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Une cohabitation pas toujours simple

Des champs à perte de vue, des vaches qui broutent, des rivières… Qu’elle fait rêver, cette campagne ! Cette réalité bucolique est toutefois perturbée le jour où l’odeur de fumier, le bruit des travaux de la ferme et le tracteur sur la route viennent s’y mêler. Ce choc ne se fait pas toujours sans heurts.

« Les gens ne sont pas toujours conscients de cette réalité. La campagne, ce n’est pas tranquille quand le séchoir à foin part ou lorsque le producteur fait les labours. Ces gens gagnent leur vie, ils n’ont pas le choix », mentionne René Beauregard, directeur de l’organisme Au cœur des familles agricoles.

Claudette et Gilbert Mathieu ainsi que leurs deux garçons, Jasmin et Pascal, sont propriétaires de la Ferme Caribou, une ferme laitière et de grandes cultures, située à Terrebonne. La famille Mathieu possède des terres à cet endroit depuis 1877. Même si ce coin de pays n’a plus rien à voir avec une municipalité rurale, l’urbanisation de la campagne et toutes ses conséquences y sont les mêmes que partout ailleurs au Québec.

Qui dit arrivée de nouveaux citoyens dit davantage de circulation automobile. Pour les Mathieu, cela équivaut à s’armer de patience juste pour sortir de leur cour avec la machinerie. « Nous cultivons 405 hectares dans 10 emplacements. Il faut sortir souvent », raconte Claudette. À 65 ans, cette dernière avoue ne plus vouloir conduire le tracteur sur la route en raison du stress que cela engendre. « Il y a les camions, les vélos, les marcheurs et toutes les autos. Il y a tellement de choses, cela m’énerve trop. »

C’est donc Gilbert et ses fils qui prennent la route, mais la vigilance est plus que de mise. « Les gens n’ont pas de notion d’agriculture et ils sont très impatients. Ils nous dépassent régulièrement par la droite et il y en a même un qui s’est pris dans le fossé. Il n’était plus capable de sortir », raconte Jasmin. Si certains prennent des risques, d’autres expriment leur mécontentement par les doigts d’honneur et leur klaxon. « Il faut rester zen, sinon tu es tout le temps en maudit », souligne Jasmin.

La circulation n’est pas la seule conséquence de cette urbanisation. Les Mathieu ne comptent plus les fois où des véhicules tout terrain ont pris leurs terres pour leur terrain de jeu. Cela est sans compter ces citadins qui ne comprennent pas qu’un champ n’est pas un lieu de villégiature.

« Nous avons vu une voiture monter dans notre champ. Quand nous sommes arrivés, les gens étaient confortablement installés pour un pique-nique. Ils nous ont répondu qu’ils regardaient la nature ! »

— Gilbert Mathieu

Le bruit, les abeilles trop près de la maison, l’odeur du fumier s’ajoutent aux éléments qui irritent parfois les nouveaux venus. « Une femme s’est déjà plainte des odeurs. Nous l’avons invitée à venir visiter nos installations, elle n’est jamais venue », raconte Gilbert Mathieu.

Des solutions pour vivre en harmonie

L’ouverture d’esprit, la communication, la politique de la porte ouverte pour créer des relations harmonieuses avec sa communauté, c’est ce que prône René Beauregard.

« Pour avoir une réelle idée de l’endroit où vous allez vivre, il est bon d’aller explorer les lieux au moment où les activités agricoles sont les plus fortes, soit au printemps et en automne. Allez cogner aux portes des agriculteurs, posez des questions. »

Chez les Mathieu, cette invitation n’est pas restée lettre morte puisqu’il ne se passe pas une semaine sans que quelqu’un vienne en visite. « Nous ne refusons jamais personne. Le temps que l’on met à informer les gens améliore la cohabitation », croit Gilbert Mathieu.

Pour permettre aux citadins d’être mieux informés de la réalité agricole, l’organisme Au cœur des familles agricoles a créé un Guide du bon voisinage

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