Lutte contre les changements climatiques

Pour que le Canada devienne une référence

Cette lettre est adressée au premier ministre Justin Trudeau

Depuis plus de 40 ans, je plonge à travers les mers du monde et plus particulièrement dans les eaux glacées de l’Arctique canadien. J’ai été un témoin privilégié des beautés sous-marines qui regorgent au Nord, mais également des menaces grandissantes liées aux changements climatiques.

Aujourd’hui, on observe, entre autres, un déplacement d’habitat des espèces marines vers les pôles à la recherche d’eau encore froide, mais irrémédiablement, ce sont les grandes catastrophes météorologiques qui vont migrer et nous atteindre dans notre confort.

Les conclusions du récent rapport du GIEC, adressé aux dirigeants mondiaux, sont sans équivoque. Avec la simple augmentation globale de 1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, les conséquences seront multiples : vagues de chaleur extrêmes, extinction d’espèces vivantes, fontes des glaces et montée des eaux, moins de poissons dans les océans, etc. Sommairement, la seule façon de limiter la hausse à ce niveau, considérant qu’à 2 °C les conséquences seraient irréversibles, c’est de réduire massivement les émissions de CO2 jusqu’à en arriver à être carboneutre en 2050. C’est envisageable, mais pour l’atteindre, il faut agir maintenant et fermement.

Nous reconnaissons vos valeurs profondes familiales, environnementales et sociales. Nous reconnaissons également votre attachement au pays et à celles et ceux qui l’habitent, plus particulièrement les peuples des Premières Nations qui, bien avant nous, avaient pris soin des terres et de ses ressources. Bien sûr, votre bilan en environnement comporte des gains et des avancées significatives grâce aux efforts de la ministre Catherine McKenna. Mais qu’est-ce qui vous rendrait plus fier que de faire un legs plus grand que nature en amorçant un virage à 180° ?

Il est encore temps

Avec votre fonction de premier ministre et les responsabilités qui vous incombent, vous devriez faire le grand pas environnemental qui s’impose. Il est encore temps de reculer sur des promesses avant de couler avec les conséquences irréversibles des bouleversements climatiques. 

Un geste à la fois concret et symbolique serait d’abandonner le projet de pipeline Trans-Mountain.

Bien que les tribunaux ne vous obligent pas à consulter les communautés autochtones dans ce dossier, il serait malheureux de se priver de leur sagesse et de ne fournir qu’une raison économique pour aller de l’avant. Les milliards engloutis pour mettre fin au projet seront bien moins coûteux que ceux nécessaires à rebâtir des vies à la suite de catastrophes naturelles toujours plus graves. On dit souvent que les gens pro-environnement sont des analphabètes économiques, mais la facture de l’inaction risque un jour d’être bien plus importante encore que les bénéfices.

Il n’est pas question de dresser une province contre une autre, mais de gouverner avec le cœur, appuyé par ceux de millions d’enfants qui formeront le Canada de demain. Avec l’émergence partout sur la planète du climatoscepticisme, il faut, au contraire, clairement marquer notre différence et passer de la parole aux actes. Que le Canada devienne la référence pour tous les autres dirigeants du monde, qui ne pourront plus se réfugier derrière des politiques environnementales timides.

Agissez en bon père de famille, la nation vous en sera éternellement reconnaissante. Ne visez pas le jugement du prochain scrutin, mais celui que porteront les générations futures sur vos prises de décision. Nous saurons leur rappeler, nous les parents, les grands-parents, que notre génération a décidé à vos côtés qu’il fallait agir. Pour que leurs rêves d’avenir ne se transforment pas en cauchemars environnementaux, prenez de sages décisions.

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