On aura beau imaginer un nouveau modèle d’affaires pour les médias, si les jeunes ne sont pas au rendez-vous, c’est peine perdue.
C’est le constat d’une journée de réflexion sur les mutations dans le monde de l’information.
Cet exercice organisé par le Centre d’études sur les médias de l’Université Laval répondait à un souhait du ministère de la Culture et des Communications. Ce dernier a besoin d’un portrait de la situation pour orienter l’adoption de mesures concrètes pour aider les médias au Québec.
Le défi actuel que doivent relever les médias est simple : renouveler l’auditoire. Le public traditionnel vieillit et les jeunes ne se comportent absolument pas comme leurs aînés. Ils passent beaucoup plus de temps sur le web et les appareils mobiles.
Il faut donc leur proposer des contenus qui les intéressent et, surtout, aller les chercher là où ils sont.
Mais où sont les jeunes ? Comme l’a dit de manière colorée Claude Poulin, copropriétaire du réseau de sites web d’information régionale Néomédia, « on a mis des tablettes dans les mains de nos enfants pour qu’ils se tiennent tranquilles dans la voiture en route vers Old Orchard. Maintenant, ils ne vont pas les lâcher ».
En d’autres mots, les jeunes ne consomment plus les contenus, y compris l’information, de la même manière que leurs parents. « Avant, je disais à mes clients : pense mobile en premier », lance Luc-André Cormier, vice-président média et contenus chez Cossette.
« Aujourd’hui, je leur dis : pense seulement mobile. C’est ça la nouvelle réalité. »
— Luc-André Cormier, vice-président média et contenus chez Cossette
Pour les journaux papier, le défi est encore plus grand. Le modèle du journal lancé sur le balcon n’a plus de sens. « En connaissez-vous beaucoup d’entreprises qui livrent leur produit à la porte ? a demandé l’éditeur du , John Cruickshank. Je paie mon petit paquet de café 16 $ et personne ne me le livre. Pourquoi alors livre-t-on un journal qui coûte 1 $ ? »
À l’heure actuelle, le portrait mondial ressemble à peu près à ceci, selon Patrick Pierra, éditeur du magazine spécialisé : environ un milliard de personnes sur la planète utilisent une tablette, deux milliards, un téléphone, et trois milliards ont accès à l’internet. La rapidité avec laquelle s’est imposée la tablette a soufflé tous les observateurs. Selon Patrick Pierra, qui siège aussi au conseil d’administration du , la tablette est LE meilleur moyen pour consommer l’information. Et l’application est la meilleure sur le marché. « C’est Noël tous les jours quand on l’ouvre », a-t-il lancé, ajoutant qu’il ne voyait pas comment le quotidien allait pouvoir continuer au même rythme avec autant de ressources, sans faire plus de place aux contenus commandités, la formule à la mode ces jours-ci dans le monde de la publicité. Cette approche publicitaire est toutefois loin de plaire aux journalistes, qui la voient comme une menace potentielle à leur intégrité professionnelle.
Les nombreux éloges adressés à ont eu l’heur de plaire à l’éditeur du qui vient d’acquérir l’application. M. Cruickshank ne s’en cache pas : les attentes sont très élevées au quotidien torontois.
Sauf que le n’adoptera pas la même stratégie que qui veut faire migrer ses lecteurs du papier vers la tablette. Au , on veut conserver les lecteurs papier et développer un nouvel auditoire.
Comment ? L’éditeur est assez catégorique : « Les baby-boomers ont déterminé l’ordre du jour pendant des années en information, il est temps qu’ils laissent leur place aux plus jeunes. Il ne faut plus penser nouvelles, mais auditoire. Quand je parle à mes journalistes, je leur dis : ne me dites pas quelle est la nouvelle, dites-moi comment vous allez la raconter. »
Voilà pour les constats.
En ce qui a trait aux solutions, c’est moins clair. Tout le monde s’entend pour dire que nous sommes actuellement dans une sorte d’âge d’or : tout le monde explore de nouvelles avenues, l’heure est à la créativité.
À ICI Radio-Canada, par exemple, on a compris qu’il fallait penser multiplateforme, et Luce Julien, première directrice Nouvelles multiplateformes et Info numérique, a expliqué que la société d’État se collait désormais aux nouvelles habitudes d’écoute. « On peut sortir un reportage exclusif sur le site web à midi plutôt qu’en soirée, car c’est à ce moment que les gens consultent notre site web », a-t-elle expliqué. Une approche qui ne se fait pas sans heurt à l’interne, a-t-elle précisé.
De son côté, mise sur sa nouvelle édition tablette offerte en soirée, à un moment de la journée où les gens passent plus de temps sur leur tablette. Les quotidiens du groupe Postmedia ont également développé des contenus adaptés à chacune de leurs plateformes.
Enfin, en région, Néomédia mise sur le contenu hyperlocal, et ça marche, nous dit-on.
Ironiquement, bien que les jeunes soient au cœur de la réflexion de tous les médias, aucun n’avait été invité à prendre la parole, vendredi. La moyenne d’âge des panélistes était supérieure à 45 ans. Dommage.
D'autres coupes chez Postmedia
La hache est encore tombée chez Postmedia, qui poursuit ses efforts de centralisation afin de réduire ses dépenses ainsi qu’une dette de plus de 480 millions de dollars. Rappelons que l’entreprise attend le feu vert du Bureau de la concurrence pour finaliser l’acquisition des journaux de la chaîne Sun. Cette fois, les coupes annoncées ont lieu à , au et au . Les employés de ont jusqu’au 19 février pour se prévaloir d’un programme de départ volontaire. La rédaction des articles destinés à l’ensemble des journaux Postmedia sera centralisée au navire amiral, le .
Les sports autrement
Fruit d’une collaboration entre RDS et , Balle courbe propose un regard décalé sur l’univers des sports. Si vous êtes amateur de statistiques sportives et de textes commentés sur la dernière performance du Canadien, ce n’est pas pour vous. Par contre, si vous êtes amateur d’Urbania et du ton un peu décalé en vogue aujourd’hui, vous aimerez sans doute ce site lancé il y a quelques semaines. On y retrouve des listes, des des textes et des analyses humoristiques, un peu à la manière de Buzzfeed. Il y a aussi un vague air de famille avec Sportnographe. À la barre du site, Valérie Duhaime, qui a fait ses premières armes à . À découvrir.
