Commerce de détail

Bœuf et brocoli chez Pharmaprix

Besoin de citrons, de laitue, de saucisses, de pâtes fraîches ? Il est désormais possible de choisir entre l’épicerie et le Pharmaprix pour acheter ses aliments frais. Loblaw, qui a mis la main sur la chaîne de pharmacies il y a cinq ans et qui teste la formule ailleurs au pays depuis trois ans, amène la Zone Marché au Québec.

Ce n’était qu’une question de temps, diront certains, avant que l’on puisse faire son épicerie au grand complet chez Pharmaprix. Car dès le départ, il était clair que Loblaw voulait profiter de l’acquisition de Shoppers Drug Mart (Pharmaprix au Québec) pour y vendre des aliments.

D’ailleurs, on peut déjà se procurer du lait, du fromage, des biscuits, des confitures, de la farine, de la pizza congelée et même du bacon dans la majorité des 180 Pharmaprix.

La prochaine étape était de tester l’intérêt des Québécois pour les fruits et légumes, la viande, les fromages fins et le prêt-à-manger vendus… à côté des médicaments et des couches. Ce test commence maintenant.

La nouvelle Zone Marché propose un assortiment de 250 à 750 aliments frais selon la taille de la pharmacie et son environnement concurrentiel.

Le concept – qui requiert entre 800 et 2500 pieds carrés – a été intégré à trois Pharmaprix ces derniers jours. Huit autres suivront d’ici décembre. Tous se trouvent dans des milieux « urbains à forte densité » dans l’île de Montréal ou sur la Rive-Sud, les études menées en Ontario ayant démontré un engouement moindre en banlieue.

Pour aménager ce nouvel espace, les rayons de l’électronique et de la photo, de moins en moins populaires, ont été réduits.

Le défi de s’adapter au Québec

Les premières Zone Marché permettront à Loblaw d’ajuster l’offre en fonction des goûts des consommateurs. Mais on jure avoir déjà fait tous les efforts pour s’adapter.

« On n’était pas à l’aise de transférer l’offre ontarienne sans considérer les goûts des Québécois », a dit à La Presse Éric Bouchard, vice-président principal de Pharmaprix, en visitant une pharmacie de la rue Ontario Est qui proposait même des dégustations hier matin.

Résultat, des fromages Perron, des tomates Savoura, des fraises de l’île d’Orléans, des mets Plaisirs Gastronomiques, de l’hummus Fontaine Santé, des saucisses Lafleur et des pâtes fraîches O’Sole Mio garnissent les étalages qui comptent aussi plusieurs produits PC. De toute évidence, Loblaw ne veut pas refaire les mêmes erreurs qu’après l’achat de Provigo.

« L’adaptation au Québec, c’est très important. Mais j’imagine qu’ils ont appris », lance Sylvain Charlebois, expert en distribution et politiques agroalimentaires à la faculté de management de l’Université Dalhousie.

Pour avoir du succès à vendre des concombres et des oranges, Pharmaprix devra néanmoins faire « ses devoirs », prévient le professeur. « Ailleurs au Canada, l’offre de fruits et légumes est ordinaire. Au Québec, le marché est plus sophistiqué, l’expérientiel est plus important. Le design aussi. […] C’est un art, vendre des fruits et légumes ! »

Prix « concurrentiels » et points Optimum

En ce qui concerne les prix, Pharmaprix affirme qu’ils seront « comparables à Provigo, mais pas plus chers ». Pour la première semaine, on est clairement en phase séduction avec des fraises et des framboises locales à 1,99 $, des bananes à 0,56 $ la livre et des côtes levées Plaisirs Gastronomiques à 9,99 $ pour 600 grammes.

Même les prix courants sont raisonnables, du moins pour le moment. Les bagels St-Viateur, par exemple, sont vendus 3,99 $ le paquet de six, ce qui se compare à 5,69 $ sur IGA.net et 5,08 $ sur Metro.ca. Le produit n’apparaît pas sur les sites de Provigo et Maxi.

En outre, les détenteurs de la carte PC Optimum pourront obtenir des points sur tous leurs achats de nourriture, ce qui n’est pas le cas chez Provigo et Maxi où des points ne sont offerts que sur certains produits qui varient de semaine en semaine.

« Loblaw a le volume pour faire ça. C’est le plus gros acheteur d’aliments du Canada. Et les marges en fruits et légumes sont très élevées, alors il reste de la place », commente le professeur Charlebois.

Hausse des ventes

Comme il se doit, l’objectif de Loblaw est d’accroître à la fois l’achalandage dans les Pharmaprix et la valeur du panier moyen.

Ailleurs au pays, dans les 92 Shoppers Drug Mart (sur 1100) ayant intégré une Zone Marché (appelée Food You’ll Love, en anglais), « on a vraiment observé une hausse des ventes dans le reste du magasin lors de l’implantation », dit Éric Bouchard, sans toutefois révéler de chiffres.

« On vise la personne qui vient s’acheter un médicament et qui se prend quelque chose en passant pour son souper et qui, autrement, se serait juste organisée sans. » La cannibalisation n’est donc pas un enjeu, selon le dirigeant.

La stratégie de Pharmaprix pourrait tout de même avoir un certain impact sur les ventes de divers commerces. Pensons, par exemple, aux petites épiceries de quartier, aux fruiteries, aux dépanneurs indépendants et même à la chaîne Couche-Tard.

L’épicier Metro, qui a acquis Jean Coutu le 11 mai, affirme qu’il « est trop tôt pour confirmer [ses] orientations » en matière d’offre alimentaire dans ses pharmacies.

« Cependant, il est certain que nous allons évaluer les opportunités en fonction de notre objectif de renforcer notre présence sur le marché et mieux répondre aux besoins des consommateurs », a ajouté la porte-parole Geneviève Grégoire.

PC chez Esso

Depuis hier, la carte PC Optimum est acceptée dans les stations-service Esso et Mobil. Un litre d’essence donne droit à 10 points. Idem pour chaque dollar d’achat dans le dépanneur ou au lave-auto. Ces points ne peuvent pas être échangés contre de l’essence, mais ils sont utilisables chez Provigo, Maxi, Pharmaprix et Joe Fresh.

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