Ugo Fredette avait atteint son « point de rupture », plaide la défense
Saint-Jérôme — Un homme « ordinaire » critiqué, insulté et violenté par sa conjointe peut-il finir par atteindre son « point de rupture » et tuer deux personnes sans en avoir vraiment l’intention ? « Ce n’est pas illogique ou déraisonnable » de le croire, a plaidé hier l’avocat d’Ugo Fredette.
« Utilisez votre gros bon sens. » Me Louis-Alexandre Martin a martelé cette expression hier pour inciter le jury à faire bénéficier Ugo Fredette d’un « doute raisonnable » afin de l’acquitter des meurtres au premier degré de sa conjointe Véronique Barbe et d’Yvon Lacasse.
Ugo Fredette et Véronique Barbe formaient un couple « immature et impulsif » qui se « réconciliait dans le sexe », selon le thérapeute du couple, avance la défense. « C’est très important de vous projeter dans ce type de couple là. Pas votre couple. [Leur] couple à eux. C’était un couple hardcore, très versé dans le sexe », a fait valoir Me Martin au jury.
La femme de 41 ans crie, insulte Ugo Fredette et médit de lui, notamment sur les réseaux sociaux, avance la défense. Le 14 septembre 2017, Véronique Barbe exige que son conjoint quitte leur maison, mais ce dernier refuse. Elle « tempête », puis le pousse dans l’escalier, selon la version de l’accusé. « Il ne faut pas balayer du revers de la main le fait que c’est un geste de violence. Pousser quelqu’un, c’est [une] voie de fait », a plaidé Me Martin.
Véronique Barbe tente ensuite de poignarder son conjoint, mais ce dernier bloque le coup. Ugo Fredette a alors un épisode d’amnésie, jusqu’à ce qu’il voie Véronique Barbe, un couteau dans la poitrine. Une image qui le « marque au fer rouge ». « Ce n’est pas dénué de sens que cette image ait pu colorer l’ensemble de ses actes et décisions par la suite », a soulevé Me Martin.
L’avocat de la défense a tenté de démontrer au jury qu’Ugo Fredette n’avait ni séquestré ni harcelé Véronique Barbe en septembre 2017. Le couple avait d’ailleurs « fait l’amour » la veille du jour fatidique, relève Me Martin. « Quand on fait l’amour, il n’y a pas de harcèlement. […] Rien dans la preuve ne montre qu’entre le 10 et le 13 [septembre], il y a quelque chose de harcelant pour M. Fredette », a-t-il plaidé.
Après la mort de sa conjointe, Ugo Fredette part en camion avec un enfant jusqu’à une halte routière de Lachute. Il surprend Yvon Lacasse, 71 ans, en train de tirer l’enfant dans son véhicule. Les deux hommes se battent à l’intérieur du véhicule, jusqu’à ce qu’une prise de judo d’Ugo Fredette mette fin à la bagarre, selon le récit de l’accusé. Ce n’est pas « complètement farfelu » de conclure qu’Ugo Fredette n’avait pas l’intention de tuer Yvon Lacasse ce soir-là, dit Me Martin.
Le criminaliste s’est aussi attaqué aux conclusions du pathologiste judiciaire sur la mort d’Yvon Lacasse. Le septuagénaire a pu se faire « écraser le visage contre le sol », compte tenu de ses fractures à la mâchoire, selon l’expert. Or, cette conclusion n’est fondée sur « strictement rien », maintient l’avocat de la défense.
« Quand il nous dit que c’est un coup de pied qui est donné, son guess est aussi bon que le mien », a plaidé Me Martin, en soulevant l’hypothèse que des animaux aient pu causer les blessures. Des propos qui ont provoqué des murmures dans la salle bondée du palais de justice de Saint-Jérôme. Le corps d’Yvon Lacasse a été retrouvé en piètre état dans un bois des Laurentides.
Ce sera au tour du procureur de la Couronne, Me Steve Baribeau, de plaider ce matin.