Réplique
Se protéger des maladies animales
Professeur titulaire, faculté de médecine vétérinaire, Université de Montréal, Saint-Hyacinthe
J’aime beaucoup le travail de M
Gagnon. Si je suis d’accord avec certains des commentaires de son article (obsession sur l’alcool et les cigarettes afin de percevoir des taxes ; lignes séparées pour les Canadiens et immigrants reçus lorsque ça déborde avant d’entrer dans le hall où se trouvent les machines… qui ne servent pas à grand-chose), je suis par contre en désaccord avec certains autres.J’ai visité plus de 50 pays sur les cinq continents en raison de mon travail, et je voyage plusieurs fois par année, donc j’ai une certaine expérience dans ce domaine.
a) L’introduction de matériel d’origine animale ou végétale (les exemples donnés par M
Gagnon : foie gras et pomme) ne comporte aucun risque pour la santé publique… mais il pourrait causer un grand risque pour la santé des animaux de production, avec des conséquences terribles pour l’économie et la perte d’emplois.On ne cherche pas à protéger les personnes : on protège la production animale du Québec et celle du Canada.
Vous voulez un exemple : l’agrile du frêne est rentré par nos frontières, avec les conséquences qu’on sait. On n’a pas pu éviter cela, mais on a probablement évité des centaines d’autres infections grâce au travail des douaniers. Pour cela, nous devons répondre aux questions des douaniers qui sont formés afin de cibler les dangers sur la base de nos réponses. Et cela n’a rien à avoir avec le fait d’être canadien ou non.
b) Dans la même optique, si nous avons visité une ferme (disons en Russie, où il y a présentement une épidémie de peste porcine, l’une des pires maladies infectieuses chez le porc et absente en Amérique du Nord et en Europe occidentale), il est préférable de ne pas en visiter une autre dans les jours suivants notre arrivée, pour prévenir le risque d’être un vecteur mécanique du virus et de le transmettre à nos animaux.
Plusieurs personnes ne connaissent pas cette information. Ce serait désastreux pour le Canada si l’infection arrivait : toutes nos exportations seraient arrêtées et il faudrait abattre des milliers d’animaux pour arrêter l’épidémie. Souvenez-vous de l’épidémie de fièvre aphteuse au Royaume-Uni…
c) L’Europe est un continent commun à plusieurs pays avec des conditions sanitaires variables pour les animaux. Il est donc pratiquement impossible d’y effectuer un contrôle serré. Le Canada est un pays exempt de plusieurs maladies animales, et nous avons soit l’océan, soit les États-Unis comme frontière, donc nous sommes bien protégés.
d) Le Canada est loin d’être le seul pays qui contrôle tous les voyageurs à leur entrée au pays. Au Mexique, par exemple, tout le monde (Mexicains inclus) doit appuyer sur un bouton et une lumière apparaît. Si c’est vert, on sort. Si c’est rouge, on doit ouvrir ses valises ! Complètement au hasard.
e) La carte Nexus coûte 50 $, mais elle dure 5 ans. Je pense que la classe moyenne qui voyage en plus à l’extérieur pourrait payer 10 $ par année. Pensez-vous vraiment que cela est prohibitif ? J’ai la carte Nexus (avant c'était Canpass Air) et c’est très pratique : une carte pour les voyageurs considérés comme « sécuritaires ». On ne voit pas de douanier lors du retour au pays, seulement en sortant, on donne sa déclaration.
Selon moi, le seul problème de ce système n’est pas le prix, mais le fait qu’on doive se déplacer à l’aéroport pour les entrevues. En fait, ce n’est pas si grave et on peut aussi le faire lors d’un voyage en prenant un rendez-vous quelques heures avant notre départ, et ce sera fait pour les cinq prochaines années !