« Ça ouvre une place sur le podium »

Le CIO refuse au fondeur russe Sergey Ustiugov, grand rival du Québécois Alex Harvey, sa participation aux Jeux de PyeongChang

Les Jeux olympiques de PyeongChang n’ont pas encore commencé que les chances d’Alex Harvey de monter sur le podium se sont améliorées de façon notable.

Le fondeur russe Sergey Ustiugov, l’un des grands favoris, s’est vu refuser sa participation par le Comité international olympique (CIO), comme 110 de ses compatriotes qui n’ont pas satisfait aux critères d’un comité indépendant chargé de vérifier leur probité sur le plan du dopage.

« C’est sûr que si je finis troisième au skiathlon, je peux remercier le Comité international olympique ! », a commenté Harvey, hier, depuis l’Italie, où il achève sa préparation.

Présenté le 11 février, deuxième journée des Jeux, le skiathlon de 30 km est la première épreuve du programme de ski et la principale cible de Harvey en Corée en Sud. Ustiugov en est le champion mondial, comme du sprint par équipes avec Nikita Kriukov, suspendu à vie juste avant Noël. À Lahti, en mars 2017, Ustiugov avait aussi gagné l’argent au sprint individuel, au relais et au 50 km style libre.

« Je suis quand même surpris que le CIO se rende aussi loin, c’est l’une des plus grandes stars du ski de fond », a souligné Harvey, qui avait battu Ustiugov au 50 km libre aux Mondiaux.

La semaine dernière, le CIO avait annoncé l’exclusion de 111 athlètes d’une liste de 500 candidats soumise par le Comité olympique russe.

Des noms filtrent depuis lundi. Le patineur de vitesse sur courte piste Viktor Ahn est le plus connu. Triple champion olympique et médaillé d’argent à Sotchi, il aurait été impliqué dans le dopage d’État révélé par le rapport McLaren en 2016. Si ce dernier est disqualifié, le médaillé de bronze québécois Charle Cournoyer pourrait hériter de l’argent au 500 m.

Le retour d’Ahn dans son pays natal, où le courte piste est l’un des sports les plus en vue, s’annonçait comme une affaire majeure à PyeongChang.

Un doute

En plus d’Ustiugov, le biathlonien Anton Shipulin (médaillé d’or au relais à Sotchi), la patineuse artistique Ksenia Stolbova (double médaillée) et cinq hockeyeurs, dont l’ancien attaquant des Stars de Dallas Valery Nichushkin, n’ont pas rempli les conditions édictées par le CIO au début de décembre. L’organisation avait alors exclu la Russie des Jeux de PyeongChang en tant que pays. Ses citoyens pourront concourir sous l’appellation « Athlète olympique de Russie » et ne pourront entendre leur hymne national s’ils montent sur la plus haute marche du podium.

Tout en saluant la fermeté du CIO, Harvey espère qu’Ustiugov ne paye pas pour sa simple participation aux derniers Jeux. « S’il s’est vraiment dopé, c’est extrêmement bon pour le sport, il ne mérite pas de compétitionner aux Olympiques, a-t-il dit. Mais il y a quand même un doute qui plane dans ma tête. » 

« Est-ce qu’il y a des faits derrière ça ou c’est simplement [une culpabilité] par association parce qu’il était à Sotchi avec les autres ? »

— Alex Harvey

L’absence d’explications, le manque de clarté et la longueur du processus ouvrent la porte à toutes les hypothèses, déplore le fondeur de Saint-Ferréol-les-Neiges, qui estime que l’image de marque du CIO en prend pour son rhume.

N’empêche, Harvey maintient sa réserve déjà émise au sujet d’Ustiugov quand plusieurs de ses coéquipiers de Sotchi s’étaient fait suspendre à vie l’automne dernier. Deuxième des qualifications du sprint individuel, le Russe avait atteint la finale, où une chute l’avait probablement privé d’un podium.

« Peut-être que lui n’était pas dopé, mais il avait gagné un sprint de Coupe du monde plus tôt cette année-là. C’était un système de dopage, pas des individus qui se dopaient. S’il n’en faisait pas partie, je ne comprends pas la logique. […] Mais ça reste un doute personnel. Ce n’est pas assez fort pour bannir un athlète. »

Sur le plan sportif, l’absence d’Ustiugov vient considérablement brasser les cartes à deux semaines et demie du début des compétitions.

« Selon moi, ça ouvre une place de plus sur le podium, a indiqué Harvey. Il est peut-être un petit peu moins fort que l’an passé, alors qu’il avait gagné plein d’étapes et le Tour de ski. Mais il était encore très fort au Tour et il s’enlignait pour avoir un championnat similaire à celui qu’il a eu à Lahti l’an passé. Sur les quatre courses individuelles, ça libère au moins deux places. Je le voyais facilement sur le podium au sprint individuel, au skiathlon et au 15 km style libre. »

Intégrité

Pour recevoir une invitation le 27 janvier, les candidats à l’équipe olympique de Russie devront prouver leur intégrité selon une série de critères définis par le CIO. Ils devront entre autres s’être soumis à tous les contrôles antidopage ciblés recommandés par le panel indépendant.

En Russie, le rejet de plusieurs athlètes de haut rang a soulevé l’ire des dirigeants et ravivé l’idée d’un boycottage. Le président de la commission sportive du Parlement russe a indiqué à l’Associated Press que le pays devait « défendre son honneur ».

« On s’en est pris au drapeau russe, à son hymne. On a tenté de pousser la Russie à boycotter les Jeux. […] Maintenant, il s’agit d’une deuxième tentative, d’une tyrannie. Une tentative de diviser les athlètes qui ont su conserver une réputation sans tache, a déclaré Mikhail Degtyarev. Je ne suis pas personnellement pour un boycottage. Je trouve cela contre-productif. Mais nous devons défendre notre honneur. »

— Avec l’Associated Press

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