Opinion : Abolition des frais accessoires

Une victoire pour les patients du Québec

L’annonce de l’abolition des frais accessoires représente une victoire certaine pour les patients du Québec qui n’auront plus à débourser le moindre coût pour un service assuré.

Trop longtemps tolérée par les gouvernements précédents, il ne faisait aucun doute pour tout observateur du système de santé que cette situation abusive enfreignait la Loi canadienne sur la santé et ses principes d’accessibilité et de gratuité.

N’en déplaise au ministre de la Santé qui affirmait cette semaine être arrivé à cette conclusion par « cheminement » personnel, la poursuite intentée par Me Ménard au nom de la Fédération de l’âge d’or du Québec (FADOQ) ainsi que la pression exercée de manière continue par une large coalition de citoyens, patients et médecins ont certainement nourri la réflexion du ministre Barrette.

Cette décision ministérielle annonce-t-elle pour autant la fin de cette longue saga dont des milliers de patients ont écopé les frais ?

Deux éléments devraient nous inciter à la prudence, soit la réponse des fédérations de médecins ainsi que l’absence d’engagement du ministre à maintenir le panier de services assurés.

En statuant que les frais accessoires devaient désormais être absorbés à même la rémunération des médecins, le ministre de la Santé reconnaît un constat largement partagé par la population –, mais aussi par un nombre grandissant de médecins dont le regroupement Médecins québécois pour le régime public –, à savoir que les médecins ont déjà largement profité de la générosité du gouvernement.

Dans une perspective sociale de responsabilité partagée, le ministre Barrette invite simplement les fédérations de médecins à revoir leur enveloppe budgétaire afin de mieux financer certaines activités cliniques effectuées hors établissement. Rien qui justifie la posture de confrontation adoptée par les docteurs Francoeur et Godin lors de leurs interventions médiatiques de cette semaine.

VALORISER CERTAINS ACTES MÉDICAUX

Si on peut certainement déplorer le fait que les frais accessoires se soient multipliés dans un contexte de désinvestissement massif de nos établissements publics, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) a raison de souligner les coûts importants de certaines interventions faites en cabinet et nécessitant un équipement de pointe. Or, il n’en tient qu’à elle de majorer la rémunération d’un tel acte afin que les médecins propriétaires n’encourent aucune perte.

Pour reprendre l’exemple diffusé cette semaine, si le coût d’une intervention en physiatrie est bel et bien 237 $ (frais accessoires demandés jusqu’à maintenant au patient) et que le médecin ne reçoit de la RAMQ que 91 $ pour l’acte délivré, la FMSQ a toute l’autonomie nécessaire pour décider de valoriser cet acte médical plutôt qu’un autre afin de combler la différence.

Nul besoin d’argent frais du gouvernement, une simple redistribution de la généreuse enveloppe qui nous a déjà été octroyée.

L’abolition des frais accessoires couvre l’ensemble des soins assurés, soit. Mais qu’en serait-il si le ministre décide – comme il en a le pouvoir – de sortir du panier de services assurés certains services qu’il ne jugerait pas médicalement nécessaires ?

À ce sujet, le ministre Barrette a tenu des propos fort préoccupants lors d’une commission parlementaire en octobre 2015 où il a remis en question le bien-fondé de la couverture publique de la vasectomie, une méthode de contraception pourtant largement adoptée par la population. Désassurer un service médical aurait pour conséquence immédiate de refiler au patient l’entièreté des coûts liés à ce service. Une bien mauvaise façon d’améliorer l’accès aux soins de santé.

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