lydia bouchard

La beauté du geste

Danseuse, chanteuse à ses heures, chorégraphe et metteuse en scène pour le Cirque du Soleil, Lydia Bouchard, qui a été révélée au public avec l’émission Révolution, où elle occupe un fauteuil de juge, a, semble-t-il, tous les talents. L’artiste ajoute une corde à son arc avec le roman S’envoler, presque, qui vient d’être réédité.

Sorti il y a quatre ans aux Éditions Québec-Livres sous le titre Les Russes après l’école, le premier roman de Lydia Bouchard reprend son envol, car les Éditions Petit Homme ont décidé d’en faire une réédition, avec un nouveau titre : S’envoler, presque. Une façon de « donner une chance à ce roman qui est sorti dans l’ombre », explique l’auteure.

Car il s’en est passé, des choses, depuis 2016, dans la vie de celle qui collabore depuis 10 ans avec le Cirque du Soleil. En fait, une chose particulièrement (ou disons deux, car elle a donné naissance il y a neuf mois à une petite fille) : elle est, aux côtés de Jean-Marc Généreux et des jumeaux « Les Twins », l’un des « maîtres » de la très populaire émission Révolution à TVA, où concourent des Québécois de tous âges, dans tous les styles. L’émission, une véritable vitrine pour la danse, a rapidement fait mouche, puisqu’une troisième saison a été confirmée.

« Ça me ravit pour ma communauté ce qui se passe présentement. L’émission est à la fois bien reçue par le public, mais aussi par la communauté. Le contemporain trouve une façon de se démocratiser, on en apprend plus sur les différents styles de hip-hop. Le public est plus éduqué, intéressé… Si les diffuseurs comprennent que les gens ont envie de voir de la danse, on aura gagné quelque chose ! », lance celle qui « aimerait beaucoup revenir » pour la troisième saison – rien n’a été confirmé pour le moment.

Rêver d’étoiles

Bref, cette nouvelle notoriété qu’elle a acquise, à sa grande surprise d’ailleurs – « Une danseuse connue, ça n’arrive jamais de chez jamais ! », lance la maman de trois enfants – sert de fer de lance afin de donner une nouvelle impulsion à ce roman somme toute charmant, enveloppé d’une plume tout en lyrisme et porté par un récit assez rocambolesque, qui raconte l’histoire de Lou, 17 ans, qui caresse un rêve, un seul : devenir danseuse étoile.

« Je suis pleine d’admiration pour les auteurs et j’avais envie de faire ce geste, le geste d’écrire. J’ai campé le tout dans un univers que je connais, car je crois que ça aurait été périlleux de faire autrement. J’ai été puiser dans les émotions qui me sont très connues, mais pas dans mon histoire, car ce n’est pas autobiographique, à aucun égard… Quoique j’ai déjà eu un partenaire russe ! (rires) »

« Faire ce geste, créer sans attendre d’être choisie – moi qui ai passé une vie à auditionner, à essayer d’être ce que le regard de l’autre cherche –, d’être dans un geste de prise de pouvoir, ça m’a fait beaucoup de bien. »

— Lydia Bouchard, auteure

Évidemment, tout ne se passera pas comme dans un conte de fées pour Lou, qui devra composer, à l’aube de la vie adulte, avec des déceptions et remises en question, tout en goûtant une liberté nouvelle et enivrante et en portant, le cœur battant, sa passion à bout de bras, de Montréal à l’Europe, et même jusqu’en Arabie saoudite !

« Je ne me suis donné aucune limite, j’ai fabulé librement, inventé des revirements absolument improbables », ajoute Mme Bouchard, qui dit avoir écrit ce roman sur une longue période de six ans. Étonnamment, d’ailleurs, la partie la plus rocambolesque du roman, lorsque l’héroïne se retrouve au service d’une princesse saoudienne, a été inspirée du journal intime de Nicole Lamontagne, que l’ancienne danseuse a connue lors d’auditions pour le Cirque du Soleil.

Passion incommensurable et don de soi (et de son corps) absolu, petites et grandes trahisons, instants de grâce suivis de vertigineuses chutes, épreuves qu’on traverse pour mieux grandir comme artiste, l’ex-danseuse traduit bien comment, oui, ce choix de carrière est « difficile », certes, mais aussi rempli de « moments précieux ».

« Je ne voulais pas que mon récit soit alarmiste, ou en faire un Black Swan. J’avais plutôt envie de raconter comment je me suis sentie dans une pirouette, comment je me suis sentie sur scène… Oui, c’est ardu et beau, riche et troublant ! C’est une dévotion. »

Côté rebelle

Lydia Bouchard l’admet, même si elle a trempé dans l’univers somme toute rigide du ballet classique, elle a toujours eu ce petit côté rebelle, voire punk. Elle est passée par quelques écoles de ballet, mais sans jamais « avoir une grande école [marquée] sur la fesse droite », illustre-t-elle.

« J’étais la plus pop des classiques, et la plus classique des pop ! »

— Lydia Bouchard

Elle a plutôt fait son chemin toujours « un peu à contre-courant », n’hésitant pas à traverser les frontières entre les genres, touchant à la comédie musicale, au chant, au cirque, à la chorégraphie, à la mise en scène, et, aussi, à l’écriture. « J’ai toujours aimé jouer, essayer, et refusé de me laisser paralyser par la peur, car d’autres ont peut-être fait mieux ou autrement. Je laisse mon imposteur de côté quotidiennement et je m’amuse ! »

Celle pour qui « la musique, c’est toute la vie, et au cœur de tout ce que je fais », travaille actuellement sur une nouvelle création, Vive nos divas, dans le cadre de la Série hommage du Cirque du Soleil. Ce sixième opus de la série sera consacré aux divas québécoises, une « fable pop » sur laquelle elle collabore avec Jean-Phi Goncalves pour la direction musicale, et qui sera présentée cet été à l’Amphithéâtre Cogeco à Trois-Rivières.

S’envoler, presque

Lydia Bouchard

Éditions Petit Homme

160 pages

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.