Dennis Edney à Montréal

« Omar Khadr est l’un de nos fils »

Parler de l’ex-enfant-soldat Omar Khadr avec l’avocat Dennis Edney, c’est comme lui parler de l’un de ses propres enfants.

« Omar Khadr est l’un de nos fils, laisse tomber Me Edney, en entrevue hier avec La Presse dans un restaurant montréalais. Quand Omar a été libéré sous caution et que je l’ai emmené à la maison cette année, mon plus jeune fils, Duncan, lui a donné une longue accolade. Pas une accolade pour être poli. Une vraie accolade. C’était un moment exceptionnel. »

L’avocat Dennis Edney et sa femme Patricia se donnent corps et âme depuis plus de 10 ans pour soutenir la cause d’Omar Khadr, citoyen canadien arrêté en Afghanistan et emprisonné à l’âge de 15 ans à Guantánamo. Il devenait ainsi le plus jeune prisonnier jamais incarcéré dans la base américaine controversée. En 2010, la Cour suprême du Canada a tranché que le gouvernement canadien avait violé les droits d’Omar Khadr en vertu de la Charte et qu’il avait « contribué à la poursuite de sa détention ».

Aujourd’hui, les Edney sont épuisés, mais ils continuent de se battre. L’homme de 29 ans, qu’ils hébergent chez eux aux termes d’une entente tout à fait inhabituelle avec la cour, a passé pratiquement la moitié de sa vie derrière les barreaux et il n’est libéré que sous caution.

Au moins trois recours en justice se profilent dans son avenir immédiat, dont deux aux États-Unis, explique Nathalie Drouin, membre de « Pour Omar Khadr », regroupement d’artistes et d’intellectuels québécois lancé pour faire connaître sa situation et récolter des fonds afin de financer sa défense juridique.

« Me Edney et sa femme paient ces frais de leur poche depuis longtemps. Du temps de Guantámamo, ils engloutissaient souvent 10 000 $ par mois de leurs économies pour mener la cause à bout de bras. Omar aura bientôt besoin d’avocats américains, et c’est un processus coûteux. »

— Nathalie Drouin

SOUVENIR FLOU

Né en Ontario en 1986, Omar Khadr est le fils de l’un des principaux financiers d’Al-Qaïda. Omar avait 10 ans quand sa famille a déménagé en Afghanistan, 15 ans quand il a été blessé au cours d’une attaque afghano-américaine durant laquelle il aurait lancé une grenade qui a tué un soldat des Forces spéciales américaines, Christopher Speer.

Omar Khadr, qui a perdu un œil et a été plongé dans le coma lors de l’attaque, dit n’avoir qu’un souvenir flou des événements.

Plus tôt cette année, Omar Khadr est sorti de prison. Il ne porte plus de bracelet GPS à la cheville. Il étudie au baccalauréat au King’s University College à Edmonton.

Le cas d’Omar Khadr met à nu « l’inaction et la complicité du Canada » dans l’emprisonnement illégal de ce citoyen mineur au moment de son arrestation, souligne Me Edney, qui présentera une conférence à l’Université McGill le 21 octobre prochain.

« Le Canada et son gouvernement ont sciemment abandonné ce garçon de 15 ans dans l’enfer de Guantánamo. Notre pays n’a pas défendu les droits les plus fondamentaux de ce citoyen. Si nous acceptons cela, quel genre de société laissons-nous à nos enfants ? »

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