défenseur de 24 ans insiste sur l’importance de transmettre son expérience à son éternel ami et nouveau colocataire.

« Je l’ai pris direct, confirme ce dernier. Si tu as quelqu’un qui est là et que tu peux aider, il faut le faire. On vient du même pays et ce n’est pas facile, l’intégration. Je veux aussi lui montrer certains trucs dans le travail, le comportement, les choses à faire et ne pas faire. C’est bon de montrer ça à mes frères, aux plus jeunes. Quand je ne serai pas là, demain, et qu’ils auront ce même travail, ils pourront le faire dans de très bonnes conditions. »

« SE DÉTENDRE UN PEU »

Malgré un imbroglio qui a retardé son arrivée, Oyongo, à la personnalité enjouée, s’est rapidement intégré dans le vestiaire montréalais et a mis le public de son côté. Selon différents intervenants du FC Montréal, Haman a mis un peu plus de temps avant de sortir de sa coquille. Lors du dernier déplacement de la saison à Toronto, il ne s’est toutefois pas gêné pour participer à un bref concours de danse dans l’autobus.

Au quotidien, les deux Camerounais affichent la même attitude, avec un Oyongo qui sert de locomotive pour tirer son cadet dans les activités sociales.

« Dès que j’ai fini les entraînements, je vais à la maison. C’est Ambroise qui dit qu’on part se balader parce que moi, je n’aime pas beaucoup sortir. Je veux seulement penser au foot. »

— Jacques Haman

« Il faut un peu qu’il se détende et qu’il ne reste pas tout le temps à la maison, réplique le latéral droit. Il faut qu’il découvre la ville, qu’il parle avec les gens et fasse des rencontres. Quand tu restes chez toi, tu penses toujours à la même chose, et il faut se changer les idées dans la vie. »

UNE GRANDE PASSION

La vie du tandem s’organise largement autour du soccer. Ils le pratiquent professionnellement, en discutent très souvent et le regardent à la télévision. Si Oyongo a une tendresse particulière pour Manchester United, Haman rêve d’Espagne, voire de France, où il dit aimer l’AS Monaco et le RC Lens.

Sortis du cadre sportif, les deux compères sont toutefois comme n’importe quels jeunes hommes dans la vingtaine. Ils regardent des films, parcourent la ville et doivent se répartir les tâches domestiques. Alors, qui met le plus la main à la pâte dans ce domaine ?

« Parfois, il veut tout faire parce qu’il se dit qu’il est plus jeune, répond Oyongo. Mais comme il s’entraîne plus tôt et qu’il revient avant moi, c’est lui qui fait à manger. On alterne bien et il n’y a personne qui en fait vraiment plus. Tout le monde participe. C’est bien. On est tranquilles à la maison, on bavarde et on discute de foot. »

UN TROISIÈME CAMEROUNAIS

La colonie camerounaise s’est agrandie, à la fin du mois d’août, avec l’embauche du milieu de terrain de 18 ans Fabrice Mbvouvouma. S’il a rejoint le FC Montréal pour les derniers matchs de la saison, il évoluera maintenant avec l’équipe des moins de 18 ans dans la United States Soccer Development Academy (USSDA).

À Montréal, ce rapide milieu de terrain s’est très vite rapproché – physiquement et émotionnellement – d’Oyongo, qu’il connaissait déjà, et d’Haman.

« Ça m’a vraiment aidé parce qu’avec eux, j’ai su que j’étais avec mes frères. Ça me motive plus. »

— Fabrice Mbvouvouma

Le timide Mbvouvouma habite, en compagnie de Fabio Morelli, à quelques minutes de ses compatriotes.

Verra-t-on d’autres joueurs camerounais à l’avenir, avec l’Impact ou le FC Montréal ou dans les rangs de l’Académie ? Haman reconnaît que la perspective d’évoluer en Amérique du Nord séduit certains amis, au Cameroun, même si le rêve ultime est de jouer en Europe.

« Il y en a beaucoup qui m’appellent et qui veulent venir ici. Je leur réponds que je ne suis pas le coach et qu’il faut appeler le manager », rigole-t-il.

« Nous qui sommes arrivés avant avons essayé de bien faire pour pouvoir ouvrir le chemin à nos frères. Et si ça se passe bien, ça sera positif pour les Camerounais, mais aussi pour tous les Africains », conclut Oyongo, toujours prêt à montrer la voie.

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