Mon clin d’œil Stéphane Laporte

« Il n’a jamais fait aussi beau au Québec. » 

— Philippe Couillard

ÉLECTIONS PROVINCIALES OPINION

Cher M. Legault

Je suis propriétaire d’une entreprise manufacturière en Estrie. Nous sommes en activité depuis huit ans et nous avons le vent dans les voiles ! Avec une croissance soutenue de 25 % par année, la main-d’œuvre est notre défi. 

Cette année, je n’étais plus capable de répondre à ma clientèle dans les délais convenus. Conséquence : j’étais sur le point de perdre mon principal client par manque de main-d’œuvre, pas par manque d’équipement ni par manque de main-d’œuvre non qualifiée. 

J’ai eu la chance de rencontrer l’organisme Actions interculturelles, qui aide les immigrants à trouver un emploi et à s’intégrer au marché du travail. Ma réalité d’entreprise est en train de changer. J’ai enfin trouvé du personnel pour travailler dans ma PME. Effectivement, la barrière de la langue est présente puisque mon anglais est vraiment mauvais… et leur français, pas encore à point. Eh bien, nous travaillons à grandir ensemble, et c’est génial. 

Je les admire, mes employés d’autres cultures : ils en sont à l’apprentissage d’une troisième, quatrième et même d’une cinquième langue. Et vous, M. Legault, vous parlez l’unilinguisme ! Vous dites aussi que la régionalisation est un échec ? Eh bien, quand je regarde Boucar Diouf et mes nouveaux employés, je ne vois pas d’échec. Le seul échec que je vois, c’est le temps que ça m’a pris à comprendre comment le recrutement fonctionne avec les gens d’autres cultures. Ils ne passent pas par les mêmes créneaux et il y a peu d’information pour nous, les employeurs. 

L’échec, ce n’est pas la régionalisation, c’est le manque d’information en provenance de l’État. Il ne se passe pas une journée sans que j’entende un confrère entrepreneur me parler de son problème de main-d’œuvre. La régionalisation, les PME en ont besoin ! 

Je suis en accord avec vous sur un point, M. Legault : la situation actuelle est intolérable. Oui, la situation de l’embauche au Québec est intolérable pour les PME. La croissance de nos entreprises est en jeu par manque de main-d’œuvre et vous, vous parlez de diminuer l’immigration. Et qui va travailler dans nos petites entreprises manufacturières ? Qui va faire vivre le Québec de demain ? 

Le Québec investit des sommes considérables pour promouvoir l’entrepreneuriat, car l’économie québécoise repose sur les PME. Comment pouvez-vous, d’une part, promouvoir l’entrepreneuriat et, d’autre part, vouloir réduire notre bassin de main-d’œuvre ? Vous connaissez les chiffres mieux que moi, M. Legault, nous ne sommes pas encore dans le pire de la situation de l’emploi. Non, ce sera dans cinq à six ans. Comment est-ce possible d’un homme qui a fait fortune en ouvrant les Québécois sur le monde avec Air Transat ? Comment ce même homme peut-il vouloir fermer le Québec au reste du monde ? 

La seule réponse qui me vient, M. Legault, c’est que d’entretenir la peur chez un certain groupe de vos électeurs, c’est payant pour vous, mais c’est loin d’être payant pour les Québécois. Je trouve ça scandaleux que vous n’ayez aucune vision à long terme et si peu d’ouverture au changement. Pourtant, deux qualités essentielles d’un bon leader.

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