SANTÉ DES TOUT-PETITS

Pour un programme de suivi universel

Eva a 2 ans. Ses parents font tout ce qu’ils peuvent pour offrir le mieux à leurs enfants, mais ils vivent plusieurs stress en même temps… 

Le père d’Eva fait régulièrement de l’insomnie, entre autres à cause de son emploi précaire, mais aussi des problèmes de moisissures du logement qui semblent causer des symptômes respiratoires à toute la famille. La mère d’Eva ressent souvent de l’anxiété parce que leur plus grand a des troubles de comportement et que leur fille n’a toujours pas prononcé ses premiers mots. 

Les rendez-vous pour le suivi de santé des enfants se font rares. Ils n’ont pas de médecin de famille et leurs parents éprouvent beaucoup de difficulté à naviguer dans le système. Les fois où ils ont obtenu un rendez-vous, ils ne comprenaient pas toujours bien les informations des professionnels de la santé et se sentaient parfois jugés comme étant de mauvais parents.

Le cas d’Eva est fictif, mais il représente la réalité de bien des familles québécoises. La Grande semaine des tout-petits nous rappelle à quel point il est essentiel de bien soutenir les familles ayant de jeunes enfants. 

Nous souhaitons que le Québec mène une réflexion de fond sur l’organisation des services de santé offerts aux enfants de 0-5 ans. Nous proposons ici l’idée d’un programme universel de suivi de la santé des tout-petits, où la prévention et l’accès pour tous seraient des principes clés.

L’accès à un médecin

Malgré le fait que le suivi de santé et du développement devrait être un service de base facilement accessible à tous les jeunes enfants, il existe de multiples barrières d’accès, surtout pour les familles vivant en contexte de vulnérabilité. 

Une étude montréalaise récente a montré qu’un enfant de la maternelle sur trois issus d’une famille à faible revenu n’avait ni médecin de famille ni pédiatre, contrairement à un sur dix chez les familles mieux nanties. 

Or, au Québec, le suivi de la santé des enfants de 0-5 ans n’est pas facilité par un programme universel avec des rappels systématiques du CLSC, comme c’est le cas avec la vaccination. Le service dépend donc beaucoup de l’accès à un médecin et des démarches des parents.

Dans plusieurs provinces du Canada et dans d’autres pays, le suivi de la santé des tout-petits est enchâssé dans un programme systématiquement offert à tous. En Australie, les jeunes enfants bénéficient de 12 visites avec une infirmière spécialisée de leur naissance à l’âge de 3 ans. C’est le système de santé qui, de manière proactive, appelle les parents pour leur offrir ces 12 rendez-vous. Le programme inclut par exemple du counseling pour soutenir l’allaitement, pour réduire le temps d’écran et pour promouvoir des pratiques parentales favorables au développement des enfants. Les infirmières sont outillées pour dépister précocement certains problèmes de santé comme l’asthme, l’obésité ou les retards de langage. Des efforts supplémentaires sont faits pour rejoindre les familles à risque et on offre à ces dernières des services plus intensifs à la hauteur de leurs besoins.

Une avenue prometteuse 

Plusieurs problèmes de santé physique, de santé mentale et de développement soulignés dans le nouveau Portrait des tout-petits lancé mardi pourraient s’améliorer si le Québec se dotait d’un tel programme universel de suivi de la santé des jeunes enfants. Ce dernier devrait inclure des stratégies innovantes pour mieux desservir les familles ayant de plus grands besoins. Nous invitons les décideurs à considérer sérieusement cette avenue et à mener une vaste consultation sur les meilleurs moyens d’améliorer l’organisation des services de santé destinés aux tout-petits du Québec.

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.