Mon clin d’œil

« L’intégrité, c’est louche. » 

— L’UPAC

Opinion

L'UPAC et l'Assemblée nationale

L’indépendance du commissaire de l’UPAC n’est pas tributaire de sa nomination par l’Assemblée nationale

La comparution du commissaire à la lutte à la corruption devant la Commission des institutions lors de l’étude du projet de loi 107 la semaine dernière est l’occasion de rappeler certains principes fondamentaux de notre système juridique. L’un de ces principes est celui de la séparation des pouvoirs. 

Montesquieu écrivait que la forme de gouvernement qui respecte la liberté des citoyens est celle dans laquelle les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire ne sont pas concentrés entre les mains des mêmes personnes ou organes. Un autre principe fondamental est celui de l’équité du procès.

Dans notre système de justice pénale, les enquêtes sur la commission de crimes sont menées par les corps de police ; les poursuites pénales ou criminelles sont intentées par le directeur des poursuites pénales et criminelles (DPCP) ; et la culpabilité ou l’innocence des personnes accusées d’une infraction est décidée par des juges indépendants. 

Ces trois fonctions (enquête, poursuite et jugement) doivent être exercées à l’abri des influences ou pressions de toute nature.

Or, les partis de l’opposition réclament que la nomination du commissaire à la lutte contre la corruption soit approuvée par un vote des 2/3 de l’Assemblée nationale, qui est la seule façon, selon eux, d’assurer l’indépendance de celui-ci à l’égard du gouvernement.

Bien que visiblement justifiée par des impératifs politiques, cette posture des partis de l’opposition se situe en porte-à-faux avec les principes fondamentaux énoncés plus haut. Le rôle du commissaire à la lutte contre la corruption ou du DPCP est en effet entièrement différent de celui joué, par exemple, par le vérificateur général, le commissaire au lobbyisme ou le protecteur du citoyen. Le choix des titulaires de ces postes doit être approuvé par les 2/3 de l’Assemblée nationale parce que ceux-ci exercent un pouvoir de surveillance et de contrôle du gouvernement pour le compte de l’Assemblée nationale. Contrairement aux corps de police ou au DPCP, ces personnes ne sont pas des acteurs du système judiciaire.

Dans son rapport, la commission Charbonneau recommande de réformer le mode de nomination et de destitution du commissaire afin qu’il soit analogue à celui du DPCP. Cette recommandation est mise en œuvre par le projet de loi 107, lequel prévoit la nomination du commissaire par le gouvernement sur recommandation d’un comité de sélection. Ce comité de sélection doit choisir les candidats jugés aptes en fonction de critères axés sur la compétence. Le mandat du commissaire sera d’une durée de sept ans non renouvelable. Le projet de loi 107 prévoit également le mode de destitution du commissaire qui ne pourra survenir que sur rapport de la Commission de la fonction publique.

Ajoutons que les exigences d’indépendance, de spécialisation et d’autonomie mises en place par le projet de loi 107 correspondent aux caractéristiques que doivent posséder les organes de lutte contre la corruption selon la Convention des Nations unies contre la corruption. Ces organes doivent avoir l’indépendance nécessaire selon la Convention des Nations unies « pour pouvoir exercer leurs fonctions efficacement et à l’abri de toute influence indue », que celle-ci vienne du milieu politique ou de toute autre source.

Il en va de la crédibilité d’une institution qui doit demeurer à l’abri des considérations partisanes.

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