Chronique

Le bulletin du gouvernement du Québec

Question quiz aujourd’hui : le gouvernement du Québec vérifie-t-il si l’argent des contribuables affecté à ses missions donne les résultats recherchés, sur les plans tant quantitatif que qualitatif ?

Reformulons. Dans quelle mesure les ministères et organismes s’assurent-ils que leurs fonds sont dépensés efficacement et atteignent les buts recherchés ? Sur une échelle de 0 à 10, quelles notes obtiennent-ils ?

Malheureusement, le gouvernement n’atteint pas la note de passage. En moyenne, les ministères et organismes obtiennent 4,1 sur 10 quand il est question de mesurer leur efficacité. Pire : non seulement ils sont incapables de savoir si les objectifs sont bien atteints, mais ils n’ont généralement pas d’indicateurs leur permettant de bien jauger les coûts de leurs services, avec une note de 2 sur 10.

Cette évaluation sévère est tirée du rapport de la Commission sur la révision des programmes, présidée par Lucienne Robillard. Les médias ont surtout fait état des constats concernant la SAQ et Revenu Québec, deux volets du rapport qui laissent les connaisseurs sur leur appétit. La section la plus fouillée du rapport est passée presque inaperçue et traite de la qualité de la gestion des ministères et organismes.

La Commission a voulu vérifier la pertinence des programmes dans le contexte où le Québec est la plus dépensière des provinces canadiennes (26,2 % du PIB), après l’Île-du-Prince-Édouard. Pour ce faire, les commissaires ont rencontré les ministères et organismes et leur ont soumis une batterie de questions, sur la base de 11 indicateurs.

Leurs constats ne sont guère reluisants. La Commission constate que ces entités administratives ne savent pratiquement pas quels sont leurs programmes prioritaires (note de 4,5 sur 10), ne mesurent pas leurs coûts d’administration (5,2 sur 10) et n’établissent pas de critères pour évaluer leur performance (4,7 sur 10).

Parmi les premières recommandations de son rapport, la Commission suggère d’implanter une culture du changement au gouvernement et de mettre en place un cadre de gestion relié aux résultats. Entre autres, on demande que les ministères et organismes disposent de véritables indicateurs de performance « permettant de vérifier si les effets des programmes et des activités correspondent aux résultats attendus initialement ».

En 2000, le gouvernement de Lucien Bouchard avait lancé une offensive majeure pour que les ministères axent leur gestion sur les résultats. Après 15 ans, la Commission constate que cette initiative a été un cuisant échec.

Il faut dire que les ministères et organismes doivent s’adapter aux exigences politiques de leur ministre et du parti au pouvoir. De plus, certaines missions de l’État ont maintes fois changé de responsable, ce qui est contre-productif. C’est le cas de la mission « science et technologie », constate la Commission.

Depuis 1980, les fonctionnaires ont changé de carte professionnelle à 15 reprises. À chaque fois, ils ont changé de patron, de collègues et de mandat. Parfois, la recherche et le développement scientifiques ont été au cœur d’un ministère du même nom. D’autres fois, cette mission a été confiée au ministère de l’Industrie, au ministère de l’Éducation et même au ministère des Finances !

Constat semblable pour la Faune et les Parcs, mission qui a changé de siège sept fois en 20 ans, ou pour le Développement économique.

Autre facteur qui n’aide pas les ministères, déplore la Commission : l’absence de soutien de la part des organismes centraux, comme le Conseil du trésor. Les ministères et organismes ne peuvent pas se comparer entre eux, car il n’y a pas de système spécifique conçu à cette fin. Pire : jusqu’en 2011, une seule personne au Conseil du trésor était affectée à l’encadrement de l’évaluation de tous les programmes du gouvernement.

DES FLÈCHES À COITEUX

La Commission constate que des efforts ont été engagés par le Conseil du trésor au cours des derniers mois, soit depuis l’arrivée de Martin Coiteux. Cependant, elle critique l’approche « centralisée, rigide et standardisée » qui a été retenue. « Une telle approche n’incite pas à l’innovation et risque de déresponsabiliser les ministères et organismes », est-il écrit dans le rapport.

Malgré ses critiques, la Commission constate que certains organismes ont eu particulièrement du succès dans la gestion axée sur la performance. C’est le cas de la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).

L’organisme a un plan stratégique bien défini, au cœur duquel se trouvent des cibles de résultats précises. Ces cibles concernent ses lignes d’affaires que sont notamment la prévention des accidents, la sécurité des véhicules et les services aux personnes accidentées, notamment.

La performance de la SAAQ est payante. Elle permet aux assurés que sont tous les automobilistes du Québec de bénéficier d’une baisse annuelle des contributions d’assurance de 394 millions pour les trois prochaines années.

Imaginez si tous les ministères et organismes en faisaient autant, toutes proportions gardées…

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