Opinion Le Québec dans l’œil du monde

Qui sont nos meilleurs ambassadeurs ?

La section Débats accueille dans ses pages un nouveau collaborateur. Le président d’Influence communication analysera les médias au Québec… et le Québec dans les médias.

Notre perception d’un peuple se définit en bonne partie par l’image que renvoient les médias de ses principaux ambassadeurs, qu’ils soient du domaine politique, social, culturel, sportif, économique ou universitaire.

C’est ainsi que l’on rappelle au monde notre existence et, dans certains cas, que l’on personnifie l’image du citoyen moyen.

Une marque forte se fait notamment remarquer grâce à ses porte-parole. Toutefois, pas besoin de s’appeler Céline Dion ou Guy Laliberté pour faire rayonner le Québec.

Thierry Hinse-Fillion est apparu dans notre écosystème médiatique en juin dernier par le truchement d’un reportage du Journal de Montréal. Un sympathique policier de Longueuil qui patrouille dans les skateparks de la ville, juché sur sa planche à roulettes.

Il semble cependant que l’image ait été assez forte pour transcender les frontières.

Dans la dernière semaine, il est devenu la « saveur du jour » dans la presse internationale. Les médias d’une douzaine de pays ont rapporté son histoire et son engagement singulier dans la communauté. Plus d’une centaine de reportages et d’articles ont été publiés ou diffusés dans des quotidiens, sur le web ou à la télévision. Parmi les pays où Hinse-Fillion s’est fait remarquer, on trouve, entre autres, les États-Unis, l’Australie, la Grande-Bretagne, la Chine et le Viêtnam.

Le Guardian l’a qualifié de « nouvelle police montée canadienne ». Certes, c’est anecdotique, mais c’est ainsi que se construisent les images fortes. Un jeune policier, ancien décrocheur, près de ses citoyens. C’est tout simplement magique. Une histoire qui pourrait un jour faire l’objet d’un bon film. Pourquoi pas ?

À une époque où l’image des policiers est mise à mal à travers l’Amérique, qui se plaindra d’un tel rayonnement. Surtout après que la presse internationale a accordé autant d’attention à la montée de l’extrême droite au Québec pendant tout l’été… Voilà enfin une image plus positive du Québec.

Ai-je besoin de vous rappeler les nombreux reportages internationaux sur le port des pantalons de clown ?

Toutefois, sans le savoir, Thierry Hinse-Fillion souligne une carence importante au Québec :  le Québec se cherche des ambassadeurs forts.

Qui sont nos meilleurs ambassadeurs ? Outre dans la francophonie, Céline Dion n’est pas souvent associée au Québec. P.K. Subban a pris la clé des champs. Leonard Cohen nous manque beaucoup.

En 2015, nous avions dressé un palmarès des citoyens qui faisaient le plus rayonner le Québec dans le monde depuis le début des années 2000. À mon grand étonnement, c’est Jean Charest qui dominait largement le classement, et ce, malgré le fait qu’il avait quitté la vie publique trois ans plus tôt. En fait, il générait en moyenne deux fois plus de couverture médiatique liée au Québec que n’importe lequel de ses plus proches concurrents. Chaque semaine, on le retrouvait dans des reportages en Chine, en Inde, aux États-Unis ou en Grande-Bretagne. Il entretenait clairement de prolifiques relations avec des leaders étrangers.

Si de prime abord on pouvait croire qu’il s’agit d’une bonne nouvelle, j’aurais plutôt tendance à être inquiet. Notre principal porte-parole ? Un élu, habile communicateur. Et depuis, personne n’a encore rayonné autant que lui. Cela démontre que nous avons cruellement besoin de renouveler notre inventaire d’ambassadeurs. Et, je ne vous parle pas ici de l’absence totale de représentants de Québec inc., un sujet que nous aurons l’occasion d’aborder lors d’une autre chronique.

Oui, mais pourquoi s’en faire ? Après tout, Simple Plan rappelle souvent ses origines. Chacun des spectacles de Robert Lepage est acclamé et on souligne son génie dans plusieurs pays.

Mais quand on pense qu’un simple policier de Longueuil a fait la barbe à tout ce beau monde la semaine passée, la réalité nous rattrape.

Les perceptions se construisent à partir d’images fortes et même souvent de clichés. C’est ainsi que se bâtit l’image de marque de l’ensemble d’une province ou d’un pays. C’est de cette façon que l’on persuade des gens d’immigrer, de voyager ou d’investir chez nous.

Il s’agit d’un phénomène que l’on retrouve dans d’autres régions du monde. L’Afrique du Sud, par exemple, rayonne principalement grâce à des gens qui ne sont pas sud-africains. Michelle Obama a longtemps été le principal vecteur d’intérêt médiatique pour ce pays. Plusieurs autres régions du monde souffrent de cette forme d’anonymat relative.

Consolons-nous. Sur de courtes périodes, Luka Rocco-Magnotta, Alexandre Bissonnette, Richard Henri Bain et Kimveer Gill ont fortement représenté le Québec à différents moments, mais depuis, la presse étrangère les a heureusement presque oubliés.

Reste maintenant la nouvelle génération. Les Eugenie Bouchard, Lance Stroll, Véronic DiCaire, Rachid Badouri et Jonathan Drouin pour ne parler que de ceux-là. Ils n’ont pas fini de convier le monde à s’intéresser au Québec.

Ils semblent sûrs d’eux, sans complexe et, soyons honnêtes, ils nous représentent bien.

De toute évidence, nous avons besoin de plus de leaders du monde culturel, des affaires et des universités. Les intellectuels québécois ne sont pas légion dans les médias internationaux. Ceux-ci n’ont pas beaucoup de place chez nous non plus. Nous devons les valoriser et nous y intéresser même s’ils ont quitté le pays.

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