Famille

Cinq mythes sur la douance

Qu’est-ce que la douance ?
Il existe plusieurs définitions de la douance. Selon celle du Dr Françoys Gagné, reconnue internationalement, « la douance désigne la possession et l’utilisation d’habiletés naturelles remarquables, appelées aptitudes, dans au moins un domaine d’habileté (intellectuel, créatif, social, perceptuel ou moteur), à un degré tel qu’elles situent l’individu au moins parmi les 10 % supérieurs de ses pairs en âge ». Pour dépister la douance, les neuropsychologues évaluent le quotient intellectuel et différentes caractéristiques individuelles (créativité, motivation, personnalité) grâce à des questionnaires standardisés et des entretiens. 
Sources : Ordre des psychologues du Québec et Association québécoise des neuropsychologues

Quand un parent vous confie que son enfant est doué, vous avez envie de rouler les yeux ? Pourtant, la douance n’est pas toujours un cadeau du ciel, rappellent Kim Nunès et Julie Rivard dans leur livre Comprendre la douance. Kim Nunès déboulonne cinq mythes pour nous.

« Les enfants doués sont des premiers de classe. »

Certains le sont, d’autres, non, répond Kim Nunès, coautrice du livre, journaliste, enseignante et mère d’un garçon surdoué. Dans le livre, souligne-t-elle, un pédiatre fait une comparaison évocatrice : les enfants doués possèdent un moteur de Ferrari avec des freins de bicycle à pédales. Ils n’arrivent donc pas toujours à exploiter leur potentiel au maximum, dit-elle. « Une bonne proportion d’enfants doués sont en échec, se désole Kim Nunès. Plusieurs finissent par abandonner l’école qui – on va se le dire – les a souvent abandonnés depuis le premier jour d’école. » Certains s’ennuient et finissent par se désengager ; d’autres donnent leur 100 %, mais rencontrent quand même des difficultés, note l’auteure, qui cite en exemple l’enfant qui pense plus vite qu’il n’écrit et celui qui fait des liens qui sont clairs à ses yeux, mais pas toujours à ceux des autres.

« Les enfants doués adorent l’école. »

« Un enfant doué peut détester l’école ! » résume Kim Nunès. Certains peuvent trouver le temps long ; d’autres, au contraire, ont de la difficulté à suivre le rythme. « Une grande proportion – près de la moitié des enfants doués – a aussi un trouble d’apprentissage : dyslexie, dysorthographie, dyscalculie… énumère Kim Nunès. Il y en a aussi qui peuvent avoir un trouble du spectre de l’autisme et un trouble de déficit d’attention et d’hyperactivité. » La douance s’en trouve ainsi camouflée, mais les besoins et les caractéristiques sont les mêmes, dit-elle. Par ailleurs, les enfants doués sont souvent des êtres très sensibles, qui anticipent beaucoup de choses. « L’école, ça peut être un milieu vraiment stressant parce qu’il y a beaucoup de stimuli pour eux », note l’auteure.

« Les personnes dites douées sont plus intelligentes que la moyenne »

« L’intelligence, c’est tellement relatif ! » répond Kim Nunès, rappelant qu’il en existe plusieurs définitions et plusieurs types. Elle ne croit pas qu’un simple chiffre – celui du quotient intellectuel – puisse à lui seul déterminer le potentiel d’une personne. « On dit que les personnes douées sont des personnes à haut potentiel. Mais si elles n’exploitent pas leur potentiel, ça s’annule, non ? Donc, non, les personnes douées ne sont pas plus intelligentes ; elles sont par contre différemment intelligentes. » Les enfants doués ont un mode de pensée différent, comparable à un arbre dont les branches se multiplient. « Ils ont des idées incroyables, mais est-ce que c’est être intelligent d’en avoir ou de pouvoir les exprimer ? C’est très relatif. L’enfant a aussi des compétences à développer, au même titre qu’un autre enfant. »

« La douance se manifeste de la même façon chez les filles que chez les garçons. »

La proportion est la même chez les garçons que chez les filles, mais ces dernières sont moins souvent dépistées. Pourquoi ? Parce qu’elles sont en général moins dérangeantes en classe, résume Kim Nunès. « Le garçon peut faire le clown, couper la parole à son enseignante, perdre son matériel… Souvent, d’ailleurs, de faux diagnostics vont surgir de ces observations-là. » Les filles cherchent davantage à se conformer, dit Kim Nunès. « Dans notre livre, l’auteure Doris Perrodin-Carlen explique qu’elles auront plus tendance à exploser à la maison tellement elles mettent d’efforts à se fondre dans la masse à l’école. » Le refoulement de leur malaise ou de leur ennui peut mener, dans certains cas, à une phobie scolaire ou à la dépression, dit-elle.

« La douance, c’est une prétention des parents. »

Celle-là, Kim Nunès l’entend souvent ! « Habituellement, ce qui mène un parent à faire évaluer son enfant chez un neuropsychologue, c’est un malaise ou une inquiétude, pas une fierté. Tu ne dépenses pas 2000 $ parce que tu es donc fier de ton enfant ! », dit-elle en riant. Le parent peut chercher à comprendre les comportements de son enfant, ses rigidités, son hypersensibilité, sa marginalisation ou encore sa tristesse d’aller à l’école. « C’est sûr que le mot douance n’attire pas la sympathie des gens, mais il faut garder en tête qu’un enfant, c’est un enfant, dit-elle. Si son besoin c’est d’être stimulé intellectuellement et qu’il ne l’est pas, c’est sûr qu’il y a des conséquences au niveau de son bien-être, de sa motivation et de son estime personnelle qui vont affecter toutes les sphères de sa vie. »

Comprendre la douance

Kim Nunès et Julie Rivard

Les Éditions de l’Homme

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