Personnalité de la semaine

Guylaine Archambault

La directrice générale du musée Armand-Frappier, à Laval, est notre personnalité de la semaine

Durant le temps des Fêtes, La Presse Affaires a publié une série d’articles sur des dirigeants d’entreprise qui avaient commencé au bas de l’échelle. Des commis, des caissières devenus numéro un de leur organisation.  On aurait pu y inclure Guylaine Archambault, qui a commencé comme animatrice au musée Armand-Frappier, à Laval, et qui dirige maintenant cette institution en pleine croissance.

C’est elle, avec son équipe, qui a choisi de faire venir à son musée Nous et les autres : Des préjugés au racisme, exposition créée par le Musée de l’Homme, à Paris, qui pose un regard scientifique sur la discrimination pour en décortiquer les sources et les impacts et démystifier la différence.

On y apprend entre autres que les humains sont génétiquement si semblables entre eux que le concept de race n’a aucun fondement scientifique. Et que si nos mécanismes cognitifs nous poussent vers des catégorisations inutiles, dans le cas de l’apparence physique des humains, l’exclusion est ressentie dans la même partie du cerveau que la douleur.

« On trouvait cette exposition riche en informations, touchante, intelligente. Ça nous a renversés. »

— Guylaine Archambault, directrice générale du musée Armand-Frappier

Notre personnalité de la semaine a vu l’exposition à Paris dans le cadre d’une tournée muséale, avant d’entreprendre les démarches pour qu’elle soit présentée ici, pour en réduire la taille et l’adapter légèrement.

S’il est important de comprendre que nous sommes tous différents et uniques, continue la directrice générale du musée Armand-Frappier, il est aussi crucial de voir à quel point nous sommes semblables.

L’exposition parisienne s’étalait sur 800 mètres carrés, celle de Laval en couvrira 150. « Mais tous les contenus sont là », assure Mme Archambault.

On y parle des dangers de l’essentialisation – le fait de limiter les individus à une seule de leurs caractéristiques – ou de la hiérarchisation des catégories que nos cerveaux construisent…

« Tout ça se veut rassembleur, bienveillant », explique la directrice. On cherche surtout à déconstruire les stéréotypes, à rappeler un peu d’histoire importante, à penser à demain.

La progression du musée Armand-Frappier

Originaire de Saint-Denis-sur-Richelieu, la jeune scientifique, titulaire d’un baccalauréat en microbiologie et immunologie de l’Université McGill, est entrée il y a 20 ans dans ce musée fondé par la fille du Dr Armand Frappier, Lise Frappier-Davignon. Le mandat de l’institution était, au départ, de faire connaître la vie et l’œuvre de ce grand scientifique, de ce visionnaire, explique Mme Archambault. C’était en 1998. « Je me rappelle encore la glace dans les arbres qui ployaient sous le poids du verglas », raconte Mme Archambault.

Le musée parlait donc essentiellement, à l’époque, d’Armand Frappier, pionnier dans le domaine de la médecine préventive et de la vaccination au Québec. Il a été l’un des premiers à aller étudier à l’Institut Pasteur à Paris, au début du siècle dernier, à la recherche de solutions pour prévenir la propagation de la tuberculose, dont sa mère était morte.

En revenant, il a rapporté les souches nécessaires pour qu’on puisse fabriquer des vaccins ici, et c’est ainsi qu’il a amorcé le développement de ce secteur au Québec.

En 20 ans, Mme Archambault a suivi la progression du musée et a obtenu un MBA en cours de route.

Elle a amené l’établissement à élargir son mandat, pour présenter des expositions traitant de médecine, de science, d’une façon plus générale.

Actuellement, elle pilote un projet de 10 millions pour le déménagement et l’agrandissement du musée. Il triplera de taille et sera adjacent au Cosmodôme, toujours à Laval, mais 5 km plus loin. Le musée deviendra un « biocentre », avec, encore et toujours, des expositions scientifiques interactives, le plus didactiques possible. Parce que le musée s’est donné des missions très concrètes, auprès des jeunes notamment, avec aussi des camps de jour et autres activités scolaires.

Issue d’une famille où l’on s’intéressait à la fois à la science, grâce à un père vétérinaire, et à l’éducation, grâce à une mère enseignante, Mme Archambault dirige une équipe d’éducation scientifique qui compte maintenant 12 employés à temps plein et 25 personnes si on inclut les animateurs étudiants.

L’exposition est présentée actuellement au musée Armand-Frappier, à Laval.

Guylaine Archambault en quelques choix

Un livre

« Le vivre ensemble n’est pas un rince-bouche de Rachida Azdouz, pour découvrir la multiplicité des points de vue et réaliser la complexité et l’importance de cet enjeu. »

Un film

« La liste de Schindler de Steven Spielberg, pour tous ceux qui se lèvent et combattent les injustices. »

Un personnage historique

« Le Dr Armand Frappier, pour sa résilience et sa vision qui ont permis de mettre la santé publique au cœur des préoccupations de la société québécoise. »

Un personnage contemporain

« Angela Merkel, pour son ouverture et sa bienveillance envers l’autre. »

Une philosophie de vie

« Celle du Dr Armand Frappier, l’aequanimitas, qui consiste à ne pas s’emporter, ni dans le malheur ni dans le bonheur, et à adopter la bonne humeur autant que possible. »

Une cause pour laquelle elle irait manifester

« Le sous-financement par l’État des musées de sciences. Nos institutions ont pourtant un mandat névralgique pour notre société. Elles diffusent et valorisent les savoirs, promeuvent l’esprit critique, fédèrent autour de valeurs communes, suscitent l’innovation et, au final, contribuent à façonner un avenir inclusif et durable. Sur ma pancarte, j’écrirais : “POUR la muséologie scientifique !” »

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.