La radio publique en péril
Depuis la mi-mars, les stations de radio et de télé publiques américaines sont engagées dans un bras de fer avec la Maison-Blanche et le Congrès républicain. L’enjeu : des subventions de 445 millions US distribuées par la Corporation for Public Broadcasting.
« Si les coupes se concrétisent, il va nous falloir sabrer la programmation et la retransmission dans les régions isolées du Vermont », explique en entrevue Robin Turnau, présidente de Vermont Public Radio (VPR), qui fait partie du groupe National Public Radio (NPR).
« Cela dit, nous faisons depuis des années des simulations pour nous préparer à cette éventualité. À notre création, il y a 40 ans, le financement fédéral couvrait de 20 à 30 % de nos dépenses. Maintenant, on est rendus à 7 %. Cette année, c’est un peu plus élevé, 10 %, parce que nous faisons une ronde de financement spéciale pour des investissements en capital. »
VPR, qui peut être captée à Montréal et dans certaines régions des Laurentides au 107,9, a des milliers d’auditeurs québécois.
En 2014, VPR avait demandé à ses auditeurs québécois de protester contre la demande de la radio étudiante de l’Université Concordia de migrer vers le FM, ce qui aurait rendu VPR inaccessible à Montréal. Des centaines d’auditeurs avaient répondu à leur appel, dont des professeurs de Concordia.
Le CRTC avait rejeté la demande pour des raisons techniques, précisant qu’il ne pouvait donner priorité à une station étrangère. Au fil des ans, d’autres stations du réseau NPR, notamment à Plattsburgh, ont cessé d’être captées à Montréal en raison de nouvelles stations sur le FM.
La télévision publique – PBS – est encore plus sensible aux coupes dans le financement fédéral, selon Mme Turnau : l’État contribue à près de 15 % du budget de la station PBS du Vermont.
« On parle de centaines de milliers de personnes dans les régions rurales qui ne pourront plus avoir accès aux nouvelles nationales, régionales et internationales de la radio publique. »
— Robin Turnau
« Nous avons 27 antennes dans l’État, certaines ne couvrent qu’une vallée, à Stowe, par exemple », poursuite Mme Turnau, qui a commencé sa carrière à VPR en dirigeant les radiothons interrompant la programmation afin de recueillir des dons pour la station.
Les coûts annuels de ces antennes représentent près de 10 % du budget annuel de 8,5 millions US de VPR.
L’autre inconnue, c’est le coût de la programmation. VPR a quelques émissions de nouvelles locales, le midi et en soirée, et dépense 1 million US par année pour avoir accès aux émissions nationales de NPR, à celles d’autres stations du réseau et à celles de distributeurs d’autres réseaux publics, notamment CBC.
« Nous craignons que les stations n’augmentent leurs prix pour compenser la perte du financement fédéral, dit Mme Turnau. Pour le moment, nous sommes proches d’un système d’échange. » VPR ne vend aucune de ses émissions à l’extérieur du Vermont.
Un système différent
La radio publique américaine est née dans les universités et s’est développée presque entièrement sur la base de contributions des auditeurs lors de radiothons interrompant la programmation. Des sociétés et des fondations privées peuvent également subventionner des stations ou des émissions particulières, ce qui sera mentionné en ondes par les animateurs. Le gouvernement fédéral finance certaines émissions et des stations rurales depuis 1967 par le truchement de la Public Broadcasting Corporation. Il existe trois grands groupes de radios publiques : American Public Media, Public Radio Exchange et National Public Radio (NPR), cette dernière ayant été créée en 1967 par le gouvernement fédéral.
En chiffres
59 %
Part du financement public de Radio-Canada/CBC
10 %
Part du financement public de Vermont Public Radio (VPR)
8,5 millions US
Budget annuel de VPR
800
Nombre des 27 000 donateurs de VPR qui sont québécois
4,7 millions US
Somme des dons de particuliers à VPR par année
2 millions US
Somme des dons d’entreprises à VPR par année
Sources : VPR, Radio-Canada