Montréal

Le coût des centres de compostage et de biométhanisation explose

Des élus municipaux s’inquiètent de voir la facture gonfler et invitent la Ville à revoir son projet.

Les centres de compostage et de biométhanisation dont Montréal compte se doter pour traiter ses matières organiques coûteront beaucoup plus cher que prévu. La plus récente évaluation chiffre à plus de 520 millions la facture des cinq installations, soit deux fois plus que prévu.

« Le coût est rendu incroyable pour les centres de compostage. Ça n’a aucun sens. C’est inacceptable », s’est indigné Georges Bourelle, maire de Beaconsfield, l’une des 15 villes liées à Montréal au sein de l’agglomération.

L’élu Alan de Sousa, maire de Saint-Laurent, s’inquiète de voir la facture continuer à gonfler alors que l’aménagement des centres s’étendra jusqu’en 2025. « C’est sûr et certain que ces chiffres de 2018 ne seront pas les mêmes ! Je ne pense pas que la facture va s’arrêter à 520 millions », se désole-t-il.

10 ans de retard

Montréal avait annoncé en 2010 vouloir se doter de deux centres de compostage, de deux usines de biométhanisation et d’un centre de prétraitement afin de traiter les matières organiques. Rappelons que le gouvernement a fixé comme objectif de valoriser 60 % de celles-ci, un objectif loin d’être atteint encore aujourd’hui. Alors que les cinq installations devaient être opérationnelles en 2015, le projet accumule les retards. La dernière des cinq installations ne devrait finalement ouvrir qu’en 2025.

Ces délais ont contribué à faire gonfler la facture. Devant le coût croissant, Georges Bourelle invite Montréal à réviser son projet de fond en comble. 

« Il faut que ce soit revu, qu’on adopte une stratégie avec des coûts plus raisonnables. »

— Georges Bourelle, maire de Beaconsfield

« Je comprends qu’on veut avoir une bonne performance, que ce soit la meilleure qualité, mais ça ne doit pas être à n’importe quel coût. C’est comme si on avait donné carte blanche », s’indigne M. Bourelle.

« Il faut faire cela de façon abordable. C’est passé de moins d’un quart de milliard à plus d’un demi-milliard. La Ville doit faire une analyse pour voir si elle a pris les mesures pour avoir le plus bas soumissionnaire », renchérit Alan de Sousa.

Une consigne améliorée réclamée

Montréal espère voir le gouvernement du Québec renforcer la consigne du verre pour faciliter la sortie de crise du recyclage. L’administration Plante dit travailler ardemment à améliorer la qualité des matières recyclées afin de pouvoir recommencer à vendre ses ballots en Asie. Pour y arriver, la Ville inaugurera un nouveau centre de tri en 2019 qui permettra une meilleure sélection des matières grâce aux technologies de pointe. Montréal constate toutefois que laisser le verre dans le bac de recyclage contribue à contaminer l’ensemble des matières recyclables. « On souhaiterait une consigne plus forte, à plus grande échelle, qui serait plus efficace. Il faut que toutes les bouteilles à usage unique, comme pour le vin, soient consignées », dit Jean-François Parenteau, élu responsable de l’environnement au sein de l’administration Plante.

Vers une journée unique de collectes ?

Ordures le lundi, compostage le mardi, recyclage le jeudi, encombrants le vendredi… Devant la multiplication des collectes, plusieurs citoyens s’y perdent quand vient le temps de mettre leurs bacs à la rue. Aux prises avec des problèmes de salubrité, l’arrondissement du Sud-Ouest teste une nouvelle approche : concentrer l’ensemble des collectes sur une seule journée par semaine. Montréal craignait au départ que cette façon de faire sème la confusion et que des matières se retrouvent au mauvais endroit, mais les premiers résultats sont au contraire prometteurs. Le Sud-Ouest note une augmentation de la participation à la collecte de compostage et les plaintes en salubrité formulées au 311 ont diminué de 10 %. Déjà, on envisage d’étendre la mesure à d’autres secteurs. « Je n’entends que des bonnes choses et on va avoir ce type de discussion avec d’autres arrondissements », a indiqué Roger Lachance, directeur du service de l’environnement.

Payer pour jeter à Montréal ?

L’élu Alan de Sousa invite Montréal à imiter la Ville de Beaconsfield et à adopter la tarification des déchets pour inciter les citoyens à réduire leur production d’ordures. Il a révélé hier que l’idée avait été sérieusement envisagée par l’ancienne administration Tremblay en 2010 et 2011, époque à laquelle il siégeait au comité exécutif. « Il y avait eu une analyse du service des finances sur la question de l’écofiscalité pour réduire la consommation d’eau et réduire la génération de déchets », a-t-il indiqué. Montréal prévoyait aller de l’avant, mais la démission de Gérald Tremblay, en novembre 2012, puis l’arrivée et l’arrestation de Michael Applebaum ont fait dérailler le projet, dit M. de Sousa. Or, adoptée en 2016 à Beaconsfield, la tarification des déchets a permis de réduire de moitié (51 %) la quantité d’ordures produites par les citoyens. « Ça fonctionne très bien. On est parmi les meilleurs à Montréal », se targue d’ailleurs encore son maire, Georges Bourelle.

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