Oshlag

Quand la bière mène à l’alambic

Pour Julien Niquet, c’est une évidence : tant qu’à distiller, aussi bien le faire de A à Z, avec un maximum de céréales, de plantes et d’aromates locaux. Née en juin 2016, la brasserie-distillerie Oshlag a déjà plusieurs bières et deux beaux spiritueux à son actif : la vodka houblonnée et l’exquise Fleur d’IPA. Nous avons visité les installations de l’entreprise, dans un parc industriel à l’est du quartier qui a inspiré le nom de l’entreprise, Hochelaga.

La base de la vodka est faite de millet et de maïs québécois. Elle coûte 10 $ par litre d’alcool pur à produire, comparativement aux 2 ou 3 $ que coûte un litre d’alcool neutre acheté à une grosse raffinerie. À part Cirka, qui elle aussi produit ses spiritueux du grain à la bouteille – mouture, fermentation, distillation, embouteillage –, la majorité des distilleries québécoises font leurs vodkas et leurs gins à partir de cet alcool de grain neutre acheté en Ontario. Les coûts plus doux leur permettent de (sur)vivre et de financer la production de whisky de type rye, bourbon ou single malt. Celui-ci doit en effet vieillir un minimum de trois ans en barrique afin de porter la mention whisky, comme le veut la loi canadienne.

Julien Niquet est agacé par le phénomène, mais il ne partira pas en guerre contre ces producteurs de « spiritueux québécois ». Il est conscient d’avoir le « luxe », lui, de faire ce qui lui chante, son petit empire de bière aidant à financer les activités de la distillerie. Du reste, celui qui se décrit lui-même comme un « entrepreneur hyperactif » a beaucoup trop de chats à fouetter, à titre de cofondateur et de chef de la direction de Glutenberg, de Transbroue et d’Oshlag. Avec sa conjointe, sommelière de formation, il vient même d’acheter un vignoble dans les Cantons-de-l’Est.

Rappelons qu’Oshlag brasse aussi de la bière. « À part l’alambic, qui ne sert qu’à la distillation, c’est le même équipement. Pourquoi ne pas en profiter ? », lance Julien Niquet. Les produits brassicoles d’Oshlag se veulent encore plus expérimentaux que ceux de Glutenberg, et sans la contrainte du « sans gluten ». Les bières fortifiées sont les prochaines au programme.

Côté spiritueux, Oshlag souhaite « se distinguer des autres distilleries en produisant des alcools inspirés du monde brassicole », révèle le jeune entrepreneur. La Fleur d’IPA est un distillat de bière Glutenberg, vieilli dans des fûts de tequila. Elle conserve les notes d’agrumes et de fleurs de la bière IPA d’origine. Dégustée avec une tablée d’amateurs de vin pas du tout portés sur le « fort », la Fleur a fait fureur !

La vodka est un autre beau clin d’œil au milieu de la bière, avec sa macération express de houblon provenant de la ferme des Jarrets noirs. Les prochains produits sur la liste du distillateur Jean-François Théorêt ? Un gin, un whisky fait avec du malt « chocolat », puis un brandy de vidal, fait avec le marc et le moût du vignoble de Léon Courville.

De la bière aux spiritueux

À notre passage, c’est du gin qui coulait de l’alambic Bridgetown de 1500 L. Mais pas celui d’Oshlag. Plutôt le premier spiritueux de Peter McAuslan, qui a vendu sa brasserie en 2013. L’entrepreneur est retraité de la bière, mais il est toujours très actif sur bien d’autres fronts. Depuis un moment, il avait envie d’élaborer des produits avec son ancien brasseur, aujourd’hui distillateur d’Oshlag, Jean-François Théorêt.

« Ça goûte un peu le 7 Up ! », lance M. McAuslan, apparemment charmé par le profil aromatique atypique de son gin. On y retrouve pour notre part un côté bonbons Sweet Tarts.

Nous avons également trempé nos lèvres dans un jeune rye McAuslan très prometteur. « Pour un new make, je trouve ça déjà bien goûteux. On a de la vanille et de la cannelle », constate Jean-François Théorêt, visiblement satisfait de ses premières barriques d’alcool de seigle.

L’ingénieur de formation est arrivé à la distillation en passant par le monde de la bière. Déjà amateur de scotch, il avait eu une révélation lors d’un voyage en Bavière, en 2007. 

« [En Bavière], j’avais vu de petits alambics, ce qui m’a permis de comprendre qu’on pouvait faire de la distillation vraiment artisanale. Ça m’a allumé. »

— Jean-François Théorêt, distillateur d’Oshlag

« Je me suis alors inscrit à un cours de maltage et de distillation donné à Édimbourg, en Écosse », raconte M. Théorêt, tout en gardant un œil et un nez attentifs sur le gin de son ami.

Déjà, les produits qu’il crée pour Oshlag semblent plaire. Les 150 premières caisses (1800 bouteilles) de la vodka houblonnée se sont envolées en trois semaines, dans le temps des Fêtes. La Fleur d’IPA est offerte en commande privée seulement, pour l’instant. 

Les curieux pourront goûter à ces produits pendant La Cuvée d’hiver, la semaine prochaine. Ils pourront également faire connaissance avec le « bébé » rye de Peter McAuslan. Jeudi soir, le distillateur Jean-François Théorêt donnera d'ailleurs une classe de maître intitulée Oshlag : whisky et bière en union libre. M. McAuslan en sera l'invité d'honneur.

Cuvée d’hiver

L’événement hivernal qui marie bière, cocktails, whisky, bouffe et musique rockabilly fête son cinquième anniversaire cette année. À l’offre déjà généreuse s’ajoute la Zone ludique, cette année, avec jeux de table et jeux géants animés par la boutique Randolph et le restaurant-bar à jeux Le Colonel Moutarde. C’est dans le splendide décor du Salon 1861, une ancienne église, que les noceurs se réuniront, de jeudi à samedi.

Des spiritueux sans gluten ?

Tous les spiritueux sont sans gluten (à moins qu’on y ait fait macérer un produit contenant du gluten, après la distillation). Mais seuls ceux dont tous les ingrédients de base sont sans gluten peuvent en porter la mention.

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