Opinion  Bibliothèques

Des villes où il fait bon lire

L’examen des dernières statistiques des bibliothèques publiques parues récemment (année 2013) nous démontre encore une fois de très grands écarts entre les villes du Québec en ce qui a trait à la lecture publique.

Si vous êtes un grand lecteur – ou si vous souhaitez que vos enfants le soient – vaut mieux habiter une ville de l’ouest de Montréal !

Sauf quelques exceptions, on constate en effet que les villes de l’ouest de l’île de Montréal tiennent le haut du pavé avec des contributions à la lecture publique qui dépassent largement la moyenne, celle-ci s’établissant à 40,16 $ par habitant.

À l’inverse, les villes qui contribuent le moins à la lecture publique sont réparties un peu partout sur le territoire québécois. Il est étonnant que des villes aussi importantes que Rouyn-Noranda ou Granby, et même Sherbrooke, ne contribuent pas davantage à cette ressource collective. Ne dit-on pas que nous vivons dans une société de l’information et du savoir et que la ville de demain sera intelligente ou ne sera pas ?

Montréal ne se situe pas parmi les meilleures, mais se classe bien au-dessus de la moyenne : 49,84 $ par habitant ont été affectés au réseau de bibliothèques publiques montréalais. Et cette somme n’inclut pas la Grande Bibliothèque qui, bien que située dans la métropole, est financée presque entièrement par Québec. 

Nous pouvons donc affirmer que Montréal est en bonne posture pour atteindre l’objectif de « grande ville intelligente » tel que proposé par Denis Coderre. Il faut pour cela que les budgets soient maintenus en 2014, ce qui, selon les échos que j’entends, est loin d’être confirmé. Il faut en effet comprendre qu’une ville ne peut être intelligente que par les technologies : il faut aussi pousser le contenu, pas seulement le contenant !

Quant à la ville de Québec, M. Labeaume a encore beaucoup à faire : la contribution de sa ville à son réseau de bibliothèques n’est que de 34,50 $ par habitant, bien en deçà de la moyenne québécoise ! Sans parler de Laval, qui ne fait pas mieux que 32,60 $ par habitant !

En réalité, plusieurs villes importantes du Québec n’ont pas encore fait le constat que la bibliothèque publique est un investissement plutôt qu’une dépense, ce que démontrent de nombreuses recherches. 

Par exemple, une étude récente démontre qu’à Toronto, pour chaque dollar investi dans la bibliothèque publique, la communauté en retire l’équivalent de 5,63 $ ! Les bibliothèques publiques y sont des « coopératives du savoir ». Elles sont en général gratuites, tel que préconisé par l’UNESCO, et contribuent fortement au développement des habitudes de lecture, permettent un accès aux nouvelles technologies de l’information à tous y compris aux plus démunis, et jouent le rôle de catalyseurs culturels pour une communauté.

Selon plusieurs experts, la nouvelle bibliothèque publique est en phase de devenir le 3e lieu idéal, entre le travail et la maison : un espace convivial, neutre sur les plans politique et idéologique, où il fait bon se retrouver, seul, en couple, ou en famille. Les bibliothèques scandinaves, par exemple, sont parmi les plus avancées avec cette nouvelle approche, un concept aussi très bien appliqué dans la nouvelle Bibliothèque Marc-Favreau.

Ce qui est un peu décevant avec ces nouvelles statistiques, c’est que malgré tout le travail réalisé ces dernières années par les bibliothécaires québécois, ces disparités de service entre les villes québécoises sont toujours aussi prononcées qu’il y a 30 ans. Peut-être faudrait-il changer le modèle de financement ?

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