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Édition du 14 janvier 2017,
section ACTUALITÉS, écran 9
Non, le cannabis médical n’est pas un mythe. Les 16 auteurs du rapport concluent que la marijuana ou les dérivés synthétiques du cannabis soulagent la douleur chronique chez les adultes, peuvent prévenir la nausée et les vomissements dus à la chimiothérapie, et soulagent les symptômes de la sclérose en plaques. Des données sérieuses semblent montrer que le cannabis peut améliorer les troubles du sommeil causés par toutes sortes d’affections. Le cannabis ne semble cependant pas efficace contre la dépression et la démence, ni soulager la pression dans les yeux provoquée par le glaucome.
Tenez-vous-le pour dit : griller un joint avant de prendre le volant est une mauvaise idée et augmente la probabilité d’avoir un accident. Des études soulignent aussi un danger méconnu : dans les États américains où le cannabis est légal, le nombre d’enfants qui en ont avalé par accident a augmenté de façon marquée. Certains ont souffert de symptômes graves comme des défaillances respiratoires, des problèmes cardiovasculaires ou des comas temporaires. Aucune étude n’a montré que la consommation de cannabis était liée à des morts par surdose.
Les études qui se sont penchées sur les liens entre la consommation de cannabis et les cancers liés à l’usage du tabac comme ceux du poumon, de la tête et de la gorge n’en ont pas trouvé. Aujourd’hui, les auteurs avancent avec une assurance « modérée » que la consommation de cannabis ne cause pas ces cancers. Il pourrait exister un lien entre la marijuana et un sous-type de cancer du testicule, mais les données en ce sens sont actuellement « limitées ».
Les fumeurs de pot réguliers toussent plus, ont davantage de sécrétions dans le système respiratoire et sont plus sujets aux bronchites chroniques que les autres. Ces affections sont cependant susceptibles de s’atténuer s’ils arrêtent de fumer. La science ne permet pas de dire si fumer du cannabis déclenche ou augmente les problèmes d’asthme ou empire le fonctionnement des poumons.
En gros, la science actuelle ne permet pas de dire clairement si le cannabis a un impact sur la santé cardiovasculaire. Cela est notamment dû au fait que les consommateurs de marijuana sont généralement jeunes, alors que ceux qui souffrent de problèmes cardiovasculaires sont généralement âgés. Les auteurs du rapport parlent d’un « vide important » dans les connaissances qui doit être comblé.
Les auteurs avertissent que les liens entre cannabis et santé mentale sont complexes. Est-ce la drogue qui cause la maladie mentale, ou la maladie mentale qui pousse vers la drogue ? Il est aussi possible qu’un autre facteur de risque favorise à la fois la consommation et les problèmes de santé mentale. Dans tous les cas, il existe une corrélation entre l’usage de cannabis et le risque de souffrir de schizophrénie ou d’autres formes de psychose – et plus la consommation de cannabis est importante, plus ce risque augmente. Une légère augmentation du risque des troubles dépressifs est aussi observée. Certains liens entre la consommation de cannabis et le suicide, l’anxiété sociale et les troubles bipolaires sont aussi notés. Le rapport relève la nécessité d’en savoir plus sur le sujet.
À court terme (moins de 24 heures), il est clair que le cannabis perturbe la mémoire, l’attention et la capacité d’apprentissage. La grande question est de savoir si ces effets perdurent. L’Académie des sciences américaine souligne que la consommation débute souvent pendant l’adolescence, alors que le cerveau est en pleine transformation, d’où l’importance de bien comprendre cette relation. Certaines données montrent une association entre l’usage du cannabis et une détérioration à long terme des capacités cognitives, mais elles sont « limitées ». Des preuves « limitées » établissent aussi une association entre le cannabis et une moins bonne réussite scolaire, un plus haut taux de chômage et une moins bonne intégration sociale. Mais attention : comme avec la santé mentale, on parle ici d’associations, et non de relations de cause à effet.
L’usage de cannabis est considéré comme « problématique » s’il conduit à l’abus ou à la dépendance. Plusieurs scientifiques ont tenté de voir qui, exactement, développe ce type de problèmes. Conclusion : commencer à prendre du cannabis à un jeune âge est nettement un facteur de risque. Tant les filles que les garçons sont susceptibles de faire un usage problématique du cannabis, mais la sévérité des problèmes est souvent plus grande chez les garçons. Fait intéressant, les recherches montrent que souffrir d’un trouble du déficit de l’attention avec hyperactivité n’est pas un facteur de risque.
Parmi les faits intrigants, les chercheurs observent que l’usage régulier de cannabis semble avoir des propriétés anti-inflammatoires. Moins réjouissant, il est aussi lié, pendant la grossesse, à la naissance de bébés à faible poids. Certaines études montrent également une association statistique entre la consommation de cannabis et la dépendance à l’alcool, au tabac et à d’autres drogues illicites.
Considérant l’ampleur de la consommation de marijuana au sein de la population et les enjeux de santé publique qu’elle suscite, les Académies des sciences, de génie et de médecine américaines incitent à mieux financer la recherche sur le sujet. Elles notent que le fait que le cannabis soit illicite aux États-Unis « entrave » actuellement l’avancement des connaissances.