Réjean Ducharme 1941-2017

Un auteur qui influence la jeunesse

Réjean Ducharme laisse un riche héritage littéraire pour les professeurs de littérature et leurs élèves. La Presse a demandé à trois enseignants de cégep de témoigner de l’effet des œuvres de l’auteur sur les jeunes.

Des œuvres comme L’océantume, L’hiver de force et Va savoir ont marqué l’imaginaire collectif de la francophonie, mais ce sont les titres L’avalée des avalés et Le nez qui voque qui attirent l’attention des professeurs de cégep par leurs histoires qui se rapportent étroitement à la réalité de leurs élèves, soit l’adolescence.

« Que ce soit la découverte de la sexualité ou la perte de l’enfance, tous les symboles sont là », décrit Roxanne Bouchard, professeure de littérature québécoise et de création littéraire au cégep régional de Lanaudière à Joliette, citant en exemple Le nez qui voque.

« C’est la révolte de jeunes qui veulent garder leur innocence, qui comprennent que le monde des adultes est corrompu et qui veulent garder une certaine pureté et une authenticité qu’ils sont sur le point de perdre », explique Simon Leduc, professeur de français au département de littérature du collège Montmorency.

ENSEIGNER L’ŒUVRE OU LE PERSONNAGE ?

Pour Richard Lachance, professeur de littérature au cégep du Vieux Montréal, ce n’est pas un choix évident que d’enseigner les œuvres de Réjean Ducharme. « C’est difficile à enseigner. De 200 à 300 pages qui racontent des douleurs adolescentes dans un sous-sol de maison, ça lasse un peu », lance-t-il, en précisant qu’il n’omet jamais d’enseigner la figure mythique de l’auteur.

Bien que les œuvres de Ducharme ne plaisent pas au plus grand nombre, selon Richard Lachance, leur effet s’avère très fort chez certains élèves. « Dans une classe de 30 personnes, je sais que de trois à cinq élèves vont être illuminés, voire renversés par le style », souligne le professeur.

« Ceux qui aiment les proses de Réjean Ducharme, ce sont des étudiants qui vont aller en littérature après. »

— Richard Lafrance, professeur au cégep du Vieux Montréal

C’est ce que confirme Simon Leduc. « Je me rappelle avoir lu L’avalée des avalés au cégep, dit-il. Je ne me dirigeais pas nécessairement vers des études en littérature. Je ne savais pas que la littérature pouvait toucher à ce point, ouvrir à des mondes comme ça. […] Ça a été une des œuvres marquantes qui m’ont amené là. »

Le professeur est ainsi d’avis que l’enseignement des œuvres de Réjean Ducharme est nécessaire. « Faire lire ça à des jeunes qui entrent tranquillement dans l’âge adulte, c’est précieux. […] J’aime bien qu’il y ait de l’humour dans ce qu’il écrit, ce qui n’est pas toujours évident à faire entendre à des étudiants. Il y a une force dans la capacité de parler de révolte et de le faire en plus avec humour », affirme Simon Leduc.

RÉINTÉGRER DUCHARME AU PROGRAMME

Apprendre la mort d’un artiste comme Réjean Ducharme incite certes à se replonger dans ses œuvres. Roxanne Bouchard entend d’ailleurs annoncer la nouvelle à ses nouveaux élèves. « Je vais leur parler de la mort d’un auteur qu’ils ne connaissent pas encore », lance-t-elle.

Les œuvres de Ducharme lui rappellent ses débuts en enseignement, il y a une quinzaine d’années, alors que Le nez qui voque était au cœur de ses cours. « Les grands auteurs nous quittent et ça transforme nos enseignements », indique la professeure.

« C’est un des grands romanciers québécois et on va y revenir par périodes dans les cours, c’est certain », confirme Richard Lachance.

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