Opinion : Droits de la personne

Donnons une voix à chaque enfant

Récemment, la Commission canadienne des droits de la personne a rendu son rapport annuel, faisant état de près de 1500 plaintes pour discrimination reçues en 2016.

Plusieurs de ces plaintes provenaient de personnes vivant dans des situations de grande vulnérabilité. Il s’agit d’exemples manifestes de personnes souffrant de discrimination, d’exclusion et de pauvreté en raison de leur race, d’un handicap physique, d’une maladie mentale, de leurs croyances ou tout simplement, d’où ils viennent.

Par contre, nos statistiques et nos données ne reflètent pas la réalité de tous les Canadiens. Ceci est dû au fait qu’il existe au Canada un nombre important de personnes – les plus vulnérables de tous – qui n’ont ni la capacité ni les ressources pour porter plainte par eux-mêmes : nos enfants.

Le Canada est salué et reconnu mondialement pour son engagement envers la justice sociale et les droits de la personne. Depuis des décennies, la Charte, la Loi canadienne sur les droits de la personne ainsi que la législation provinciale et territoriale en matière de droits de la personne, ont donné aux citoyens, la possibilité de dénoncer l’injustice, les inégalités et les mauvais traitements.

Or, pour se faire entendre, il faut d’abord avoir une voix…

Notre système des droits de la personne est conçu de manière à protéger nos enfants, mais cette protection est limitée puisqu’elle dépend entièrement de la bonne volonté et de la persévérance des adultes. Un enfant qui fait face à de la discrimination ou à de l’abus – une situation dont un adulte est souvent l’auteur – se voit dépendant des adultes pour le protéger, le représenter et déposer une plainte en sa faveur. Tragiquement, pour plusieurs enfants, ce sont des obstacles qu’ils ne peuvent soulever seuls.

Alors que nos enfants, seuls, ne sont pas en mesure de s’exprimer sur la place publique et de faire valoir leurs droits, l’injustice, elle, ne discrimine pas.

La pauvreté, l’insécurité alimentaire, la pénurie de logements, le manque de services d’aide à l’enfance, la discrimination dans l’accès aux soins de santé ou à l’éducation sont des drames humains qui font partie du quotidien pour des millions d’enfants. Ces situations, ces mauvais traitements et les inégalités auxquels ils sont confrontés représentent des blessures qui laisseront des cicatrices. On peut constater, sans aucun doute, que ces cicatrices auront un impact à long terme dans leur vie.

Témoignages

C’est pourquoi, dans la préparation de notre rapport annuel 2016, nous avons réalisé une chose que nous n’avions jamais faite auparavant – nous avons fait état de la situation des droits de la personne selon le vécu de cinq enfants.

En leur donnant une voix, on permet au lecteur d’apprendre ce que c’est d’être un jeune vulnérable dans un monde d’adultes : ces enfants qui vivent avec un handicap physique ou mental qui les exposera toute leur vie à de la discrimination dans l’accès à l’éducation et à un emploi, ces enfants ayant une diversité de genre qui n’arrivent pas à se reconnaître dans notre système de protection des droits de la personne, ces enfants autochtones arrachés à leur famille et isolés de leur communauté et ces enfants migrants qui grandissent dans des centres de détention.

Ce sont là des histoires crève-cœur qui, malheureusement, ne sont pas des cas isolés. En nous confiant leurs témoignages, ces enfants et ces jeunes, pourtant si vulnérables, nous inspirent par leur courage et leur force alors que bien des adultes n’oseraient pas en faire autant.

En tant qu’adultes, parents, amis et membres de la société, nous avons la responsabilité d’assurer que les efforts de ces enfants ne sont pas en vain.

Nous devons leur lancer le message que leur vie, de même que celle de tous nos enfants, a de la valeur et mérite d’être protégée.

Nous enseignons à nos enfants que notre société est généreuse, bienveillante et inclusive, car nous reconnaissons et valorisons le principe que tous ont droit à l’égalité des chances. Nous devons donc pousser le combat pour l’égalité encore plus loin afin que chaque enfant ait une voix.

Nous ne pouvons pas rester silencieux face à cette situation, ou attendre pour que les autres agissent avant de lever la main pour dénoncer ces situations pour revendiquer le respect des droits des enfants. Nous ne pouvons rester silencieux alors que tant d’enfants souffrent en silence. Dès maintenant, nous devons nous arrêter, prendre conscience et agir.

Que pouvons-nous faire ? Nous pouvons tous dénoncer les situations, et se porter à leur défense. Bref, lorsque des enfants sont confrontés à de la discrimination et à de l’injustice sociale, nous devons agir et veiller à leur bien-être. Ils représentent notre avenir.

Donnons-leur donc une voix. Maintenant.

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