Chronique

Un élan pour Imagia et l’intelligence artificielle en santé

L’intelligence artificielle est devenue omniprésente dans quantité de secteurs industriels et une multitude de domaines de la vie humaine comme celui de la santé, qui est aussi le terreau d’activité de la jeune pousse montréalaise Imagia, qui est en train de développer une plateforme numérique pancanadienne qui accélérera le développement de nouveaux traitements contre le cancer.

C’est dans le Mile-Ex, en plein cœur du complexe qui abrite le MILA, l’Institut québécois d’intelligence artificielle, que logent les 60 personnes qui forment l’équipe d’Imagia. La moitié des effectifs d’Imagia est formée de chercheurs et d’ingénieurs en intelligence artificielle (IA) et l’autre, de spécialistes en produits médicaux, en programmation, en radiologie ou en études cliniques.

« Imagia a été créée il y a six ans par Alexandre Le Bouthillier, docteur en informatique, et Nicolas Chapados, Ph. D. en apprentissage machine qui a travaillé avec le professeur Yoshua Bengio. Je me suis joint à eux il y a quatre ans en fusionnant mon entreprise Cadens Medical Imaging », m’explique Florent Chandelier, lui-même titulaire d’un doctorat en génie mécanique et d’une maîtrise en radiologie, et chef de la technologie chez Imagia.

L’idée derrière la création d’Imagia était d’utiliser l’intelligence artificielle pour accélérer la détection de certains types de cancers, développer de nouveaux traitements personnalisés et accélérer la recherche clinique et le développement de nouvelles solutions curatives.

« Les chercheurs cliniques ont besoin de données pour effectuer leurs travaux et la seule collecte d’informations cliniques pouvait représenter jusqu’à un an de travail. Ils devaient fouiller dans chaque dossier de chaque hôpital.

« Nous, on a développé des outils pour les accompagner en utilisant l’IA. Notre plateforme EVIDENS permet aux chercheurs cliniques d’avoir accès aux données médicales de tous les patients d’un hôpital et de faire plus facilement des recoupements. Ce qui pouvait prendre un an se fait en un après-midi seulement », résume Florent Chandelier.

Grâce à l’IA, Imagia développe également des solutions d’imagerie qui permettent d’accélérer les diagnostics de plusieurs cancers, mais qui servent aussi en cardiologie, en neurologie ou pour les maladies dégénératives.

« On développe des plateformes ou des solutions logicielles que l’on propose à des partenaires industriels comme Olympus, GE ou Fuji. On ne fabrique rien, mais on vend des licences et on distribue à nos partenaires cliniques une partie de nos revenus », précise Florent Chandelier.

Une plateforme nationale et une vitrine

Depuis huit mois maintenant, Imagia participe activement à une nouvelle plateforme nationale baptisée Plateforme numérique de découvertes et de santé (PNDS).

Cette initiative a été lancée par le ministère fédéral du Développement économique et a été financée à même le Fonds stratégique pour l’innovation.

Dotée d’un budget de 50 millions, la PNDS, qui vise à exploiter le potentiel de l’intelligence artificielle pour le développement de bases de données cliniques et de nouveaux traitements personnalisés contre le cancer, regroupe une centaine de différents partenaires au Canada, dont 31 hôpitaux, 19 entreprises, 7 universités, 22 fondateurs de recherche et les 4 principaux laboratoires canadiens en matière d’IA, dont celui de Montréal.

C’est l’Institut de recherche Terry Fox et Imagia qui sont à la tête de ce nouveau réseau.

« C’est l’Institut de recherche Terry Fox qui est chargé d’identifier les domaines de recherches et qui attribue les fonds qui servent à subventionner les projets de recherche. L’Institut Terry Fox finance aussi certaines infrastructures dans les hôpitaux.

« S’il manque des capacités de calcul à l’hôpital de Sherbrooke, l’Institut peut financer l’achat d’équipements », illustre Florent Chandelier.

Cette initiative fédérale et le fait qu’on a choisi le groupe Imagia pour la mener à terme arrive à point pour la start-up montréalaise. Déjà, sa plateforme EVIDENS d’informations cliniques sur le cancer a été implantée au CHU de Québec, au CHUS, à Sherbrooke, et est en voie de l’être au CHUM, à Montréal.

« Notre plateforme va être implantée dans 31 hôpitaux de neuf provinces au Canada. Ce qui va créer une banque de données assez incroyable. C’est d’ailleurs le vœu de la PNDS que l’on développe et que l’on déploie au Canada des fonctionnalités canadiennes qui sont bien à nous », souligne le chef de la technologie d’Imagia.

Mais l’exercice en cours permet aussi de crédibiliser la démarche d’Imagia à l’étranger. La start-up montréalaise a été retenue par des établissements hospitaliers américains pour qu’elle y implante sa plateforme technologique.

Imagia compte quatre actionnaires principaux : la Banque de développement du Canada, Fidelity, Desjardins et Investissement Québec. Des actionnaires patients parce que l’horizon de profitabilité est encore relativement lointain.

« On souhaite franchir le seuil de rentabilité d’ici à sept ans, anticipe Florent Chandelier. D’ici là, il faut continuer de développer et d’avancer. Nos actionnaires le savent et nous encouragent à le faire. »

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