Plein air

Des peaux de phoque sans... phoque !

L’hiver n’est pas terminé, il reste de la neige en montagne et dans les sous-bois. C’est encore le temps de sortir ses skis hors-piste, d’y fixer des peaux de phoque et d’aller jouer dehors.

Peaux de phoque ? Faut-il alerter Brigitte Bardot ? Ce n’est pas nécessaire. Cela fait un bon moment que les peaux de phoque ne sont plus faites en phoque. Toutefois, le nom demeure, même si ces bandes que l’on colle sous la semelle des skis pour améliorer leur adhérence sont maintenant confectionnées à partir de nylon ou de mohair.

Etienne Laforest, de La Cordée Boutique, rappelle qu’un certain débat a cours au sujet de l’origine du ski, et donc, par extension, des peaux de phoque.

« Le ski viendrait soit de la région de l’Altaï, au sud de la Sibérie, soit du nord de la Norvège, indique-t-il. Ce sont les régions où on aurait commencé à utiliser des skis pour se déplacer. »

Dans le nord de la Norvège, on utilisait de la peau de phoque pour que les skis aient une meilleure adhérence.

« Ça glisse dans le sens du poil, explique M. Laforest. Ça permet aux phoques de glisser dans l’eau. Sur la neige, la même chose se répète. Ça glisse d’un sens, ça agrippe de l’autre. Ça permet de monter une pente avec des skis. »

Dans l’Altaï, les skieurs utilisaient ce qu’ils avaient sous la main, soit du crin de cheval.

« Les peaux de phoque ont évolué à travers le temps alors que l’utilisation des skis s’est propagée dans les Alpes et dans le reste du monde », indique M. Laforest.

MOHAIR OU NYLON ?

Effectivement, on ne croise pas beaucoup de phoques lorsqu’on parcourt la légendaire haute route Chamonix-Zermatt. Il fallait trouver autre chose. Ainsi, aujourd’hui, les skieurs ont le choix entre des peaux synthétiques (en nylon), des peaux à base de mohair (la laine du mouton angora) et des peaux alliant les deux.

« Beaucoup de compagnies vont faire des mélanges pour aller chercher le meilleur des deux mondes », déclare M. Laforest.

En effet, les deux principaux types de peau ont des avantages et des inconvénients bien spécifiques. 

« Le synthétique va favoriser l’accroche, il y aura plus de grippe. Le mohair va davantage glisser. »

— Etienne Laforest

Plusieurs facteurs vont amener les skieurs à choisir l’un ou l’autre type de peau. À commencer par le climat.

« Le mohair va s’imbiber plus rapidement que le synthétique, indique Etienne Laforest. Si on habite un territoire plus humide, comme la côte de la Colombie-Britannique, on va favoriser les mélanges synthétiques parce que la neige est plus humide. Avec un climat plus continental, on va plutôt aller vers le mohair. »

Il y a aussi la question économique : une peau à 100 % synthétique sera beaucoup moins chère que le mohair. Un skieur débutant qui commence à utiliser des peaux sera tenté.

« Ce qu’on conseille le plus au Québec, c’est un mélange de mohair et de synthétique, ou du 100 % mohair, qui va donner une belle performance. »

Les peaux de phoque continuent à évoluer. On offre ainsi des demi-peaux, qui couvrent uniquement le milieu de la semelle, en dessous de la bottine du skieur. C’est d’ailleurs la même zone que l’on couvre d’un fart d’adhérence lorsqu’on n’utilise pas de peaux.

HAUTE ROUTE ET HORS-PISTE

Jusqu’à maintenant, ce sont essentiellement les skieurs de haute route et les skieurs hors-piste qui utilisent des peaux de phoque.

Les bottes et les skis de haute route ressemblent aux bottes et aux skis alpins. Ils sont généralement plus légers, et la fixation permet de dégager le talon pour monter plus confortablement. On pratique ce style de ski dans des terrains comme les Chic-Chocs et dans les stations de ski qui permettent aux skieurs de monter à la force du mollet.

« C’est dans une optique aérobique », note M. Laforest.

Le skieur veut travailler fort pour monter, mais veut une belle récompense avec une descente à fond de train.

Le ski hors-piste est semblable au ski de fond, mais avec une botte un peu plus rigide, des skis plus larges et des carres de métal.

« C’est intéressant quand on a un terrain très roulant comme les Laurentides. »

— Etienne Laforest, à propos du ski hors-piste

Avec ces pistes accidentées et étroites, une bonne peau de phoque peut faire la différence entre une virée plaisante et un long calvaire.

On voit également de plus en plus des skis de fond classiques qui intègrent une peau de phoque au milieu de la semelle.

« Ça devient une solution de remplacement aux skis à écailles parce que ça glisse davantage, affirme Etienne Laforest. C’est une belle option en début ou en fin de saison, quand la température tourne autour de zéro et que les gens ne veulent pas utiliser de klister. »

Ou encore lorsque le skieur veut simplement faire une petite virée après le travail et ne veut pas se compliquer la vie en tentant de déterminer le fart idéal pour la température.

« Mais au niveau de la glisse, ça ne battra jamais un ski bien farté », lance M. Laforest.

Que le phoque se le tienne pour dit.

LA VIDÉO DE LA SEMAINE

Ouf !

Un grimpeur de glace a eu des sueurs froides en Italie lorsqu’une partie de la cascade de glace qu’il escaladait s’est effondrée.

LE CHIFFRE DE LA SEMAINE

122,3 km/h

C’est la vitesse atteinte en kitesnow (cerf-volant de traction sur neige) par Felix Kersten en Norvège en avril 2015. Prière d’attacher sa tuque.

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