Gouvernement du Québec

Surplus de 1,2 milliard en un seul mois

Il faudra sérieusement débattre, chers lecteurs, de l’utilisation des surplus récurrents qui emplissent les coffres du gouvernement du Québec.

Hier, le ministère des Finances a publié son rapport mensuel des opérations financières, qui met à jour les résultats du gouvernement jusqu’au 31 août. Or, devinez quoi : pour le seul mois d’août, le surplus du gouvernement a atteint 1,2 milliard de dollars !

Si l’on fait le cumul depuis le début de l’exercice financier, soit le 1er avril, le surplus atteint 1,7 milliard. Ainsi, après seulement 5 mois, le Québec dépasse nettement ses objectifs annuels, soit l’atteinte du déficit zéro.

Et encore, il faut savoir que cette somme vient après la soustraction des versements au Fonds des générations. Ces versements, qui sont pris à même les activités courantes, servent à réduire la dette. Si on les incluait, le surplus du mois d’août bondirait à 1,4 milliard et celui depuis le 1er avril, à 2,6 milliards.

Bref, l’économie roule à fond de train, et le gouvernement en profite. Pour la même période de cinq mois l’an dernier, le surplus s’élevait à 1,0 milliard, soit 731 millions de moins que le 1,7 milliard de cette année.

Vous me direz qu’on ne peut pas vraiment débattre, puisque le gouvernement libéral, majoritaire, tient les cordons de la bourse. Tout de même, en cette année électorale, l’équipe au pouvoir n’est certainement pas insensible aux doléances de ses commettants.

Cela dit, le ministre des Finances, Carlos Leitão, s’est clairement engagé à baisser les impôts des PME et des particuliers, il y a deux mois. De combien ? Mystère. Depuis, plusieurs économistes se sont prononcés en faveur de cette baisse, étant donné la position historiquement défavorable du Québec à ce chapitre en Amérique.

La question qui se pose maintenant : les baisses d’impôts seront-elles annoncées à la mise à jour automnale, d’ici la fin novembre, ou au budget annuel du printemps prochain ?

Au fait, d’où viennent ces surplus ? J’en entends dire qu’ils ont été amassés sur le dos des clients du système d’éducation et de la santé. C’est mal connaître le contexte économique : personne n’aurait pu prévoir que le Québec connaîtrait une telle croissance en 2017. Encore hier, les chiffres de l’emploi du mois d’octobre sont venus confirmer la tendance.

Or, cette croissance des emplois, des ventes au détail et des affaires engraisse les coffres de l’État. Depuis avril, les revenus autonomes du gouvernement sont en hausse de 4,5 % sur la même période de l’an dernier. Or, le gouvernement avait prévu qu’ils croîtraient au rythme de 1,8 % !

En août, ce sont les recettes tirées de l’impôt des particuliers qui ont connu la plus forte hausse (+ 12,7 %), après les cotisations au Fonds des services de santé (+ 20 %). Depuis le début de l’année financière (1er avril), l’augmentation est de 3,6 % dans le premier cas et 3,7 % dans le second.

Ces cinq mois d’exercice ont vu les recettes des impôts des sociétés croître de 18,1 % et celles des taxes à la consommation, de 3,8 %.

Ce boom des revenus se poursuivra-t-il au cours des prochains mois ? Difficile à dire. L’économie du Québec ne pourra continuer à ce rythme pendant longtemps, pensent de nombreux économistes. Et par ailleurs, le gouvernement ne pourra compter sur les mêmes recettes au cours des prochains mois, ayant baissé certains impôts.

Un rappel ? Élimination de la contribution santé, baisse du taux d’imposition des profits des grandes entreprises (de 11,9 à 11,5 %) et diminution de la taxe sur la masse salariale des PME. Ces trois baisses, qui s’ajoutent à la majoration du seuil à partir duquel le Québec impose les contribuables, retranchent plusieurs centaines de millions de revenus au gouvernement.

Compte tenu de cette privation, il n’est pas clair que les 12 prochains mois seront aussi lucratifs que les 12 derniers, période où le Québec a engrangé un surplus de 3,2 milliards. Ce magot équivaut à 387 $ par habitant, bébés compris.

Maintenant, qu’en est-il des dépenses de l’État ? Alors voilà : depuis avril, les dépenses de programme ont augmenté de 3,3 %, soit moins que le rythme attendu (4,1 %). Ce sont les dépenses de santé (3,2 %) et celles pour l’éducation (2,7 %) qui ont connu les meilleures hausses entre avril et août, si l’on fait abstraction de la mission Gouverne et justice (+ 20,7 %).

Ce retard dans l’injection de fonds par rapport aux prévisions est en voie d’être comblé, puisqu’en août, la hausse des dépenses de programme a bondi de 9,5 % (9,9 % en éducation et 7 % en santé).

Enfin, le gouvernement a, une fois de plus, géré sa dette de main de maître, faisant reculer son service de la dette de 7,2 %, alors qu’il a budgété une hausse de 2,3 % pour l’année.

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