ÉDITORIAL HOMMAGE POSTHUME

Pour le parc Jacques-Parizeau

Jacques Parizeau mérite un lieu à son nom à Outremont, pas une petite controverse toponymique.

Malgré les apparences, le choix du parc de Vimy est idéal. Certes, l’endroit ne portera plus le nom de cette bataille iconique de la Première Guerre mondiale, où près de 3600 Canadiens sont morts. Des critiques ont ainsi voulu en faire un symbole de notre amnésie collective et de l’arbitraire politique en toponymie. Or, bien que ces deux problèmes existent de façon générale, Outremont en constitue le contre-exemple.

Remettons d’abord la décision en contexte. Le Québec a déjà célébré le rôle de bâtisseur de M. Parizeau, en nommant en son honneur l’édifice de la Caisse de dépôt et placement. L’hommage d’Outremont est quant à lui local.

L’arrondissement a voulu commémorer un ancien résidant premier ministre, comme il l’avait fait avec Pierre Elliott Trudeau (un parc) et Robert Bourassa (une bibliothèque). La société d’histoire locale a donc été consultée.

Un lieu se démarquait : le petit parc de Vimy, devant lequel M. Parizeau a habité pendant près de quatre décennies.

C’est là qu’il aimait marcher et c’est aussi là que se trouve une stèle pour sa première femme. Il a voulu que ses funérailles se déroulent juste à côté, à l’église Saint-Germain.

Cela ne fait pas disparaître « de Vimy » d’Outremont. La rue du même nom demeure. D’ailleurs, le parc n’avait jamais été officiellement baptisé ; il portait ce nom par défaut, à cause de la rue qui le borde. On n’enlève que le doublon. Et on le fait par respect de l’histoire.

En effet, Outremont compte une poignée de parcs et moins de 80 rues. Puisqu’il manque de choix pour réviser la toponymie sans effacer le passé, l’arrondissement se tourne d’abord vers les doublons. Il l’a fait deux fois dans les dernières années en débaptisant les parcs Dunlop et Stanislas, des patronymes déjà présents ailleurs.

Malgré tout, la décision a choqué dans le Canada, à cause de l’antipathie envers M. Parizeau l’indépendantiste. D’autres y ont vu le symptôme d’un manque de respect pour l’histoire militaire et les victimes de la grande boucherie que fut la Première Guerre mondiale. Ironiquement, ces grognons ont eux-mêmes oublié que cette mémoire est bien présente à Outremont. On y trouve quatre rues nommées en l’honneur de batailles : de Vimy, Courcelette, Cambrai et Péronne. Sans oublier le cénotaphe, inauguré dès les années 20, et où le jour du Souvenir est encore célébré chaque année.

Le maire Coderre a eu raison de ne pas céder devant la petite machine à indignation. Il dit maintenant chercher un lieu pour commémorer le 100e anniversaire de la bataille de Vimy, en avril prochain.

D’ici là, qu’on inaugure le parc Jacques-Parizeau, là où l’ancien premier ministre cherchait la paix. Et qu’on permette à sa famille aussi de la retrouver.

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