Opinion : Droits de l’enfant au Québec

Loin d’être

toujours respectés

Dimanche dernier, le Collectif éducation sans frontières a dénoncé une fois de plus le statut que le gouvernement du Québec réserve aux enfants d’immigrants sans papiers.

À moins de payer des droits de scolarité de 5657 $ au primaire, et de 7075 $ au secondaire, ceux-ci n’ont pas accès à l’école. Compte tenu de la précarité qui caractérise les familles d’immigrants sans papier, aussi bien dire qu’on prive ces enfants du droit fondamental à l’éducation.

On peine à croire que le Québec se rende responsable d’un manquement aussi grave aux dispositions de l’article 28 de la Convention internationale des droits de l’enfant que le Canada a ratifiée en 1991 et à laquelle le gouvernement québécois s’est lui-même déclaré lié par décret.

Comme symbole d’exclusion sociale, on peut difficilement faire pire. Se servir ainsi de l’enfant pour punir les adultes qui ne se sont pas conformés aux règles d’immigration n’est rien de moins qu’inacceptable.

L’enfant n’est pas et ne doit jamais devenir un instrument de sanction.

Cet accroc à la Convention des droits de l’enfant est particulièrement choquant, mais il n’est malheureusement pas unique.

Les médias ont rapporté récemment l’une des inégalités dont les enfants issus d’une union de fait font l’objet en droit de la famille québécois par rapport aux enfants nés en mariage. Si, en cas de décès du père durant la grossesse de la mère, l’enfant du mariage bénéficiera à sa naissance d’une filiation paternelle de plein droit en raison de la présomption légale de paternité prévue au Code civil.

Tel n’est pas le cas de l’enfant de l’union de fait qui se verra quant à lui contraint de s’adresser au tribunal pour en obtenir l’établissement. Qui plus est, le droit québécois exclut encore et toujours les familles de fait du champ d’application des mesures de protection de la résidence familiale introduites au Code civil en 1980.

L’enfant du couple marié profitera donc de la stabilité du cadre de vie familiale que ces règles visent à assurer, mais non l’enfant du couple en union de fait. Pourtant, l’article 2 de la Convention des droits de l’enfant protège expressément les enfants contre toute forme de discrimination motivée par la situation conjugale de leurs parents.

DROIT À LA CONNAISSANCE DES ORIGINES

Une autre atteinte à la Convention des droits de l’enfant concerne ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler le droit à la connaissance des origines.

Si la grande majorité des personnes connaissent leur identité d’origine, laquelle coïncide généralement avec leur filiation, d’autres en revanche n’y ont pas accès de manière systématique. Tel est le cas des enfants adoptés et de ceux qui sont issus d’une procréation assistée avec contribution d’un donneur de sperme ou d’une donneuse d’ovocyte.

En matière d’adoption, l’enfant adopté ne pourra recueillir les renseignements lui permettant d’identifier ses parents d’origine que dans la seule mesure où ces derniers ont consenti à les rendre accessibles. En cas de refus de leur part ou s’ils décèdent sans avoir préalablement consenti, le dossier de l’enfant restera fermé à tout jamais.

La situation est encore pire en matière de procréation médicalement assistée, les cliniques ou hôpitaux ne pouvant fournir à l’enfant quelque information nominative que ce soit, et ce, même si le donneur ou la donneuse a préalablement consenti à leur divulgation.

Au cours des dernières années, plusieurs États ont changé leur législation pour se conformer aux articles 7 et 8 de la Convention des droits de l’enfant qui, au dire de plusieurs observateurs, contiennent les bases d’un véritable droit à la connaissance des origines.

Au Québec, les choses stagnent. Deux projets de loi préconisant une plus grande ouverture en matière d’adoption sont morts au feuilleton au cours des dernières années. Un troisième projet, supposément en préparation au ministère de la Justice, se fait attendre depuis trop longtemps. Quant aux enfants issus de la procréation assistée, leur quête identitaire demeure pour le moment totalement ignorée.

UN MANQUEMENT GÊNANT

Je ne pourrais conclure ce commentaire sur les droits de l’enfant sans dénoncer l’article 43 du Code criminel canadien qui autorise les parents à user de force physique pour corriger leur enfant dans le cadre de leur mission éducative.

Voilà bien un manquement flagrant et gênant à l’article 19 de la Convention des droits de l’enfant qui protège l’enfant contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales. Même dite raisonnable, même balisée par des critères, l’usage de la force physique pour punir un enfant reste socialement et juridiquement inacceptable.

Le manque de maturité de l’enfant ne saurait en rien justifier un acte qui, posé à l’endroit d’un adulte, constituerait une atteinte inacceptable et injustifiée à ses droits à l’intégrité et à la sécurité garantis par les chartes canadienne et québécoise.

On aimerait croire que le Québec et le Canada présentent, en matière de droits de l’enfant, une fiche parfaite. Tel n’est malheureusement pas le cas. Beaucoup de travail reste à faire. Peu importe leurs programmes politiques, nos gouvernements doivent en demeurer conscients et agir en conséquence. Les promesses ne suffisent pas.

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