sport amateur

« Léo est le futur du biathlon au Québec »

Jean-Philippe Le Guellec ne tarit pas d'éloges envers son protégé Léo Grandbois, qui a gagné l'or aux Mondiaux juniors de biathlon.

Erik Guay et Alex Harvey ne sont pas les seuls Québécois qui sont devenus champions du monde sur des skis, l’hiver dernier. Entre le sacre du premier en super-G à Saint-Moritz et celui du second au 50 km à Lahti, Léo Grandbois a lui aussi gagné l’or, aux Mondiaux juniors de biathlon de Brezno-Osrblie, en Slovaquie.

À sa première participation à une compétition de cette envergure, le Sherbrookois s’est imposé à l’épreuve individuelle de 12,5 km dans la catégorie benjamin (17-18 ans). Parfait au champ de tir, le seul parmi 101 skieurs à réussir l’exploit en cette journée pluvieuse, il a devancé un concurrent de Russie et un autre d’Allemagne, les deux puissances de ce sport d’origine militaire alliant ski de fond et tir à la carabine.

« Cette journée-là, les planètes étaient alignées pour moi. Je n’aurais pas pu faire une meilleure course », raconte Grandbois, rencontré hier après-midi à Laval à la remise de bourses Saputo de la Fondation de l’athlète d’excellence du Québec.

Grandbois est le troisième biathlète canadien de l’histoire médaillé d’or à des Mondiaux. Jean-Philippe Le Guellec a été le premier, remportant le sprint chez les benjamins en 2004. Ce dernier a ensuite participé à trois Jeux olympiques et gagné une épreuve de Coupe du monde en 2012, autre première pour un Canadien.

« En une phrase, Léo est le futur du biathlon au Québec, c’est aussi simple que ça », a clamé Le Guellec, devenu entraîneur de Grandbois à la fin de l’été.

« Il a encore plus de potentiel que moi au même âge. C’est un gars sérieux, qui aime avoir du plaisir. C’est un athlète vraiment complet. Honnêtement, je n’ai que des éloges à lui faire. »

— Jean-Philippe Le Guellec

Passion familiale

Discipline somme toute confidentielle au Québec, malgré les exploits olympiques de Myriam Bédard dans les années 90, le biathlon est entré dans la vie de Léo Grandbois quand il avait 8 ans. Cherchant un sport d’hiver pour son fils actif, sa mère, d’origine allemande, a été surprise d’apprendre l’existence d’un club, Biathlon Estrie, à Sherbrooke.

« Quand j’étais petite, j’écoutais les courses avec mon grand-père », explique Ulrike Froehlich, qui a rencontré le père de Léo, un universitaire québécois, à Munich. Un an après la naissance de leur fils, ils ont déménagé au Missouri avant de s’établir pour de bon au Québec.

Léo s’est donc développé à Biathlon Estrie sous la direction de l’entraîneuse Sandrine Charron, qui continue de superviser son parcours. Un programme sport-études à l’école secondaire du Triolet lui a permis de jumeler ses deux occupations, comme sa sœur Pauline, 15 ans, qui suit ses traces dans l’équipe canadienne de développement.

Le 22 février dernier, les parents de Léo et la petite communauté du biathlon ont suivi sa course aux Mondiaux grâce aux résultats en direct diffusés sur le site internet de la fédération internationale. Sa mère admet avoir d’abord cherché le nom de son fils, qui visait un top 10, dans le milieu du classement. Son mari lui a dit de regarder tout en haut…

« Inoubliable », sourit Mme Froehlich, accompagnée de sa propre mère, en visite de la Bavière.

Cette famille en Allemagne pourrait d’ailleurs être fort utile à Grandbois l’hiver prochain. Le jeune homme de 18 ans convoite en effet une participation à deux championnats mondiaux juniors, ceux de biathlon, où il vise une autre médaille d’or chez les benjamins, et ceux de ski de fond, qui se tiendront à quelques semaines d’écart, en Estonie et en Suisse.

Cette ambition n’est pas farfelue. Après son titre en biathlon, Grandbois a causé une autre surprise en remportant quatre médailles, dont deux d’or, aux championnats canadiens de ski de fond. Non seulement il a dominé en pas de patin (l’unique style en biathlon) chez les juniors B (16-17 ans), mais il est monté deux fois sur le podium en classique, technique qu’il n’avait pratiquée qu’à une dizaine d’occasions.

« [Les fondeurs] vont moins marcher le menton haut quand ils vont nous voir », dit Grandbois en souriant.

« En ski de fond, ils se disent meilleurs que les biathlètes en ski. Ça me fait plaisir de prouver que c’est faux. »

— Léo Grandbois

Capable d'en prendre

Durant l’été, Grandbois s’est joint à l’équipe du Québec de ski de fond pour un stage. Les athlètes sont généralement plus vieux, ce qui lui permet de progresser.

Avec les sélections pour le ski de fond dès le début janvier au mont Sainte-Anne, Le Guellec réfléchit déjà à la façon de bien programmer l’entraînement de son jeune protégé, qui devra se ménager du repos. Studieux et sérieux, le gaillard de 6 pieds et 184 livres est capable d’en prendre, pense le coach.

« Il lit des œuvres sur la performance et la préparation rattachées aux sports d’endurance, relève Le Guellec. Ça lui donne déjà une longueur d’avance sur la compréhension de son entraînement d’un point de vue cognitif. Et c’est le genre de gars qui n’a vraiment pas peur de se faire mal à l’entraînement, tout en sachant quand lever le pied. C’est une belle combinaison. »

Si on lui demande de quoi il rêve, Grandbois ne cache pas ses ambitions. « J’aimerais être champion du monde senior et olympique aussi, tant qu’à y être. Je suis à 100 % là-dedans. On verra bien. Je ne pense pas trop à ça pour l’instant, mais ce sont les objectifs. Je m’entraîne pour ça. » Guay et Harvey pensaient exactement la même chose à cet âge.

Témoignage courageux

Saputo a fait 51 heureux, dont 20 joueurs de soccer, avec son programme de bourses de la Fondation de l’athlète d’excellence du Québec, hier, à Laval. Le géant de l’agroalimentaire a remis en tout 149 000 $ à des élèves athlètes méritants de 13 à 24 ans. Lauréat d’une bourse spéciale de persévérance, Xavier Grenier-Talavéra a livré un témoignage courageux sur le syndrome de surentraînement qui a mis fin de façon soudaine à sa dernière saison. En parlant ouvertement de son expérience, le talentueux triathlonien de 22 ans souhaite « normaliser » les « blessures mentales », qui représentent encore un « tabou » dans le sport.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.