Un gars, une passion

L’histoire du sport en ruban gommé

René Bégin

Passion : le tape art

Candiac

51 ans

Certains artistes choisissent un médium surprenant pour créer. Dans le cas de René Bégin, son outil de travail est cet élément essentiel, quasi vénéré par les joueurs de hockey : le ruban à bâton. Brut et imparfait, le tape de hockey se métamorphose en tableaux hommages signés Bégin.

« Je travaille avec l’acrylique, l’huile et du ruban adhésif de sport. J’ai un style figuratif contemporain qui flirte avec le pop art et l’art vintage. Je m’inspire de l’histoire tant au niveau sportif que culturel, musical ou urbain », explique René Bégin. Couchées sur bois, certaines de ses œuvres sont uniquement faites de ruban de hockey, alors que d’autres mélangent le ruban et la peinture.

AMOUREUX D’ART, DE SPORT ET D’HISTOIRE

« Je dessine depuis que j’ai 3 ans ! J’ai commencé par dessiner un peu n’importe quoi, une fleur, une maison, un personnage, se souvient l’artiste. Je me suis rapidement mis à dessiner des scènes de guerre puis des scènes sportives. » Dès l’âge de 7 ou 8 ans, il s’amusait à dessiner des équipes de baseball ou de hockey au grand complet.

Il a fait un baccalauréat en design graphique et travaille aujourd’hui en publicité. « Pour moi, je vis de mes deux plus grandes passions, la pub et la peinture. C’est sûrement pour ça qu’il y a un côté pop art dans mes toiles. » Alors qu’en publicité, René Bégin travaille pour les autres, les exercices de création artistique avec le ruban sont des moments privilégiés qu’il s’accorde. Il confie d’ailleurs qu’il ne pourrait pas que travailler en atelier, même si son carnet de commandes bien rempli lui permettrait de le faire. L’artiste a besoin de voir des gens, de travailler en équipe. « J’allie les deux et la combinaison m’apporte beaucoup. J’aime la pub parce que c’est éphémère et la peinture parce que c’est permanent. Je vois un équilibre entre les deux, comme le yin et le yang », illustre René Bégin.

DU PINCEAU AU RUBAN

C’est par hasard, en 2013, qu’il a eu l’idée de travailler avec le ruban de hockey. « Je suis entré dans un magasin de sport pour faire aiguiser mes patins. J’ai aperçu un arc-en-ciel au fond la boutique », raconte-t-il. Un commis avait placé les roulettes de ruban textile en suivant la gradation des couleurs.

« Pour moi, le tape de hockey, c’était blanc ou noir et là, il devait bien y avoir une quinzaine de couleurs. Je préparais une expo de peinture sur le hockey et je me suis dit que ça pourrait être intéressant de trouver une façon d’intégrer ça. »

Il a fait des recherches et découvert le tape art, une technique de création à partir de ruban gommé.

Il estime que son procédé de tape art requiert deux fois plus de temps de production qu’une peinture. Sur de petits formats, où les détails demandent des micromorceaux de ruban, il peut facilement passer 35 h puisque chaque bout est d’abord découpé au couteau exacto sur une planche, puis collé sur la surface de bois. « C’est peut-être pour ça que ça ne me dérange pas de la voir partir une fois qu’elle est terminée. J’ai vécu mon intimité avec l’œuvre en la réalisant, j’ai passé beaucoup de temps avec elle. C’est le processus qui m’anime. Et c’est à l’acquéreur d’en profiter à son tour. »

LE SPORT, ET APRÈS ?

Celui qui se décrit comme un grand sportif se questionne à savoir comment utiliser cette technique pour donner vie à des scènes autres que celles en mouvement sur la glace ou sur le terrain. « Actuellement, j’ai beaucoup de commandes pour le sport, mais j’aimerais sortir de ça et essayer autre chose. Par exemple, je suis en train de faire La Joconde en tape. C’est assez surprenant, avec mon fond de bois, j’obtiens quasiment les mêmes teintes dans son visage. »

René Bégin a participé à quelques symposiums et a exposé en solo deux fois. Pour le moment, il n’est représenté par aucune galerie. Et malgré sa façon de tourner l’objet en œuvre artistique, il voit encore le ruban de hockey comme l’outil de travail du sportif et non pas seulement comme un médium à créer. « Le tape est un élément essentiel pour eux. Sur un bâton de hockey, un bâton de baseball ou une raquette de tennis… Et c’est ma façon de rendre hommage aux athlètes », termine l’artiste.

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