: ovni difficile à décrire, biographie fragmentée, 130 microrécits qui pourraient presque tous servir de trame à un roman, monologue intérieur, nouveau genre littéraire ?
C’est simple pourtant. On ouvre le livre à la page qu’on veut. On ne tente pas de lire le livre tout d’un coup. On accepte ces morceaux de vie pour ce qu’ils sont : brefs, vrais, complets en soi. Et superbement écrits.
Michaël La Chance est philosophe et poète à la fois. Il est bien d’autres choses aussi, comprend-on à la lecture de ses confidences qui parlent, entre autres, de ses rencontres avec Romain Gary, Claude Vivier, Kittie Bruneau, Gaston Miron et René Char.
On ne peut juger un artiste qu’à l’aune de son entourage, mais ce que l’auteur retire de ses amitiés représente un bel échantillon des petits trésors contenus dans ce livre. Il y a là quelques leçons de vie de la part d’un écrivain qui a beaucoup voyagé, peiné, expérimenté, aimé, questionné.
« Est-ce que je peux accomplir quelque chose sans me demander ce que cela fait de moi ? », écrit-il.
Contrairement à d’autres qui emploient le « je » pour se justifier, crier leur colère au monde et à Dieu au passage, Michaël La Chance vit et réfléchit avec une généreuse tendresse et une véritable attention aux autres.
Il est cet enfant à l’Hôtel du temps. Pas tout à fait naïf, mais éternellement ébahi, ému, reconnaissant. Il s’étonne et se remet en question également. Il écoute le « bruit des choses vivantes », pour reprendre un titre d’Élise Turcotte.
« L’éternité se jette dans les petits objets pour en révéler, précisément, l’éphémère », croit-il.
L’auteur se montre d’une telle présence au monde, si totalement investi dans ce qui l’entoure, l’enveloppe, le fait. Son écriture se nourrit du plus intime de l’air, du plus profond des sensations.
Ce livre éminemment personnel nous rejoint. Il est une main tendue vers l’autre, vers l’expérience des autres. Chose de plus en plus rare dans le monde qui nous entoure, fait d’humeurs, de bruits et de rumeurs où seul celui qui crie se fait entendre.
« Pouvons-nous croire à une générosité de la vie qui s’exprime tant qu’on n’en abuse pas ? », demande-t-il.
n’est tout de même pas un livre d’un autre temps pour autant. Il est construit à même la fibre de notre époque. L’écriture profonde et réflexive n’est jamais lourde. On y lit de l’humour, on y sent de l’autodérision, mais aucun cynisme.
est un livre touchant même s’il ne cherche pas à émouvoir. Son propos est brillant, mais ne fait pas du tout dans le racolage ou l’épate. C’est un beau cadeau dans lequel il sera fort plaisant de plonger et de plonger encore pour s’assurer de notre humanité.