RÉPLIQUE

MORT DU CYCLISTE CLÉMENT OUIMET
Rétablissons les faits

En réponse à la chronique de Lysiane Gagnon, « Ni une autoroute ni une piste d’entraînement », publiée mercredi

J’ai été choquée par la lecture de la chronique de Lysiane Gagnon dans La Presse du 23 mai. J’écris cette lettre afin de rectifier les faits.

Mme Gagnon est une chroniqueuse et une journaliste chevronnée. À titre de chroniqueuse, elle a tout à fait le droit, et même c’est ce qu’on attend d’elle, de faire part de son opinion sur des questions d’actualité. À titre de journaliste, elle a cependant l’obligation de s’assurer de la véracité des faits qu’elle présente en appui à ses opinions.

Lorsqu’elle affirme que Clément Ouimet dévalait à toute vitesse la voie Camillien-Houde sur un vélo fixie, sans freins, lorsqu’il a eu son accident mortel, laissant croire à un comportement fautif de sa part, c’est faux ! Clément, qui était un cycliste expérimenté, roulait sur un excellent vélo de route, très bien équipé, muni de freins avant et arrière. Pour ce qui est de la vitesse « folle », attendons de voir le rapport du coroner qui a analysé la situation avant de conclure quoi que ce soit quant au comportement du jeune cycliste.

Nous pouvons cependant affirmer qu’il a été victime d’une manœuvre illégale faite par un automobiliste qui a fait un demi-tour interdit, dans une courbe et dans une descente. Ces faits ont été vérifiés et sanctionnés par le SPVM.

Parler de la mort de Clément sous de fausses prémisses et en profiter pour faire le procès des cyclistes en général est extrêmement décevant. Baser son opinion, celle de s’opposer à la diminution de la circulation automobile de transit sur des faits erronés ayant mené à la mort de Clément Ouimet est totalement disgracieux !

La malheureuse mort de Clément n’est pas la raison principale du projet-pilote sur Camillien-Houde, car cette question est dans l’air depuis plus de 15 ans. L’intention de la Ville de Montréal est de redonner au parc du Mont-Royal des voies d’accès dignes d’un parc en maintenant son accessibilité à tous et à toutes, piétons, cyclistes, usagers des transports collectifs et automobilistes. Il s’agit simplement de revoir l’aménagement de la route, qui, au fil des décennies, est devenue une artère de transit au flot incessant de voitures, désagréable et dangereux pour tous.

Réponse de Lysiane Gagnon

« Clément adorait dévaler la voie Camillien-Houde à toute vitesse sur un vélo sans freins. » C’est ainsi que débutait un article de Michèle Ouimet publié dans La Presse+ du 31 janvier, article relatant un long entretien avec la mère du jeune cycliste, laquelle faisait un douloureux retour sur la journée fatidique du 4 octobre 2017.

Cette information, qui laissait croire que Clément Ouimet enfourchait un vélo sans freins au moment de l’accident, n’a jamais été démentie publiquement par les proches du jeune homme. C’est sur cela, de même que sur les témoignages de cyclistes qui, dès l’annonce de sa mort, l’ont décrit comme un adepte passionné du fixie (fixed gear), que je me suis basée pour écrire que Clément Ouimet était sur un vélo sans freins le jour de l’accident.

C’est une erreur dont je m’excuse auprès de la famille de M. Ouimet et de nos lecteurs.

Pour obtenir une confirmation officielle, j’ai contacté jeudi le coroner Jean Brochu qui a rédigé le rapport sur cet accident. Ce rapport n’est pas encore public, mais il a répondu à ma question sur le type de vélo utilisé par Clément Ouimet : « Un vélo de route régulier avec tous les équipements requis. »

En somme, si, comme sa mère l’a raconté à ma consœur Michèle Ouimet, le jeune Clément aimait descendre la voie Camillien-Houde sur un fixie, ce n’est pas sur ce type de vélo qu’il roulait le 4 octobre.

Passons maintenant au reste de la lettre de Mme Lareau.

Mme Lareau m’accuse d’avoir parlé de « vitesse folle ».

Michèle Ouimet, au sortir de son interview avec la mère de la victime : « Le 4 octobre, vers 11h15, Clément dévale Camillien-Houde à toute vitesse sur son vélo. »

David Santerre dans La Presse+ du 6 octobre 2017 : « Compétiteur redoutable, l’ascension et la descente à vive allure de la voie Camillien-Houde était son quotidien… ». Nombre d’autres témoignages admirateurs de ses amis cyclistes vont dans le même sens.

Le DPCP indique que « l’analyse de la scène de l’accident n’a pas permis d’établir la vitesse à laquelle circulaient le cycliste et la Toyota », mais conclut, en termes euphémiques, que « le cycliste a manqué de temps et de distance pour être en mesure d’éviter la collision ». On ne peut me reprocher d’avoir présumé la même chose.

Mme Lareau m’accuse d’avoir « fait le procès des cyclistes en général ». Faux. J’ai parlé des dangers que posent non pas les cyclistes en général, mais ceux qui ne respectent aucune règle et se servent de la voie publique comme piste d’entraînement.

Mme Lareau m’accuse de m’ « opposer à la diminution de la circulation automobile de transit sur le mont Royal ». Faux. Au contraire, j’ai proposé une solution de compromis fondée sur la cohabitation civilisée et l’interdiction du transit automobile le week-end et en juillet.

Mme Lareau m’accuse de faire un lien entre cet accident et le projet-pilote de la Ville. Il suffit de relire les journaux de l’époque pour voir que c’est cette tragédie qui a relancé, comme jamais auparavant, le débat sur l’opportunité de bloquer le transit automobile sur la montagne. Certes, l’idée était dans l’air depuis plusieurs années, mais l’on en parlait peu et rien ne se faisait. Or, dès le lendemain de l’accident, le maire Coderre a mis sur pied un groupe de travail sur la question, et l’annonce du projet-pilote, le 6 février, a été l’un des premiers gestes de la nouvelle mairesse de Montréal. Le lien est évident.

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