Enseignement supérieur

Québec prépare un « réinvestissement » dans les universités

Québec — Cinq ans après le printemps érable, Québec va finalement réinvestir dans les universités, qui n’ont jamais vu l’ombre des millions promis à l’époque.

« Le thème principal du budget, ça va être l’enseignement supérieur, la formation et la main-d’œuvre », a révélé le ministre des Finances, Carlos Leitão, lors d’un entretien avec La Presse plus tôt cette semaine.

Par « enseignement supérieur », il entend autant les universités que les cégeps. Il y a longtemps qu’un gouvernement a placé ce secteur au cœur d’un budget.

La priorité accordée à la formation et à la main-d’œuvre est moins surprenante : le budget sera sûrement l’occasion de concrétiser les engagements que prendra le premier ministre Philippe Couillard lors de son Rendez-vous national sur la main-d’œuvre, les 16 et 17 février.

Carlos Leitão s’exprime avec la prudence de rigueur avant le dépôt d’un budget, attendu en mars. Mais son signal est clair. Il parle bien d’un « réinvestissement » dans les universités. « De quel ordre ? Il faut attendre », a-t-il affirmé. « On va faire ce qu’on peut avec les moyens que l’on a. » Les nouvelles sont plutôt bonnes de ce côté : le gouvernement affichait un surplus de 1,2 milliard au 31 octobre dernier.

Lors de la mise à jour financière de l’automne, le gouvernement avait annoncé des investissements supplémentaires de 110 millions pour l’éducation (primaire et secondaire) et pour l’enseignement supérieur au cours de la prochaine année financière, donc 2017-2018. Cette somme sera revue à la hausse avec le dépôt du budget, a confirmé M. Leitão, refusant de donner plus de détails pour le moment.

Rencontre avec les recteurs

Il a rencontré les recteurs le 20 décembre dernier afin de discuter « très franchement » d’un réinvestissement et de lui permettre d’alimenter sa « réflexion ». C’est la première fois depuis une décennie qu’un ministre rencontre les dirigeants universitaires dans le cadre de la préparation du budget, selon plusieurs sources. Hélène David, ministre de l’Enseignement supérieur, était présente.

Aucun recteur contacté par La Presse n’a voulu commenter cette rencontre ni la promesse de réinvestissement. Le directeur de HEC Montréal, Michel Patry, s’est contenté d’envoyer un bref courriel. « La rencontre avait pour objectifs de sensibiliser le ministre des Finances aux défis et enjeux du milieu universitaire et de partager notre vision d’avenir du réseau », a écrit M. Patry, qui est également président du Bureau de coopération interuniversitaire, l’organisme qui regroupe les recteurs.

« Le ministre Leitão a été attentif et à l’écoute des points portés à son attention. »

— Michel Patry, directeur de HEC Montréal, au sujet de la rencontre entre les recteurs et le ministre Leitão

Les dirigeants universitaires savent d’expérience qu’une certaine retenue est de mise. Car les gouvernements précédents, libéral comme péquiste, leur ont fait miroiter un réinvestissement massif qui ne s’est jamais concrétisé.

Si le financement des universités faisait partie des enjeux de la crise étudiante de 2012, il est retombé dans l’oubli une fois réglé le dossier des droits de scolarité. La lutte contre le déficit zéro a tenu le haut du pavé par la suite.

Résultat : la subvention aux universités s’élève à 2,83 milliards cette année, comparativement à 2,70 milliards il y a cinq ans. Cela représente une hausse moyenne d’un peu moins de 1 % par année. Elle n’a pas permis de couvrir la croissance des coûts liés aux salaires ou encore à l’augmentation du nombre d’étudiants. Des compressions ont été imposées.

Les cégeps ont eu droit au même traitement. Leur subvention est passée de 1,7 à 1,8 milliard au cours des cinq dernières années.

Sous-financement

Les universités se plaignent depuis longtemps d’un sous-financement par rapport aux autres institutions similaires du reste du Canada. Elles le chiffraient à 850 millions en 2013. Le fossé s’est creusé depuis. Les recteurs l’évaluent maintenant à 1 milliard, ou 4000 $ par étudiant à temps plein.

L’économiste Pierre Fortin avait toutefois remis en question leur méthode de calcul avec une étude dévoilée en 2013. En tenant compte du coût de la vie plus faible au Québec, le sous-financement serait plutôt de 300 millions, disait-il à l’époque. Un chiffre qui a dû, lui aussi, augmenter avec le temps.

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