ÉDITORIAL

Projet majeur dans la cour arrière

Les coûts du CHU Sainte-Justine sont passés de 200 à 939,6 millions

Toute l’attention est tournée vers la construction du CHUM et le déménagement du CUSM, au point où l’on oublie presque le Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, qui prend du volume. Ce qui devait être une simple « modernisation » est devenu un projet majeur, dont la facture frôle le milliard.

Depuis l’annonce initiale, en 2004, par Philippe Couillard, alors ministre de la Santé, les coûts ont bondi. Québec devait verser 200 millions pour ce projet totalisant 420 millions. Une contribution fédérale de 120 millions était attendue ; elle n’est pas venue.

Dix ans plus tard, le Plan québécois des infrastructures prévoit maintenant un coût total de 939,6 millions, ce qui inclut les taxes et les espaces autofinancés. La facture a grimpé de 370 % !

Le projet a évolué et pris de l’ampleur, au point d’être très différent de celui présenté à l’époque, en marge de l’annonce de la construction des nouveaux CHUM et CUSM.

Le CHU Sainte-Justine aura un nouveau bâtiment de sept étages regroupant les unités spécialisées, un stationnement souterrain de 1200 emplacements, un centre de recherche plus imposant, l’édifice principal sera rénové et toutes les chambres seront individuelles (sauf quelques-unes en néonatalogie, réservées aux jumeaux).

Selon Montreal Gazette, les ingénieurs de SNC-Lavalin, responsables du dossier, estiment que la construction était réalisée à 53 % en date du 31 janvier dernier. La construction provisoire doit être livrée à la fin 2016.

Aussi grandiose soit-il, ce projet s’ajoute à la longue liste des dépassements de coûts qui ne devaient plus se produire.

Personne n’a oublié le désastre du métro de Laval qui demeure l’exemple parfait de ce qu’il ne faut pas faire. Pourtant, combien d’autres dépassements de coûts ont été rapportés depuis ?

Quelques leçons ont été tirées, fort heureusement. Le gouvernement prévoit une enveloppe de réserve pour l’inflation et les imprévus. Les plans cliniques doivent être quasi finaux avant le signal de la première pelletée de terre. Cela aurait dû être l’évidence depuis longtemps.

Ce n’est d’ailleurs pas suffisant. Il faut mettre fin à cette manie, chez les élus, de vouloir annoncer les bonnes nouvelles avant même que les projets soient ficelés et que les besoins aient été adéquatement analysés. C’est ce que l’ancienne ministre Monique Jérôme-Forget appelait « le syndrome de la pépine ». Annoncés trop tôt, il paraît évident que les projets évolueront au fil des ans, entraînant d’inévitables dépassements de coûts qui minent la confiance des contribuables.

Sachant que d’autres importants projets d’infrastructures sont dans les cartons, dont le futur CHUQ, à Québec, déjà évalué à 2,1 milliards, et que d’autres hôpitaux, vétustes et âgés, nécessiteront des investissements majeurs au cours des prochaines années, il faut y voir. Dans un contexte où les finances publiques sont déjà mises à mal, il faut mieux planifier dès le départ pour éviter d’autres mauvaises surprises.

ÉDITORIAL

Des annonces et des coûts

Novembre 2004 

Philippe Couillard, alors ministre de la Santé, annonce la modernisation du CHU Sainte-Justine. Budget : 420 millions, dont 200 millions de Québec, 100 millions de la fondation et 120 millions du fédéral.

Mars 2006

Dans le cadre du projet de modernisation, le coup d’envoi est donné à l’agrandissement du centre de cancérologie. Le budget prévu est toujours de 420 millions, mais le plan clinique n’est pas définitif.

Avril 2009 

Le Vérificateur général dénonce le manque de contrôle des coûts des projets d’hôpitaux, dont Sainte-Justine. La facture a grimpé de 147 millions. Québec doit éponger la perte de la contribution attendue de la Fondation canadienne de l’innovation.

Août 2010

Le budget double presque pour atteindre 995 millions. La superficie du projet est de 50 % plus grande ; il ne s’agit plus de moderniser, mais d’agrandir et de construire de nouveaux pavillons.

Novembre 2012 

Une étude de Secor-KPMG révèle que le budget du CHU Sainte-Justine, comme plusieurs autres infrastructures, n’était pas prévu au Plan québécois des infrastructures. Le projet a bondi de 260 % en quelques années pour se chiffrer à 929 millions.

Juin 2015 

Le montant alloué au Plan québécois des infrastructures est de 939,6 millions, ce qui inclut le coût du contrat (845 millions) ainsi que la TVQ et les composantes autofinancées comme le stationnement (95 millions).

Éditorial

Coûteux hôpitaux

9,2 milliards

3,07 milliards CHUM

555,4 millions

centre de recherche du CHUM

2,1 milliards

Source : ministère de la Santé et des Services sociaux

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