Montréal

Compromis

Les défenseurs de l’Agora plaident que Montréal pourrait apporter certaines modifications à l’œuvre pour la préserver. Les toits des structures sous lesquelles les itinérants s’abritent auraient pu être enlevés, suggère Christian Bédard, estimant que des modifications seraient préférables à une démolition pure et simple. L’homme rappelle que celles-ci n’ont pas été construites pour rien, mais devaient abriter des boutiques de rue. La Ville n’ayant jamais animé le lieu, les itinérants ont fini par se l’approprier.

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Froide réception

La famille n’est pas la seule à s’indigner du projet, celui-ci ayant reçu un très mauvais accueil dans le milieu des artistes et des protecteurs du patrimoine. « Il y a un seul autre endroit au monde où on détruit les œuvres d’art et c’est au Moyen-Orient, pour un credo religieux. Ici, c’est pour un credo urbanistique. Pour moi, le résultat est le même », a lancé Christian Bédard, du RAAV. Même indignation chez Héritage Montréal, qui avait classé l’Agora parmi ses 10 sites emblématiques menacés du patrimoine montréalais. « On est une métropole culturelle et on passe le bulldozer. Pour faire quoi ? Pour faire un aménagement digne d’une banlieue », a déploré Dinu Bumbaru.

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La famille Daudelin pourrait bloquer le projet

L’élu Richard Bergeron, qui pilote le projet, ne cache pas que la démolition de l’Agora ne plaît pas aux héritiers de Charles Daudelin, qui détiennent les droits moraux sur l’œuvre. Le Regroupement des artistes en arts visuels (RAAV) dit d’ailleurs que la famille envisage de contester le projet devant les tribunaux. « On va appuyer la famille dans ses démarches. Il est possible qu’il y ait une poursuite en cour ou une demande d’injonction pour empêcher la démolition », dit Christian Bédard, directeur général de l’organisation.

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Itinérants évincés

Beaucoup de points d’interrogation subsistent quant au sort de la trentaine d’itinérants qui campent en permanence au square Viger, reconnaît Bernard St-Jacques, du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal. Saluant la volonté de la Ville de porter assistance aux usagers du square qui se retrouveront ainsi sans toit, il espère voir les policiers faire preuve de tolérance si ceux-ci élisent domicile dans un autre endroit public. Quant au futur square, Bernard St-Jacques espère que les aménagements seront accueillants pour les itinérants et non pas conçus pour les en tenir éloignés.

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Problème d’insécurité

La famille Daudelin a beau s’opposer à la démolition et les « puristes » auront beau déchirer leur chemise, Denis Coderre se dit déterminé à aller de l’avant. « On va le faire de toute façon. Ça fait 30 ans et il y a un niveau de dangerosité », a maintenu le maire. Environ 2000 employés du CHUM ont déjà commencé à travailler au superhôpital et bien peu osent s’aventurer au square Viger, confie son directeur général Jacques Turgeon. « Les gens ne sont pas à l’aise d’aller là. Comme c’est là, personne ne traverse la rue. Il n’y a pas une infirmière qui finit à minuit qui veut aller chercher sa voiture autour. Ce n’est pas sécuritaire. » Le problème de sécurité est tel que même des itinérants n’osent plus y mettre les pieds, dit Bernard St-Jacques, du Réseau d’aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal.

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Rasons

L’annonce n’avait même pas été faite que déjà, hier matin, certains se portaient au secours du square Viger. Faudrait conserver, faudrait juste réaménager, animer un peu…

Désolé, mais le square est un endroit sinistre qui mérite d’être rasé.

Oui, Charles Daudelin était un artiste de premier plan, comme en témoigne son œuvre, notamment la fontaine Mastodo, qui est implantée au cœur de l’actuel square. Mais il n’était pas urbaniste, comme en témoigne la place qu’il a dessinée tout autour : l’agora en dépression sous le niveau de la rue, l’immense mur aveugle, les paralumes et les nombreuses colonnes de béton.

Il faut préserver le patrimoine, je suis le premier à le clamer, mais ce n’est pas tout le patrimoine qui est digne d’être préservé.

Le quartier, la Gare Viger en transformation et les milliers d’employés du futur CHUM méritent mieux. Ce que leur propose justement l’administration Coderre avec ce projet qui n’est peut-être pas parfait, soit. Mais qui, en plus d’intégrer des éléments de l’œuvre de Daudelin, constitue toute une amélioration par rapport à l’actuel coupe-gorge.

Bravo.

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L’ Agora du square Viger sera rasée

Refuge pour des dizaines d’itinérants, l’Agora du square Viger sera démolie dans le cadre d’un projet de 28,3 millions de la Ville de Montréal qui vise à réaménager les abords du CHUM. Mais la disparition de cette œuvre d’art est décriée tant par la famille de l’artiste que par les défenseurs du patrimoine.

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Le projet en bref

Moins de béton, plus de verdure. C’est ainsi qu’on pourrait résumer le projet de réfection du square Viger concocté par la Ville de Montréal. Au passage, les structures de béton de l’Agora, en place depuis 1983, seront démolies pour faire place notamment à une fontaine, le long de la rue Saint-Denis. Deux imposantes structures cubiques devront toutefois rester puisqu’elles abritent des ventilateurs du ministère des Transports du Québec (MTQ) prévus pour évacuer la fumée en cas d’incendie dans le tunnel Ville-Marie, qui passe tout juste en dessous. Le square doit être fermé et clôturé dès novembre. Les travaux dureront un an et demi afin de permettre la réouverture en mai 2017, soit en plein 375e anniversaire de Montréal.

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Œuvre d’art menacée

Plusieurs l’ignorent, mais les structures de béton sous lesquelles les itinérants campent à longueur d’année sont en réalité une œuvre d’art du sculpteur Charles Daudelin, mort en 2001. Ce serait d’ailleurs la première fois que Montréal détruit sciemment une œuvre d’art publique, de l’aveu de la Ville. Pour éviter d’effacer complètement le travail de Charles Daudelin au square Viger, Montréal souhaite déplacer la sculpture Mastodo, qui, à son emplacement actuel, ne peut être utilisée comme fontaine comme il était prévu à l’origine. Le MTQ a toujours craint que l’œuvre n’endommage la dalle de béton sous laquelle passe l’autoroute Ville-Marie.

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